(Ci-dessus : un régional Portsmouth-Southampton Central en gare de Sholing en février 2021- photo Matt Taylor via license flickr)
25/05/2021 – Par Frédéric de Kemmeter – Signalisation ferroviaire
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Dans le cadre de la réforme du secteur ferroviaire, un nouvel organisme du secteur public baptisé Great British Railways sera propriétaire et gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire, passera des contrats avec des entreprises privées pour faire circuler les trains, fixera la plupart des tarifs et des horaires et vendra les billets.
Le fameux livre blanc de Keith William a enfin été rendu public, même si les principaux points étaient déjà connus. Ce livre blanc exprime l’idée de confier le contrôle de l’infrastructure et des services ferroviaires à un nouvel organisme public indépendant, les franchises étant remplacées par des contrats qui inciteront les entreprises privées à la ponctualité et à l’efficacité plutôt qu’à l’augmentation des recettes. Remplir les trains n’est plus une priorité et il n’y a donc plus de risques à prendre sur les recettes. L’ADN de ce document remonte à l’examen suscité par la situation difficile lors de l’instauration de l’horaire 2018, qui fut un chaos généralisé. Beaucoup de choses ont changé depuis, et l’ampleur de la réédition a été officiellement reconnue notamment par le changement de nom, qui est passée de « Williams Review » à « Williams-Shapps Plan for Rail ».
Great British Railways (GBR), le nouveau nom de l’entité ferroviaire, gérera et planifiera le réseau, tout en fournissant des billets en ligne, des informations et des compensations aux passagers dans tout le pays. Elle rationalisera et simplifiera les tarifs, notamment en étendant les billets sans contact et de paiement à la carte à davantage de régions du pays, ce qui n’est pas le cas actuellement. Un nouvel abonnement national flexible sera mis en place à partir de la fin juin pour tenter de faire revenir les navetteurs à temps partiel, alors que le nombre de voyageurs n’atteint plus que 39 % du niveau d’avant la pandémie.

On restera cependant réaliste : le Trésor sera très regardant sur les économies significatives qui pourront être réalisées grâce à la mise en œuvre du plan William-Shapps.
Keith Williams explique que « le plan est construit autour du voyageur, avec de nouveaux contrats qui donnent la priorité à d’excellentes performances et à de meilleurs services, des tarifs plus avantageux, et la création d’un leadership clair et d’une réelle responsabilité lorsque les choses vont mal. »
La réforme du modèle de franchisage ferroviaire a toujours été un élément central de l’étude, puisque bien avant la pandémie, le modèle de franchisage ferroviaire était déjà en difficulté, avec un petit nombre de soumissionnaires participant aux appels d’offre et des rapports faisant état de graves difficultés financières pour diverses franchises.
Depuis la pandémie, tous les opérateurs ont bénéficié d’accords sur les mesures d’urgence (EMA), qui ont ensuite été remplacés par des accords sur les mesures de redressement d’urgence (ERMA). Les EMA et ERMA seront désormais remplacés par des contrats directs provisoires (National Rail Contracts, ou NRC), à l’exception de trois franchises. À l’avenir, les services ferroviaires respectifs feront l’objet d’un appel d’offres et seront remplacés par des accords de concession appelés « contrats de service passagers » (PSC). Il n’y a donc pas de retour à l’ancien British Rail dont rêvaient certains jeunes militants, sans vraiment savoir de quoi il s’agissait.

Les 40 000 travailleurs de Network Rail ne deviendront pas fonctionnaires, même si GBR absorbera l’actuel gestionnaire d’infrastructure pour assurer « un leadership unique, unifié et responsable« , en utilisant « une marque unique et familière« . Les réformes prévoient que le gouvernement définisse l’orientation stratégique globale du secteur, y compris les investissements dans les infrastructures et la politique tarifaire, par le biais d’un plan sur 30 ans destiné à garantir que les fonds sont ciblés et utilisés efficacement. Le Trésor veillera donc de toute manière à la bonne utilisation des fonds publics, un sujet que les opposants à la réforme préfèrent ne pas aborder. Le chemin de fer ne sera pas un puit sans fond, climat ou pas.
Andy Bagnall, directeur général du Rail Delivery Group, a déclaré que les opérateurs ferroviaires avaient réclamé un grand nombre des réformes promises : « Il sera crucial de régler les détails pour que le livre blanc réalise son potentiel d’amélioration, offre une supervision indépendante et une responsabilité claire, et crée une nouvelle série de tarifs plus simples et plus rentables. »
En bref, la Grande-Bretagne met fin à son expérience des franchises et de risques sur les revenus – un principe unique au monde -, et emprunte la voie explorée avec plus de succès en Europe, à savoir les contrats de service public. Le secteur du fret ferroviaire britannique, en revanche, n’est pas concerné car la libéralisation s’y est bien mieux déroulée, même s’il doit faire face à ses propres problèmes. Il n’y a d’ailleurs pas de débats concernant ce secteur.

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