SNCB

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Origine : opérateur ferroviaire belge.
Filiale / Division : entreprise publique 98,14% État belge
Branche : Transport voyageurs
Segment : trafic voyageurs régional et international grande ligne
Transport international :
oui
Commercialisation : trafic régional sous attribution directe et partenariat en trafic international
Premiers services : 1926

Type de train : rames tractées et automotrices
Gestion des gares: oui – 554 gares et arrêts
Trafic : 253 millions de voyageurs nationaux + 3,14 millions de voyageurs internationaux en 2019

À l’origine
La loi du 23 juillet 1926 est celle qui proclama l’acte de naissance de la Société Nationale des Chemins de Fer Belges (SNCFB), en néerlandais Nationale Maatschappij der Belgische Spoorwegen (NMBS). Le monogramme de la SNCB, représentant un B dans un ovale est l’œuvre d’Henry Van de Velde et apparaît en 1930. Le gouvernement octroya à la nouvelle société le droit d’exploiter un réseau de chemin de fer de 4.783 kms et 1.368 gares, pour 75 ans, à renouveler. Ce renouvellement a eu lieu en 2001.

La SNCB a excercé en monopole, durant une longue période, ses missions sur l’ensemble du secteur ferroviaire au complet, à savoir :

  • le transport de voyageurs;
  • le transport de marchandises
  • la gestion du réseau ferré (mais pas sa construction)

Ce monopole laissait néanmoins une certaine liberté à la SNCB d’organiser ses services, de moderniser ses installations (électrification), mais aussi de fermer certaines gares ou lignes. L’organisation du trafic international était alors sectorielle, sous l’égide des normes de l’UIC, avec une conception assez libre de la création – ou suppression -, des liaisons internationales. La SNCB aborda les années 80 avec un endettement très important, ce qui provoqua des réformes dans le cadre de politiques cherchant en priorité la maîtrise des finances publics.

Trois grandes dates de réformes
En mars 1991, la SNCB devenait une SA de droit public. Cette étape marqua une reprise en main du secteur ferroviaire par l’État, sous forme d’un contrat de gestion octroyant des subventions fixées à l’avance et définissant les missions de la SNCB.

Dans l’intervalle, sous l’impulsion grandissante du droit européen, un régulateur indépendant (Regul.Be) et un organisme de sécurité (SSICF) étaient institués au début des années 2000.

En janvier 2005, le rail belge était divisé en trois entités distinctes comprenant un holding nommé « B-Holding » chapeautant SNCB et Infrabel, nouveau nom donné au gestionnaire d’Infrastructure. Cette structure à trois n’ayant pas donné de résultats satisfaisants, il fut décidé en 2012 de ramener le secteur ferroviaire belge à deux entités.

Depuis le 1er janvier 2014, la structure du rail belge – toujours actuelle -, se compose donc de deux entreprises indépendantes :

  • Infrabel, SA de droit public qui agit en tant que gestionnaire du réseau ferré belge;
  • SNCB, SA de droit public qui agit en tant qu’opérateur de transport de voyageurs et (agissait) en tant que transporteur de marchandises
Organigramme-SNCB
(Extrait de cette page)

Pour garantir une unicité du statut des cheminots demandé par les représentants des travailleurs, on établissa la création de HR Rail, qui est un établissement public d’Etat qui agit en tant qu’employeur unique du personnel statutaire et non statutaire des Chemins de fer belges. Le personnel est recruté en vertu du statut du personnel mais HR Rail peut recruter et employer du personnel contractuel. Le service social de HR Rail présente la particularité d’être à la fois un service social d’entreprise et de mutualité. HR Rail gère la concertation sociale pour ces entreprises et développe un service moderne au niveau du recrutement et de la sélection, de la mobilité interne, du pay roll et des avantages sociaux. 

HR Rail emploie 700 personnes aux profils très variés pour gérer l’ensemble du personnel de la SNCB et d’Infrabel. Le personnel de filiales comme TUC RAIL ne dépend en revanche pas de HR Rail et est recruté et géré directement par lesdites filiales.

