Les Nightjets autrichiens sont clairement une réussite et incitent à l’investissement massif. C’est un véritable pied de nez qui est offert à toutes les compagnies qui ont procédé au démantèlement du réseau de train de nuit en Europe, mis à part les finlandais, les russes et… les anglais (sur Londres-Écosse).
Une réussite incontestable
Nightjet couvre maintenant une bonne partie de l’Europe rhénane et alpine, en poussant ses trains jusqu’à Rome et en Croatie. À ce jour, rien sur Amsterdam, Bruxelles, Paris ou l’Espagne (Barcelone). Mais il ne faut jamais dire jamais… C’est la société Newrest Wagon-Lits qui s’occupe du service à bord et de la restauration et qui est donc un partenaire important des ÖBB pour la gestion à bord des trains de nuit. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : fin avril 2017, plus de 800 000 personnes avaient utilisé le nouveau Nightjet – dont votre serviteur -, soit sur les six premiers mois seulement d’exploitation. La liaison Hambourg-Berlin-Zürich affichait complet au cours des vacances de Nöel. Le bilan d’avril 2017 montrait aussi que les trains de nuit vers l’Italie et la Croatie étaient déjà fort bien réservés pour l’été et qu’il s’agissait d’être rapide pour espérer obtenir encore les places restantes. Le marketing et l’offre des ÖBB en Europe sont donc clairement couronnés de succès, même s’il a fallu une certaine « adaptation » du personnel de bord allemand pour passer chez Newrest. Selon Valérie Hackl, directrice voyageurs des ÖBB : « Les plans internes des ÖBB ont été remplis voire dépasser (…) Nous sommes très heureux du développement. » Le groupe cible client est diversifié et va des familles avec de jeunes enfants aux voyageurs d’affaires et aux touristes individuels pour qui un billet aller-retour serait trop rigide. L’entreprise répond aux modes de voyage actuels.

D’ici à 2020, les ÖBB souhaitent atteindre les 5 millions de voyageurs annuels avec une offre étendue de Nightjets. Avec les effets de synergie réalisables, les ÖBB ont l’intention d’améliorer leur EBIT au cours de l’année d’introduction en 2017. Après les étude de concepts, place aux investissements réels. Et massifs. Les ÖBB ont lancé au printemps un appel d’offre pour près de…. 400 millions d’euros de matériel roulant, mais en incluant aussi des Railjets, les intercity de jour. Dans le détail, les ÖBB veulent acquérir 21 rames AVEC locomotive – ce qui est nouveau –, soit un total de 160 voitures pour 10 rames Railjet de jour et 13 rames de nuit. L’appel d’offres comprend des voitures avec cabines de conduite et des voitures multifonctions à plancher surbaissé, pouvant circuler jusqu’à 200 km/h en Autriche, en Allemagne, en Suisse et en Italie. Rappelons que les actuels Railjet de jour sont exploités avec des rames 100% Siemens, tant en locomotive qu’en voitures voyageurs. Les Nightjets actuels, eux, sont encore formés par un matériel roulant « panaché », mais doté d’un visuel unifié. C’est là que ça va changer dans les années qui viennent. Les offres pour les nouveaux trains devaient être remises pour cet automne, après une friction juridique entre Siemens et Bombardier, finalement réglée. Le gagnant devrait être annoncé, sauf surprise, pour la fin de cette année 2017.
Réglementation drastique en Italie
Des changements sont aussi d’application en Italie, principalement pour la circulation en tunnel. Les italiens ont en effet amené à la hausse les critères de sécurité en cas d’incendie à bord d’un train dans un tunnel ferroviaire. Un décret ministériel en vigueur depuis 2005 indique en effet que tous les véhicules devront être adaptés aux normes ferroviaires italiennes en avril 2021. Toutes les voitures voyageurs qui traversent des tunnels de plus d’un kilomètre de long doivent être équipés d’un système d’extinction au feu par sprinklage adapté (1). Cela a motivé l’achat de nouveaux véhicules plutôt que la transformation des existants. Et comme de toute manière les ÖBB devaient renouveler leurs Nightjets, tout mis l’un dans l’autre, cela a motivé l’investissement des 21 nouvelles rames dont les 10 Railjets spécifiquement appelés à être exploité entre l’Autriche et la Péninsule.
Quel design ?
Les quelques critiques émises çà et là concernaient l’état du matériel roulant de certains Nightjets. Si toutes les voitures-lit sont des WLABme relativement modernes, votre serviteur a pu constater sur Rome-Salzbourg qu’à l’intérieur, un rafraîchissement s’imposait dans certaines cabines. Petite grille de ventilation cassée, armoire technique de la douche qui ne fermait pas, des détails à droite à gauche qui montrent une certaine fatigue du matériel. Les voitures à places assises sont certes les excellentes Bpmz qui ont fait la gloire du matériel grande ligne des ÖBB, mais elles accusent elles aussi leur âge. Message de toute manière entendu par les ÖBB qui, durant le lancement des Nightjets fin 2016, tablaient en parallèle sur une nouvelle mouture de leurs rames, en présentant une maquette grandeur nature au siège de la compagnie en février 2016, et qui a reçu les remarques et suggestions de près de 600 « testeurs ». Associées à l’agence de design britannique PriestmannGoode, les résultats sont à l’avenant : des aménagements « révolutionnaires » et en phase avec les modes sociétales actuelles.
On commencera par ces petites cabines individuelles superposées, destinées à servir un public de plus en plus individuel, et qui recherche l’intimité à prix raisonnable. On songe notamment à la clientèle féminine, pas toujours adepte du compartiment collectif et de l’entassement à six dans un espace exigus. Il en a résulté un design déjà présenté par nos soins, et repris ci-dessous (2) :

La bonne vieille cabine T3 – au temps des voitures-lits CIWLT et TEN -, est métamorphosée avec une audacieuse disposition des lits en perpendiculaire. L’antique échelle devient un escalier vertical fixe promettant quelques acrobaties, et des espaces permettent de ranger tablettes, smartphones et… lecture papier à proximité. Inutile d’évoquer les prises pour recharger, c’est devenu la norme… Chaque lit semble disposer de sa propre fenêtre, ce qui implique une disposition inédite de la caisse des futures voitures-lit. Evocation ci-dessous d’une cabine à deux lits (l’ancien T2 ou « Double » avec billet de première), avec sa petite cabine douche à gauche de l’image (2) :

Concernant les 10 rames Railjets, le design là aussi a été revu, mais on reste invariablement avec le concept de sièges en 2 + 2, avec cependant une tendance vers les sièges individuels. L’agence britannique montre ce que pourraient être les nouveaux Railjet de demain (2) :

On attend avec impatience de savoir qui l’emportera pour cette commande, d’autant qu’il y a le volet « locomotive associée ». Or l’actualité récente montre une implantation affirmée de la Vectron de Siemens en Italie, Autriche, Allemagne et en Tchéquie, soit une bonne partie de l’espace occupé par le réseau Nightjet. Les ÖBB ne devront dès lors plus utiliser des Taurus hongroises du secteur cargo, comme a pu le constater votre serviteur entre Munich et Düsseldorf. Vivement 2020/2021…
(1) Les passionnés de sécurité ferroviaire et d’affaires juridiques trouveront les détails dans ce document, pages 4 & 5 (en italien)
(2) D’autres images 3D grand format sont disponibles sur le site de Priestmangoode
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