Proposition pour des trains de nuit (2) : Belgique -Milan/Barcelone


15/10/2020 – Par Frédéric de Kemmeter – Signalisation ferroviaire et rédacteur freelance
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Nous poursuivons ici une petite série de propositions totalement libres sur les relations par trains de nuit qui nous semble le plus plausible. Aujourd’hui, voyons ce qu’on pourrait faire entre le Benelux et l’arc méditerranéen.

Contexte
La Belgique et les Pays-Bas concernent à eux seuls un bassin de population d’environ 28,92 millions d’habitants, pour la plupart tourné vers le sud quand il s’agit de vacances. L’arc méditerranéen concentre de plus en plus d’importants centres économiques, alors que jusqu’ici c’était plutôt le nord de l’Europe qui concentrait cet avantage.

L’idée
Relier quotidiennement Bruxelles à deux grandes villes de l’Europe méditerranéenne : Milan et Barcelone. En moyenne et haute saison, on pourra rajouter la destination Nice. Voyons cela dans les détails :

  • Milan est la porte d’entrée vers l’Italie, et la gare Centrale est reliée pratiquement à toutes les villes, moyennes et grandes, ce qui permet d’atteindre toute la péninsule en une petite journée, la Sicile et la Sardaigne excepté. Milan est aussi « une autre Italie », celle de la finance et de la mondialisation, alors que la ville n’est pas capitale;
  • Barcelone est le pendant espagnol de Milan. La ville, encore provinciale il y a une vingtaine d’années, est devenu un haut lieu du tourisme. Trop peut-être, car la ville étouffe davantage que Milan par son attrait touristique. Barcelone est aussi un lieu économique d’envergure mondiale, mais peut-être moins que la ville italienne.
  • Nice n’est pas à priori un grand centre économique mais se situe en revanche sur l’une des côtes les plus riches du monde, avec pour voisin Monaco. La région niçoise, la Côte d’Azur, est un haut lieu de villégiature pour les retraités de toute l’Europe.

Pourquoi pas depuis Amsterdam ?
Tout simplement parce que cela allongerait le trajet d’environ 3 heures, sauf à envisager un matériel de nuit TGV, inexistant sur le marché. On ne passera pas non plus par Lille car il nous faut contourner le très encombré réseau d’Île de France. C’est donc sur un trajet via Namur et Luxembourg qui nous occupe ici.

Le passage par la Lorraine permet de rattraper un autre train de nuit aux destinations identiques, en provenance de Francfort et Saarbrucken. (cliquer sur l’image pour agrandir)

La destination Nice en pointillé suggère qu’elle ne serait pas quotidienne sauf d’avril à fin septembre. Les voitures pourraient notamment, en hiver, servir à renforcer un train de nuit vers les stations de ski, par exemple en renforçant la tranche Bruxelles-Munich prolongée sur Innsbruck.

>>> À revoir : Proposition pour des trains de nuit au départ de Belgique et des Pays-Bas

On constate avec la carte ci-dessus que la recomposition des deux trains, l’un de Francfort, l’autre de Bruxelles, pourrait en réalité s’effectuer n’importe où, à Metz, Dijon voire même Lyon. La question de faire suivre deux trains sur cette longue section reste ouverte.

Le départ de Bruxelles se situerait vers 19h00, avec demi-tour en gare de Luxembourg-Ville vers 22h00. On serait à Metz vers 22h45, ce qui nous indique un départ de Francfort vers 19h40. Pour éviter un départ trop tardif de Metz, mieux vaut en définitive faire suivre les deux trains jusqu’à Dijon-Ville, où aurait lieu la recomposition vers 1h50 du matin.

Chaque tranche comporte au minimum trois voitures. Les temps de manœuvres de recomposition dépendent de ce que SNCF Réseau autorise. Généralement, ce sont les locomotives titulaires qui les exécutent. On considère qu’à 2h30, deux trains sont recomposés :

  • une tranche pour Turin et Milan, regroupant les voitures de Bruxelles et Francfort ;
  • une tranche pour Barcelone, groupée avec celle destinée à Nice.

Le train destiné à Milan peut transiter par Bourg-en-Bresse, Chambéry puis obligatoirement Modane. L’arrivée à Turin tournerait vers 8h00, pour une arrivée finale à Milan-Central vers 9h40. De ces deux gares, toutes les possibilités sont offertes pour rejoindre n’importe quel point d’Italie. On privilégiera Turin pour rejoindre Gênes puis les fameuses Cinqueterre.

L’autre train vers la Méditerranée nous mène à 5h40 à Avignon-Centre, où un dégroupage avec les voitures pour Nice ont lieu. Cette arrivée pas trop matinale permet dès lors de desservir tout l’arc languedocien à une heure convenable : Montpellier 7h00, Perpignan 8h40. La poursuite en Catalogne suppose l’emprunt de la LGV Perpignan-Figueras. En l’absence de train classique roulant sur cette infrastructure, les horaires sous réserve et VMax 160 nous indiquent une arrivée à Figueres vers 9h10 puis finalement Barcelone-Sants vers 10h25.

Enfin la tranche plus saisonnière vers Nice nous mène à Marseille à 7h00, St Raphaël à 8h40 et Nice à 9h40, horaire parfait pour une clientèle de loisirs.