La SNCB aujourd’hui
La SNCB est sous la tutelle du SPF Mobilité. Sa mission essentielle concerne :

  • le transport intérieur de voyageurs assuré par les trains du service ordinaire, en ce compris l’accueil et l’information de sa clientèle, ainsi que les dessertes intérieures par trains à grande vitesse ;
  • le transport transfrontalier de voyageurs, c’est-à-dire le transport assuré par les trains du service ordinaire pour la partie du trajet national non couverte au titre du 1° et jusqu’aux gares situées sur les réseaux voisins définies dans le contrat de gestion ;
  • l’acquisition, la maintenance, la gestion et le financement de matériel roulant ferroviaire destiné à l’accomplissement des missions visées aux 1° et 2° ;
  • les prestations que l’entreprise ferroviaire est tenue de fournir pour les besoins de la Nation ;
  • l’acquisition, la conception, la construction, le renouvellement, l’entretien et la gestion des gares ferroviaires, des points d’arrêt non gardés et de leurs dépendances ;
  • la conservation du patrimoine historique relatif à l’exploitation ferroviaire ;
  • les activités de sécurité dans les gares, dans les points d’arrêt non gardés, dans les trains, sur les voies, en ce compris les faisceaux voyageurs et marchandises, dans les autres espaces du domaine ferroviaire accessibles au public et dans tous les espaces gérés par la SNCB ;
  • les activités de gardiennage des installations dont elle est propriétaire ou desquelles elle assure la gestion;
  • les autres missions de service public dont elle est chargée par ou en vertu de la loi.

Côté division marchandises, l’arrivée de la société Argos Soditic, avec mission de redresser B-Logistics (ex B-Cargo) lourdement endetté, a fini par faire sortir le secteur fret de la SNCB, pour devenir Lineas en avril 2017. Jusqu’en décembre 2020, la SNCB en détenait encore des participations avant de revendre l’ensemble à la SFPI. Depuis janvier 2021, la totalité du fret ferroviaire belge est entièrement privatisé, non seulement via Lineas, mais avec aussi 8 autres acteurs actifs en Belgique.

Les moyens humains
Environ 300 métiers sont disponibles à la SNCB. Au 1er janvier 2020, la SNCB comptait 17.539 collaborateurs (équivalents temps plein), par rapport à 17.703 début 2019. Près de 4.000 personnes sont en contact direct avec les clients. Près de 3000 conducteurs et 2500 accompagnateurs sont directement rattachés au service des trains.

Matériel roulant
La SNCB opte toujours pour une combinaison de rames tractées et d’automotrices. La tendance actuelle est de n’acquérir pour les Intercity que des rames double étages. Le parc en service au 31 décembre 2021 se réparatissait comme suit :

  • Environ 236 locomotives électriques;
  • 1397 voitures pour rames tractées;
  • 737 automotrices électriques de 2, 3 ou 4 caisses;
  • 94 autorails diesel AR41 (à 2 caisses).

Ces chiffres sont indicatifs car ils évoluent d’année en année au fur et à mesure des mises en parc et des radiations, voire parfois des restitutions de TRAXX chez leur propriétaire.

Depuis quelques années, le trafic omnibus est essentiellement exploité par rames automotrices Desiro Siemens, ainsi que des automotrices datant des années 86. Les voitures aptes au trafic international, principalement des I6, I10 et I11, ont une utilisation en trafic intérieur. On trouvera à cette page un inventaire plus complet des voitures encore en service en 2021.

Au 31 décembre 2020, 62,8% de la flotte de la SNCB était équipée du système ETCS.

Exploitation des trains et service à la clientèle
Si on s’en tient aux chiffres de 2019, seuls représentatifs car précédant la crise du Covid, la SNCB gère quotidiennement près de 3.600 trains pour transporter un peu plus de plus de 900.000 voyageurs par jour. Annuellement, ce sont près de 253 millions de voyages qui sont comptabilisés au niveau national, et 3,14 millions de voyageurs internationaux. Le transit international concernerait près de 17 millions de voyageurs. Environ 35 % des trains du service intérieur desservent la Région de Bruxelles-Capitale, qui constitue les points de départ et d’arrivée de près de 50 % des voyageurs nationaux. Cette centralité de Bruxelles est une des particularités du pays. Elle est due à la présence d’un important secteur tertiaire qu’on ne trouve pas avec une telle intensité dans d’autres villes régionales.

