On le sait peu, mais les CFF ont une filiale internationale, la très discrète SBB GmbH, basée à Constance en Allemagne . Depuis 2003, cette société est responsable de l’exploitation de diverses lignes de chemin de fer en Allemagne, du côté de Constance et, depuis décembre 2006, sur une ligne du Regio-S-Bahn Basel, entre Bâle, Lörrach et Steinen / Zell im Wiesental, la partie allemande des environs de Bâle.
SBB GmbH vient de voir son contrat reconduit pour huit années encore sur le Seehas, une ligne régionale allemande qui relie la ville de Constance (Konstanz), au bord du lac du même nom, vers Singen et Engen, une bourgade au pied de la Forêt-Noire, soit sur la rive droite du Rhin qui sépare les deux pays. La ligne porte le numéro KBS 720 en Allemagne :
Dès 1994, le défunt Mittelthurgaubahn, un vrai privé suisse, avait tenté le train régional non subsidié entre Weinfelden, en Suisse, et Engen via Constance. Il s’agissait d’un véritable trafic international régional. La société faisant faillite fin 2002, ses actifs furent acquis par Thurbo AG, une filiale des CFF devenue SBB GmbH aujourd’hui. Celle-ci opère donc depuis 2006 le service Seehas, exclusivement en Allemagne, sans plus aucun trafic transfrontalier. Ceci dit, Constance est aussi reliée par des trains toutes les heures vers l’aéroport de Zürich, Zurich-Hbf et Lucerne, aux bords du lac des Quatre Cantons. Une ville très bien desservie, donc. Au niveau local, Thurbo, une autre filiale des CFF, relie Konstanz à Kreuzlingen toutes les demi-heures avec le RER S 14. SBB GmbH utilise pour cette une flotte de 9 rames Stadler FLIRT à quatre caisses, classées aux CFF en tant que RABe 521 201 à 209, et disposant de 163 places et 39 strapontins.

Les CFF en Allemagne, apparemment à la grande satisfaction du Land de Bade-Wurtemberg, qui paye une partie des subsides. Mais comme le district de Constance voulait que les trains soient aussi cadencés à la demi-heure sur la section déficitaire Singen-Engen, il a du mettre la main à la poche, le Land ne prenant en charge qu’un train par heure. Une belle démonstration de l’importance, en Allemagne, du pouvoir local, ce qui fait d’ailleurs dire au ministre régional des Transports du Land : « Je suis très heureux que le district de Constance continue d’être notre partenaire financier. En unissant nos forces, nous pouvons offrir un transport ferroviaire local très attractif dans les environs immédiats de la Suisse. » Une manière aussi de partager les pertes et de répartir les efforts…
Dans une période précédente, les contrats de transport avec le Land de Bade-Wurtemberg, qui couraient jusqu’en 2014, avaient déjà été prolongés jusqu’en 2020 tant pour le Seehas que le Wiesentalbahn à l’est de Bâle. L’accord renouvelé jusqu’en 2027 concrétise pour SBB GmbH cette très bonne note que lui attribue le gouvernement régional, maître de ses trains : « Nous continuons d’être très satisfaits de la performance des CFF. La ponctualité et la fiabilité des CFF sont nettement plus élevées que celles de certains autres chemins de fer du Bade-Wurtemberg. Par conséquent, à l’heure actuelle, nous nous sommes prononcés contre la résiliation des contrats et contre un nouvel appel d’offres ». Juridiquement cependant, la ligne Seehas devra être remise par appel d’offre sur le marché en 2027.
Le journal régional SüdKurier se fait presque lyrique en déclarant que « les retards sont limités, les annulations de train aussi, les wagons sont propres et climatisés : comment les CFF créent cela sur l’itinéraire Seehas, alors que d’autres échouent ? Il y a des éloges de la part du Land et du district et les passagers sont satisfaits dans l’ensemble.» La ligne Seehas avait déjà enregistré près de 5,2 millions de voyageur en 2016, et les trafics sont à la hausse. On y compte environ 15.000 voyageurs quotidiens par jour. Cette augmentation est notamment attribuable aux valeurs élevées de ponctualité et de qualité et a été reflétée dans les enquêtes de satisfaction de la clientèle.
De nouvelles améliorations ont cependant été demandées aux CFF. À partir de décembre 2020, une partie des trains de Seehas voyageront en double traction, soit une production supplémentaire de 83.000 kilomètres par an. Le transport de vélos sera effectué, conformément à la réglementation nationale, du lundi au vendredi gratuitement dès 9h du matin, l’heure de pointe étant payante pour d’évidentes raisons.
La politique de régionalisation du rail allemand ne fait plus débat : c’est une réussite. À deux conditions : avoir les fonds nécessaires pour les subsides, d’une part. Et d’autre part opérer ces services ferroviaires locaux avec des petites entreprises agiles, où les coûts tournent autour des 9 à 11 euros du train/kilomètre. Une question de volonté, de stratégie et de bon sens…
