Du 24 février au 02 mars 2021
L’actualité ferroviaire de ces 7 derniers jours.
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L’édito de la semaine
La libéralisation ferroviaire, maladroitement associée à la concurrence sur les services, a aussi été bénéfique pour une face cachée du rail, celle de la technique. Le chemin de fer porte en effet bien son nom car les mobiles doivent impérativement correspondre techniquement à l’infrastructure sur laquelle ils roulent. Si le trio ballast/traverses/rails demeure les fondamentaux du chemin de fer dans tous les pays du monde, les difficultés commencent avec la signalisation et surtout, la détection des mobiles. Car paradoxalement, l’arrivée de la traction électrique – pourtant énergie verte -, a engendré de vilains défauts qui ont compliqué le « système rail ». Les ingénieurs ferroviaires, depuis longtemps, ont préféré se servir des rails métalliques pour en faire des conducteurs de fréquences, de retour de courant de traction. Une facilité bien commode, mais les progrès dans la motorisation et les puissances disponibles des trains électriques ont fait que des interférences sont vite apparues, perturbant la détection si on y met pas les filtres adéquats. De même, la caténaire offre, sans qu’on ne s’y aperçoive, une jolie cage de Faraday entourant les trains, et qui peut brouiller toutes sortes de signaux, à commencer par le GPS. Et on vous le donne dans le mille : chaque réseau a bien-sûr été bâti sur des normes nationales, de sorte que la détection des trains – et donc leur sécurité -, sur un réseau, n’est pas la même chez le réseau voisin. Voilà pourquoi il faut encore de nos jours homologuer tout véhicule nouveau sur chacun des réseaux d’Europe individuellement pour s’assurer qu’il n’y ait aucune perturbation pouvant porter atteinte à la sécurité du trafic. Cela coûte beaucoup d’argent et fait reculer certains opérateurs, alors que ce type d’homologation n’existe pas – ou pas avec cette ampleur -, sur les véhicules routiers. L’Europe n’avait pas vu « ces détails ferroviaires » quand elle lança sa fameuse directive 91/440, dont on fête les 30 ans cette année. C’est la raison de la naissance d’une Agence ferroviaire européenne, l’ERA, sise à Valenciennes. Celle-ci vient de voir ses pouvoirs fortement augmenté suite à l’implémentation du quatrième paquet ferroviaire. Une bonne chose pour l’homologation des matériels roulants qui sont souvent les mêmes d’un pays à l’autre. En effet, et c’est une autre facette, la libéralisation du rail fut aussi bénéfique pour l’industrie. Bien qu’elle ait subit une forte concentration dans les années 90-2000, cette industrie, en rassemblant des savoir-faire de plusieurs pays, donc plusieurs « systèmes rail », a pu faire la synthèse et décliner du matériel roulant homogène, comme la locomotive TRAXX vendue à près de 3.000 exemplaires de la Finlande à l’Espagne. De tels parcs n’auraient jamais pu être déployés s’il n’y avait pas eu des règles de commandes commerciales permettant à chaque groupe industriel de décliner sa meilleure automotrice ou locomotive. Des règles rendues justement obligatoires par la législation européenne. Des facilités aussi grâce à l’homogénéisation des composants de traction du matériel roulant, quel que soit le « système rail » visé. Des frontières ouvertes qui ont permis à de petits challengers de vendre ou de moderniser des locomotives, comme par exemple CZ Loko. Une libéralisation qui a pu créer des emplois, souvent qualifiés, même si on est bien loin des effectifs du secteur automobile. Alors oui, sur son versant technique, la libéralisation du rail a été bénéfique. Il ne restait plus qu’à créer un vaste marché du leasing pour permettre à de petits opérateurs de démarrer et de montrer ce qu’ils pouvaient faire. Mais là, on est dans l’autre libéralisation, celle du service des trains. On y reviendra…
Politique des transports
Europe – La Commission européenne propose un nouveau partenariat pour améliorer la compétitivité du rail – Le 23 février 2021, la Commission européenne (CE) a proposé de créer 10 nouveaux partenariats européens entre l’Union européenne (UE), les États membres et / ou l’industrie. L’objectif est d’accélérer la transition vers une Europe verte, climatiquement neutre et numérique, et de rendre l’industrie européenne plus résiliente et compétitive. L’UE fournira près de 10 milliards d’euros de financement que les partenaires associeront à un montant d’investissement au moins équivalent. Cette contribution combinée devrait mobiliser des investissements supplémentaires pour soutenir le transfert modal et créer des impacts positifs à long terme sur l’emploi, l’environnement et la société. Les partenariats européens institutionnalisés proposés visent à améliorer la préparation et la réponse de l’UE aux maladies infectieuses, à développer des avions efficaces à faible émission de carbone pour une aviation propre, à soutenir l’utilisation de matières premières biologiques renouvelables dans la production d’énergie, à assurer le leadership européen dans les technologies et infrastructures numériques et à rendre le transport ferroviaire plus compétitif. Dans ce dernier cas, l’un des 10 partenariats s’appelle Europe’s Rail et devrait accélérer le développement et le déploiement de technologies innovantes, notamment numériques et d’automatisation, pour réaliser la transformation radicale du système ferroviaire et réaliser les objectifs du Green Deal européen. On n’a pas encore de précisions sur le modus operandi pour y arriver.