Actuellement, la SNCB gère 554 gares et points d’arrêt non gérés. Le top 3 des gares les plus fréquentées étaient , dans l’ordre pour 2019 : Bruxelles-Nord (62.400), Bruxelles (60.900) et Bruxelles-Midi (58.000). En 2020, la vente de titres de transport via les canaux digitaux, y compris les automates installés dans chaque gare, a représenté plus de 75 % des ventes. Les transactions aux guichets sont en recul constant et ne représentaient que 20 % des ventes en 2020. Les guichets sont maintenus dans 91 gares.

Les moyens financiers et les revenus
La SNCB est très dépendante des dotations de l’État. Depuis 1991, des contrats de gestion précisent pour une période définie la manière dont la SNCB accomplit les missions de service public qui lui sont assignées. Ils définissent, entre autres, le montant des subsides alloués par l’Etat belge pour pouvoir garantir l’exécution de ces missions de service public.

Le dernier contrat de gestion en date, auquel différents avenants ont déjà été ajoutés, a été conclu pour la période 2008-2012. Un nouveau contrat de gestion, pour une période de six ans, est attendu pour 2022 ou 2023.

Les lois du 21 mars 1991 et du 15 juin 2015 imposent à la SNCB d’établir un système distinct de comptes pour les activités ayant trait à ses tâches de service public, d’une part, et pour ses autres activités, d’autre part. L’annexe des comptes annuels de la SNCB doit contenir un bilan, un compte de résultats et un flux de trésorerie séparé pour ces activités.

En 2019, la SNCB a reçu dans les faits une subvention de l’État pour un montant total de 1,952 milliard €,  dont 1,28 milliards en subvention d’exploitation :

SNCB-NMBS
Extrait du rapport annuel global des obligations de service public en exécution de l’article 7 du règlement 1370/2007

Pour approfondir :

SNCBLa SNCB de 1926 à aujourd’hui (7 pages complètes)
La SNCB, ses origines, le déclin des années 70-80, l’arrivée du ‘new public management’ et de la ‘corporate gouvernance’, la tentative holding puis la mise en place d’une structure à deux entités, c’est tout ce processus qui est expliqué tout au long de ces 7 pages…


SNCBTous les ministres de tutelle et les CEO depuis 1980
Le tableau ci-contre résume les différents ministres qui se sont succédés à partir de 1980, ainsi que le parti auquel/à laquelle il/elle appartenait, et le nom du gouvernement. A droite, sont résumés les différents CEO au fil de l’histoire de l’entreprise ferroviaire. On constate qu’il y a nettement moins de CEO qu’il n’y eut de ministre….


Actualités :

SNCB_siege_2Le nouveau siège social de la SNCB sera réalisé pour 2024
22/02/2020 – Il était temps ! L’actuel siège social de la SNCB, le 85 rue de France, va laisser place à un audacieux projet qui sera construit de l’autre côté de la gare du Midi, contre l’avenue Fonsny. Le projet emprunte des volumes existants.xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx xxxxx xxxxxxxxxx xxxxxxxxxx xxxxxxxxxxx xxxxxx xxxxxxxxxxxxxxx xxxxxxxxxxxxx xxxxxxxxxxx xxxxxxxxxxxxxxxxx xxxxxxxxxxxxx


Plan d’action pour la SNCB
28/10/2017 – Sophie Dutordoir, CEO de la SNCB depuis mars 2017, avait présenté son plan d’action pour la société publique belge, devant la Commission Infrastructure de la Chambre à la mi-octobre. Elle avait présenté ses cinq priorités….xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx xxxxx xxxxxxxxxx xxxxxxxxxx xxxxxxxxxxx xxxxxx xxxxxxxxxxxxxxx xxxxxxxxxxxxx


B-Logistics et OSR deviennent Lineas
27/04/2017 – L’ancienne division marchandises de la SNCB, B-Logistics, change de nom ainsi que sa filiale OSR. Le groupe fret s’appelle désormais Lineas. Esquisse d’une mutationxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx xxxxx xxxxxxxxxx xxxxxxxxxx xxxxxxxxxxx xxxxxx xxxxxxxxxxxxxxx xxxxxxxxxxxxx xxxxxxxxxxx xxxxxxxxxxxxxxxxx xxxxxxxxxxxxx


Par Frédéric de Kemmeter – Signalisation ferroviaire et rédacteur freelance
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Décarboner les transports : tout ne dépend pas du rail

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27/09/2021 –
(English version)
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Le chemin de fer ne fera jamais de transfert modal seul, par le fait de sa simple existence. Il faut d’autres atouts qui sont du ressort de l’État.