Le passage du Francfort-Milan par la Lorraine peut évidemment étonner. Il est évident que le trajet direct passerait plutôt par Bâle avec une locomotive à rajouter, et on aurait alors la tranche Francfort-Barcelone/Nice qui se baladerait en solo jusqu’en Lorraine. L’astuce ici est d’avoir une stratégie de groupage pour rentabiliser le train, car au final le trajet se fait de nuit, peu importe « le détour ». L’autre argument est la desserte de Turin, une ville trop à l’écart des grands flux internationaux, excepté avec la France.

(photo Nik Morris via flickr)

Au niveau de la traction, une astuce consisterait à faire croiser les trains Nord-Sud avec ceux du retour, Sud-Nord, à Dijon-Ville. Motif : les locomotives descendantes sont celles qui reprennent, à Dijon, les trains remontants. On évite de la sorte des trajets trop longs. Emprunter la LGV Perpignan-Figueres-Barcelone oblige à avoir une locomotive apte à ce parcours sous ETCS. La locomotive qui a amené le train Nice-Bruxelles/Francfort, jusqu’à Avignon, est celle qui reprendra le train inverse au petit matin. Dans le même esprit, celle provenant de Milan-Turin, pour le retour, reprendrait à Dijon le train aller, Turin-Milan. Au final, cinq machines – hors réserve -, sont nécessaires pour ce vaste mikado. Les installations de Dijon-Ville doivent pouvoir opérer 4 manœuvres en parallèle. Si ce n’est pas possible, il faut alors se reporter sur le triage de Perrigny.

Chaque rame bloc rentre en atelier après deux allers-retours, soit à peu près 4.000 kilomètres, pour entretien.

Les trains ne comportent que des places couchées. Une voiture-restaurant pourrait être incorporée tant de Bruxelles que de Francfort, mais elle risque de limiter la capacité lorsqu’il sera nécessaire d’augmenter d’une ou deux voitures les jours d’affluence.

Le restaurant, ici dans une rame Thello (photo Mediarail.be)

Ces trains seraient gérés comme des hôtels. Ils sont fermés de 23h00 à 5h00 (c’est à dire sans service), et aucun accès n’est permis en route, ce qui est une garantie majeure pour la sécurité.

L’exemple anglais ? Une chambre du Caledonian Sleeper (photo Caledonian Sleeper)

Le catering du matin serait effectué lors des passages à Avignon d’un côté, à Chambéry ou Modane de l’autre. Pain frais garanti, café, thé et céréales et yaourt pour celles et ceux qui préfèrent…

Qui va gérer cela ?
L’opérateur qui en aurait la capacité et l’audace. Le grand hic, c’est la France et son tarif kilométrique très élevé. Sans baisse de péages, il y a peu de chance de voir un tel service sur les rails français. L’opérateur devra gérer un service hôtelier commercial. L’idée reste la même que pour la proposition précédente, avec voiture-lits pour toutes les destinations, possibilité d’occupé un compartiment couchettes à quatre ou cinq. Prix globaux basés sur l’âge et billetterie par QR Code sur smartphone ou impression chez soi. La particularité de ces trains fait qu’il faut un marketing agressif car l’hôtellerie sur rail est plus difficile à vendre. On rappellera qu’il n’est jamais utile compter un voyage de nuit en « heures », étant donner qu’une nuit reste une nuit pour tout le monde, soit de 22h00 à 6h00.

Au final, deux trains qui, avec leurs multiples correspondances, relient un vaste territoire nordique, d’Amsterdam à Berlin, vers un autre vaste territoire méditerranéen, de Trieste à Alicante, en passant par Livourne, Cannes, Montpellier et Gérone. Si la clientèle est au rendez-vous, doublant la capacité prévue, on passerait alors à des tranches de 2x 6 voitures, soit 12 véhicules par train. On peut imaginer, à terme, un train de 10-12 voitures pour chaque destination, mais il s’agirait alors d’être persuasif sur l’attrait du train de nuit et d’être irréprochable sur la qualité. L’espoir fait vivre…

(photo Michele Triggiani via flickr)

Autres propositions : 

MilanComment connecter 51 millions d’Allemands à 26 millions d’italiens
12/12/2020 – Nous poursuivons ici une petite série de propositions totalement libres sur les relations par trains de nuit qui nous semble le plus plausible. Aujourd’hui, il s’agit de connecter la moitié nord de l’Allemagne au nord de l’Italie.


Attelage_automatiqueProposition pour des trains de nuit (1) : au départ de Belgique et des Pays-Bas
09/09/2020 – Petit exercice de proposition d’un réseau de train de nuit à travers l’Europe. Aujourd’hui, 1ère partie au départ de Bruxelles et Amsterdam.


Publié par

Frédéric de Kemmeter

Cliquez sur la photo pour LinkedIn Analyste ferroviaire & Mobilité - Rédacteur freelance - Observateur ferroviaire depuis plus de 30 ans. Comment le chemin de fer évolue-t-il ? Ouvrons les yeux sur des réalités plus complexes que des slogans faciles http://mediarail.be/index.htm

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