>>> Global Railway Review.com – European Commission proposes new partnership to improve rail’s competitiveness
Infrastructure
Norvège-Suède – Pourparlers concernant la liaison ferroviaire entre Stockholm et Oslo – C’est un dossier peu connu : Oslo-Sthlm 2.55 est un projet comprenant un ensemble de tronçons nouveaux et de réhabilitations de lignes pour faire descendre le trajet Oslo-Stockholm sous les trois heures. La société Oslo-Sthlm 2.55, qui promotionne cette ligne et qui appartient à plusieurs villes et régions suédoises, vise à accélérer l’expansion d’un meilleur trafic ferroviaire entre Oslo et Stockholm et sur les tronçons intermédiaires qui les concerne. Elle a déjà fait une étude sur ce qu’il en coûterait aux États norvégiens et suédois pour financer les nouvelles liaisons ferroviaires nécessaires pour atteindre cet objectif. Reste encore à convaincre les États en question. Selon la société Oslo-Sthlm 2.55, une hausse légère du billet de train actuel, bien que toujours inférieur au tarif aérien, permettrait de financer cette nouvelle liaison ferroviaire. On restera cependant attentif sur ce type de proposition, les coûts de chantier ayant souvent l’habitude de s’envoler, comme on peut le voir un peu partout avec les tunnels autrichiens ou surtout sur la HS2 britannique. Côté norvégien, une étude a été confirmée, ce qui permet d’entrevoir quelques espoirs. « Enfin, la Suède et la Norvège s’asseyent à la même table pour discuter de la manière dont nous pouvons réaliser conjointement une liaison ferroviaire moderne et rapide entre nos deux capitales. Il existe désormais une opportunité unique d’accéder au projet ferroviaire le plus rentable de Scandinavie », explique Jonas Karlsson, PDG d’Oslo-Sthlm 2.55. Affaire à suivre…
>>> Jarnvagsnyheter.se – Dialog öppnas om järnvägsförbindelse mellan Stockholm och Oslo
Trafic régional
Allemagne – La Basse-Saxe commande les trains les plus silencieux d’Allemagne – « La Basse-Saxe n’a jamais commandé autant de nouveaux trains en une seule fois », s’enthousiasme le ministre des Transports du Land, Bernd Althusmann (CDU). C’est le Land lui-même au travers de l’autorité des transports LNVG qui achète 34 rames à deux étages totalisant 154 voitures au constructeur Alstom sur son site de Salzgitter, pour un montant de 760 M € incluant 30 ans de maintenance. Dans le détail, la commande porterait sur 68 voitures-pilotes à deux niveaux et 86 voitures intermédiaires simple étage, pour former en 34 rames de quatre et six voitures. Ces trains devraient être déployés à partir de décembre 2024 pour un trafic prévu de 40.000 passagers par jour sur les lignes RE1 Hanovre – Brême – Oldenburg – Norddeich Mole / Wilhelmshaven, RE8 Hanovre – Brême – Bremerhaven et RE9 Osnabrück – Brême – Bremerhaven. Le futur opérateur n’a pas encore été sélectionné. Cette politique, où ce n’est pas l’opérateur qui amène ses propres trains, rejoint celle pratiquée dans la Ruhr et en Bade-Wurtemberg. « C’est le constructeur qui connaît le mieux les trains », justifie Carmen Schwabl, directrice générale de LNVG. « Il sera responsable des 30 années de durée de vie de la technologie. L’opérateur peut se concentrer sur les passagers et les services ».
>>> Niedersächsisches Ministerium für Wirtschaft, Arbeit und Verkehr – Land kauft 34 neue Züge für den Regionalverkehr in Niedersachsen
Trafic fret
France – Alpha Trains livre 9 locomotives EURO4001 à Captrain France – Alpha Trains, premier loueur de matériel roulant en Europe travaillant dans 15 pays, vient de livrer 9 locomotives Stadler de type EURO4001 à la société française Captrain. Les locomotives EURO4001 ont été fabriquées dans l’usine Stadler d’Albuixech, près de Valence en Espagne. Ce type de locomotive est une évolution de la locomotive à succès EURO4000, dont Alpha Trains possède déjà près de 30 exemplaires et qui se sont avérées très fiables auprès de plusieurs opérateurs locataires en Espagne et au Portugal. Ces locomotives sont purement thermiques, à l’inverse des EuroDual. Le moteur diesel de 2800 kW satisfait aux émissions d’échappement les plus strictes (CE 26/2004 norme Euro IIIB). Il permet des missions allant bien au-delà des « last miles » puisqu’il s’agit ici de parcourir d’éventuelles longues distances sur lignes non-électrifiées, ce qui est le cas sur une bonne partie du réseau français. Particularités : les EURO4001 de Captrain France sont équipées d’ETCS niv2, du KVB et… de la TBL1 + permettant l’exploitation des trains entre la France et la Belgique. Rappelons qu’en début d’année, le Groupe SNCF a restructuré ses opérations de fret en France et renommé sa filiale VFLI en Captrain France. La livrée corporative rouge de VFLI sur sa propre Euro4001 a été remplacée par la marque CAPTRAIN France vert.