Patrick travaille à 37km de son domicile, et son bureau ne se situe pas vraiment en ville mais légèrement en périphérie, dans une zone dédiée aux activités tertiaires. Patrick vit à 7km d’une gare bien desservie. Il doit néanmoins déposer chaque matin Lucie et Arthur à l’école primaire, située à l’opposé, à 3km du domicile. Patrick devrait donc, si on suit les grands principes de décarbonation, se taper :

  • un premier bus pour accompagner ses jeunes enfants à l’école;
  • un second bus (20 minutes d’attente) pour aller de l’école à la gare;
  • un train;
  • un dernier bus qui l’emmène de la gare en centre-ville vers la périphérie, à 400m de son bureau.

Un tel périple chaque matin en transport public, qui prendrait des heures, est-il décemment vivable ? Bien-sûr, vous me direz que Patrick peut déléguer la tâche de l’école à sa compagne ou épouse. Pas de chance, elle est infirmière de nuit et dort plusieurs matins par semaine. On rétorquera que le couple n’avait qu’à se rapprocher de la ville – voire carrément vivre en ville – pour avoir des lieux de vie plus rapprochés. Pas de chance l’hôpital de l’infirmière est à l’opposé du lieu de travail de Patrick. On peut enfin dire que Patrick peut utiliser le vélo pour éviter les horaires des bus. Ah, et les enfants ? Du vélo à 7h le matin sous la pluie d’hiver ? Patrick a finalement, comme sa compagne, opter pour la voiture de bout en bout, malgré les embouteillages et le mauvais sort que cela réserve à la planète.

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Les parcs de bureaux éloignés des villes encouragent l’utilisation de la voiture

Cet exemple est celui de dizaines de millions d’européens. Il est bien clair que chaque citoyen qui choisit son style de vie doit en assumer les conséquences, positives ou négatives. Habiter au vert suppose de s’armer d’un véhicule, et c’est exactement ce que font ces millions de non-urbains plus ou moins ruraux. Travailler en périphérie ou pire, tout à fait en dehors d’une ville suppose aussi de s’armer d’une voiture, ou une moto si on n’a pas les enfants. Combien jadis de grandes usines étaient implantées bien loin du centre-ville ?

Le train est devenu un transport adapté à un public limité, sauf dans les très grandes villes comme Paris ou Londres, entourés d’espaces surpeuplés et pollués, où le train RER reste encore dominant. Ailleurs, le train n’a pu suivre les habitudes des citoyens. Voilà pourquoi il a dégringolé à 10% de part de marché. « Jadis, mes grands-parents prenaient la demi-journée complète pour faire deux courses à 10km de leur vieille maison ». Époque révolue, qui veut encore vivre de la sorte aujourd’hui ?

Le rail a déserté la vie tranquille de nos grands-parents. La faute au passé, quand des dizaines de lignes furent fermées dans les années 50 et 60. Oui, mais peut-on croire qu’avec les subsides actuels, une compagnie ferroviaire serait capable à elle seule de maintenir un service ferroviaire décent sur un réseau jadis au double de sa longueur ? Songeons à certaines lignes locales où il y a 4 trains par jour et des restrictions de vitesse à 60 voire 40 km/h dès qu’on passe un pont en ruine. Qui veut encore aujourd’hui être tributaire d’un tel service, juste pour sauver la planète ?

Mais le train est-il vraiment le fautif ?  L’histoire démontre que non. Les États d’Europe, qui avaient tous nationalisés leur chemin de fer, on en réalité laisser faire ces entreprises en leur procurant un kit de survie financière. Ces mêmes États, régions et communes sont aussi coupables d’avoir fait en sorte que les gens habitent le plus loin possible d’une gare, « parce que le train, c’est bruyant et sale » et puis, « les trains, c’est pour les autres, hein, pas pour des gens en cravate ». Discours d’hier, qu’on entend encore de nos jours, avec heureusement de grandes nuances…

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Le rail est bien présent, mais les habitations sont parfois loin de la gare. Suisse (photo pasja1000 via pixabay)

Pourtant, on a déjà pensé depuis longtemps à « rendre la ville aux habitants ». L’idée : ne plus amener de voitures au centre-ville et laisser respirer les petites rues. La solution : construire les emplois et les bureaux en périphérie, de même que les hôpitaux, les nouvelles annexes d’universités et, finalement, les commerces. En réalité, ce n’est pas aux habitants que l’on songeait mais à l’expansion impossible des universités, commerces et hôpitaux en centre-ville, en plein tissu urbain contraint. Tout est donc parti en périphérie, le long des voies routières rapides, et c’est ce qui a amené Patrick et sa compagne à opter pour l’auto pour rejoindre leur lieu de travail respectif et pouvoir disposer de toutes ces « facilités » en un temps de transport décent. Un exemple de cette politique est la ville belge de Mons. Combien y-a-t-il de Mons en Europe ? Des centaines…

Que retenir de tout cela ? Que si on veut que Patrick et sa compagne optent moins pour la voiture, il aurait fallu au minimum construire leur logement, l’école mais aussi leur lieu de travail, non loin d’une gare, plutôt que d’opter pour une politique foncière désordonnée « qui vivifie la construction », pourtant premier émetteur de CO2. Que plutôt que de faire porter tout le poids du transport ferré sur une seule compagnie, il serait préférable d’élargir l’offre à des compagnies locales disposant de leur côté d’autres moyens financiers, à l’image des entreprises suisses secondaires.

Au-delà du périmètre ferroviaire, afin de laisser respirer la ville, il faut cesser cette croyance du centre-ville desservis par sa gare unique. Est-ce écologique d’entasser tant de monde sur une aire si restreinte ? Habiter la ville n’est pas une solution universelle et ne s‘applique pas à l’ensemble de la population. Toutes les villes doivent-elles ressembler à Sao Paulo ou Calcutta ?

Il est temps aussi d’ôter des études ces stupides comparaisons de l’OCDE qui assènent que « tout le monde habite la ville ». Cette assertion englobe le tiers-monde, où des millions de pauvres s’agglutinent autour de villes monstrueuses comme Lagos ou Le Caire. Rien de tel sur une large partie de l’Europe où dominent des petites villes de 10 à 30.000 habitants, bien plus vivables, sans compter les nombreuses communes « aérées » de 5 à 10.000 habitants. Un paysage qui domine de Manchester à Bologne. Tout dépend évidemment de la définition de « ville ». Le même graphique de l’OCDE montre une Europe avec environ 30 à 40% d’urbains, considérés comme tels. Il faudra donc tenir compte des 60% de « Patrick » dans les études de transfert modal.

Si on veut qu’il y ait un transfert modal digne de ce nom, un maximum de lieux de vie doit être disponible dans un rayon raisonnable de chaque village ou quartier. La tâche de l’État est de formaliser les zones à bâtir, par exemple proche d’une gare, et celles qui ne le seront jamais. Cela pose la question de l’accès aux logements neufs, à la rénovation du bâti existant. C’est une politique inclusive qui aidera le chemin de fer à (re)devenir un transport de référence. On reste cependant conscient qu’on n’ira jamais à son tennis du soir ou au resto en train, ni même en bus. La mobilité, ce sont des transports multiples pour des activités multiples…

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Les fameuses petites lignes en France (photo wikipedia)

Par Frédéric de Kemmeter – Signalisation ferroviaire et rédacteur freelance
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Pour approfondir

0001Et si on ramenait les gens plus proches des gares ?
15/04/2020 – Rapprocher nos maisons des gares nous aidera à atteindre une partie de nos objectifs climatiques. Explicationsxxxxxxxxxxxxxxx xxxx xxxxxxxxxxxx xxxxxxxxxxx


ERA_Europe_RailwaysLes villages belges tous reliés chaque demi-heure ?
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Waldbahn_regioÉcologie et train à tout prix ? La Bavière questionne…
04/09/2020 – Parfois, il y a des petites lignes où « l’hameçon n’a pas mordu » malgré avoir tout mis en oeuvre pour la réussite. Ca ne remet pas en cause la politique de régionalisation. Cet exemple peut nous permettre de nous interroger sur la valeur des choses et les buts recherchés.


Qu’avez-vous fait du chemin de fer ces dernières décennies ?