>>> Alpha Train press room – Alpha Trains livre des locomotives EURO4001 à Captrain France
Entreprises
Espagne – Talgo a augmenté son chiffre d’affaires de 21,3% et a obtenu 487 millions d’euros en 2020 – Talgo SA, l’entreprise de construction ferroviaire espagnol des trains du même nom, a enregistré un chiffre d’affaires net de 487,1 millions d’euros en 2020, soit 21,3% de plus que l’année précédente. La croissance du chiffre d’affaires a été tirée par une augmentation de l’activité industrielle, résultat des mesures opérationnelles réussies mises en place pour normaliser le rythme de fabrication. L’EBITDA ajusté plonge en revanche à 34,2 millions d’euros en 2020, contre 75,2 millions d’euros en 2019, conséquence bien-sûr de la situation extraordinaire provoquée par le contexte économique lié à l’impact de Covid-19. L’entreprise dispose d’un carnet de commandes solide de 3,18 milliards d’euros, générant une visibilité du chiffre d’affaires et de l’activité industrielle à long terme sur la période 2020-2024. Fait important, le portefeuille de Talgo à la fin de 2020 était à un niveau record en termes de diversification internationale par nombre de projets, représentant 80% du carnet de commmande, ce qui prouve l’importance du commerce ferroviaire en Europe et dans le monde. Concernant la maintenance, le portefeuille industriel actuel (ventes incluant des contrats de maintenance associés), jouit d’une forte croissance avec une activité qui devrait concerner 3.700 unités d’ici 2023.
>>> Talgo press room – Talgo increased revenue by 21,3% and obtained 487 million euros in 2020
Certification
Belgique – Le certificateur ferroviaire Belgorail se renforce aux Pays-Bas et en Allemagne – L’expertise belge dans la certification ferroviaire vient d’opérer un gros mouvement d’expansion. Belgorail, filiale du français Certifer depuis 2017, annonce en effet l’acquisition de la société hollandaise HHC/DRS. Un deal qui va faire grandir Belgorail, actuellement aux 10 millions d’euros de chiffres d’affaires, de près de 50%. Cette extension des activités aux Pays-Bas ainsi que le renforcement en Allemagne permet également à Certifer de faire son entrée sur le marché scandinave. « L’acquisition de HHC/DRS nous donne non seulement un bon positionnement géographique, mais via cette acquisition nous aurons également une compétence très pointue dans les engins de travaux ferroviaires et des engins de chantier complexes comme des engins rail-routes », explique Jean-Marc Dupas, le patron de Belgorail. Pour l’entreprise belge, il y a là aussi une logique par le fait que l’homologation en Belgique du matériel roulant a des interactions avec les pays limitrophes.
>>> L’Echo – Belgorail en pleine expansion acquiert un concurrent hollandais
Technologie
Suisse/Europe – Transwaggon digitalise l’ensemble de sa flotte de 13.500 wagons – La société de location de wagons Transwaggon, dont le siège est à Zoug, en Suisse, installera des boîtiers Savvy Telematic Systems sur 7.000 wagons supplémentaires au cours des trois prochaines années et achèvera le déploiement de l’ensemble de sa flotte de 13.500 véhicules. Les boîtiers de type Savvy CargoTrac ExR MI permettent de fournir notamment des données de position GPS tout au long de l’itinéraire avec une précision de 2 mètres, permettant à Transwaggon et à ses clients de planifier et de traiter le transport de marchandises plus efficacement. La transmission est associée à un service logiciel. Avec plus d’un millier de lieux tels que les terminaux de chargement et de déchargement ou les gares de triage, le logiciel peut calculer automatiquement la distance jusqu’aux dix prochains lieux afin que les planificateurs puissent avoir une vue d’ensemble de tous leurs transports et de la position exacte de chaque wagon. Pour l’utilisation des wagons couverts en Scandinavie, dont sont friands les industries du papier notamment, ces boîtiers doivent résister à des conditions climatiques difficiles. Les batteries doivent en effet fonctionner à des températures allant jusqu’à -40 degrés Celsius. Les unités Savvy disposent également de capteurs de vibrations intégrés qui peuvent envoyer des alertes aux planificateurs et aux conducteurs de train en cas de dépassement des seuils définis. Cette informatisation légère des wagons a pour avantage de ne pas produire des usines à gaz digitale et de pouvoir obtenir une application à la fois suffisante sur le plan opérationnel et à un prix acceptable.
>>> Savvy press room – Transwaggon digitalisiert 13.500 güterwagen mit savvy® telematik
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