06/04/2021 – Par Frédéric de Kemmeter – Signalisation ferroviaire
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(English version)

Le 29 mars, Pedro Nuno Santos, ministre portugais des infrastructures et du logement, et Adina Vălean, commissaire européenne chargée des transports, ont officiellement donné le coup d’envoi de l’Année européenne du rail. « Le transfert modal vers le rail est la clé pour transformer le secteur des transports et réduire l’impact sur l’environnement », a déclaré Pedro Nuno Santos. Loin de vouloir faire du glamour ferroviaire, le ministre a néanmoins insisté sur le fait qu’il y a eu, durant les trente dernières années, « une stagnation de la croissance des transports ferroviaires de marchandises et une croissance résiduelle des transports voyageurs. Il nous faut comprendre les raisons de cette faille. Il est très clair pour nous que le manque d’investissement est l’une des raisons principales de cet échec ». Le ministre portugais, qui est socialiste, sembla mettre en doute la politique suivie jusqu’ici par l’Union européenne : « indépendamment de l’opinion et de la position idéologique de chacun, c’est un fait incontestable que la libéralisation n’a pas réussi pour l’instant à augmenter la part modale du chemin de fer ». Il a notamment voulu rappeler « que le marché ne répondait pas à tout » et que « les opérateurs publics dits ‘inefficaces’ avaient permis jadis le Trans Europ Express et le train à grande vitesse. » Une entorse à l’histoire puisque le concept de Trans-Europ-Express, des trains de première classe avec supplément, ont été arrêtés en mai 1987 par les entreprises ferroviaires publiques… à une époque où il n’y avait aucune libéralisation ! Qu’a fait la puissance publique pour éviter cela ? Le Portugal n’a par ailleurs jamais adhéré au groupement TEE et l’Espagne s’est contentée du Catalan-Talgo. C’était plutôt maigre, comme bilan…

Pour notre part, si on peut adhérer à certains constats du ministre, nous préférerons moins de com’ et des analyses nettement plus pertinentes. Les parts de marché restent désespéramment faibles ? Nous savons très bien pourquoi. Mais pour cela, il faut oser gratter le sol plutôt que de se contenter de tondre la pelouse…

Une histoire nationale
C’est toujours intéressant d’entendre les grands discours de l’Europe sans frontières, et on voit qu’il est encore nécessaire de rappeler comment fonctionnaient nos chemins de fer à l’époque où c’était des administrations d’État. L’histoire du chemin de fer est avant tout un roman social et national. Chaque pays a construit sa propre administration ferroviaire, ce qui signifie que le personnel ne travaillait et ne concevait le chemin de fer que sur un strict périmètre national. Quand on évoquait les autres pays, la réponse était toujours invariable : « eux, c’est eux. Nous, c’est nous ». Il fallait un organisme tel l’UIC pour que deux administrations puissent « officiellement » se parler et coordonner des trains internationaux. On changeait les locomotives aux frontières pour un tas de raisons, mais généralement, chaque pays n’aimait pas faire rouler sur « son » territoire un engin construit par une industrie concurrente. En 1954, quand Den Hollander proposa un matériel unique pour le fameux Trans-Europ-Express, il fut confronté à un refus catégorique des administrations et des ministères, qui craignaient une ingérence. Voilà pourquoi il n’y avait jamais de locomotives Alstom en Allemagne ni d’engins Krupp/Siemens/AEG en France (relevons quelques exceptions comme les locos SNCB de série 15, 16 et 18 ou les rames RAe TEE des CFF, mais ce n’est pas franchement représentatif). Jusqu’aux années 60-70, l’idéologie de l’État était l’unique source d’inspiration des chemins de fer. Le trafic international était un monde à part. L’UIC réussit à standardiser le plus facile, c’est à dire les wagons de marchandises et les voitures à voyageurs. Mais tout le reste relevait de l’orgueil national et de la fierté des corps d’ingénieurs et de l’industrie.

En 1975, une tentative de produire 3.000 voitures internationales climatisées (VSE), construites par plusieurs industriels, se solda par la mise en service d’à peine 500 véhicules ! Deutsche Bahn et SNCF ont préféré opter de leur côté pour une voiture coach produite par leur propre bureau d’étude. Les autrichiens et les italiens ne voulaient pas du « style autocar ». Les allemands voulaient des trains toutes les heures, la France préférait des trains plus rares et plus lourds. Le concept d’Eurocity de 1987, trains standardisés, climatisés avec voiture-restaurant, ne plaisait pas non plus à certains pays qui y voyait un concept trop « allemand ». Plus tard, l’arrivée de la grande vitesse rima immédiatement avec fierté nationale et champion industriel, grandement aidé par la puissance publique. Aujourd’hui, le concept Nightjet des ÖBB est considéré par certains réseaux comme « trop luxueux », tout particulièrement en ce qui concerne les voitures-lits, qui requièrent une exploitation particulière de haut niveau.

Personne n’a vu non plus les grands changements législatifs des années 90. Pour éviter de subsidier n’importe quoi, les gouvernements nationaux s’appuyèrent sur l’Europe pour obliger les chemins de fer à exploiter les trains internationaux sur base contractuelle. Le résultat a été que les opérateurs ont du payer des péages pour rouler sur le réseau voisin et faire en sorte de rentabiliser ces trains. Ce fut la principale raison de la disparition progressive des trains de nuit. Un autre exemple est l’immense réseau à grande vitesse espagnol. Il est parfois si peu utilisé qu’à nouveau, la puissance publique a ordonné de trouver des solutions pour soulager son déficit. La réponse a été… plus de concurrence pour attirer plus d’opérateurs et remplir les caisses du gestionnaire. L’Italie a pu démontrer que cette politique donnait de bons résultats. Mais en Allemagne, on parle toujours du chemin de fer au singulier… En Espagne et au Portugal, les trains de nuit se sont arrêtés définitivement en 2020. Le triste épisode concernant Eurostar ne nous montre pas beaucoup d’optimisme !

Ce rapide tour d’histoire nous permet de poser la question au ministre portugais : « qu’a fait la fameuse puissance publique ces dernières décennies ?  » En réalité, les responsabilités sont partagées par plusieurs parties.

Les vraies raisons
Les failles sont connues, mais on n’en parle peu, par exemple en ce qui concerne les voies. Constatant que l’infrastructure avalait une quantité astronomique d’argent, les chemins de fer ont été forcé de contourner le problème durant des décennies en se concentrant sur les mobiles – les trains -, plutôt que la voie. Mais il y a un moment où on arrive rapidement aux limites de cette politique. Lorsque les réseaux – grâce à la libéralisation -, ont été compris comme un secteur à part entière, quelle ne fut pas la surprise des élus de constater à quel point on l’avait négligée ! En Grande-Bretagne, des contrats de franchise se sont avérés foireux parce que les promesses concernant le réseau n’ont jamais été tenues. L’Allemagne s’est retrouvée à devoir gérer 800 chantiers d’infrastructure en même temps. Et aujourd’hui n’importe quel citoyen, grâce à la loi, peut porter plainte et faire arrêter des chantiers pourtant essentiels à la mobilité ferroviaire. Qui est responsable de cela ? La puissance publique. A force de calquer les investissements sur un horizon électoral et les injonctions du ministère des Finances, on en arrive à produire un chemin de fer négligé. Si le ministre portugais parle de « failles », c’est peut-être ici qu’il faut chercher…

L’histoire l’a bien montré : le rail n’est plus le transport dominant et n’est plus le premier choix des citoyens et des industriels. Pendant que le rail se maintenait avec difficulté, la route et l’aviation ont fortement progressé. Ce sont tous les gouvernements passés qui ont permis – et même encouragé -, cette évolution. On a alors tenté de donner du souffle au système ferroviaire en permettant l’arrivée d’autres opérateurs. A vrai dire, cette libéralisation a surtout été une bénédiction pour les États de se désengager « d’un lourd machin très coûteux » et de mobiliser des ressources financières privées. C’est en grande partie ce qui s’est passé ! L’Europe, on l’a vu lors du dernier RailTech21, n’est pas là pour forcer mais pour encourager à modifier un état de fait. Elle a préféré se reposer sur le savoir-faire industriel plutôt que d’opter pour le forcing politique. Ce fut le cas quand six grands fournisseurs se réunirent au sein d’Unisys dans les années 90, pour produire un nouveau système de signalisation et de gestion du trafic, qui s’appelle aujourd’hui ERTMS/ETCS. Les locomotives universelles TRAXX (Bombardier) et Vectron (Siemens) sont le fruit de plusieurs années de tests pris en charge, non pas par la puissance publique, mais bien par l’opiniâtreté de l’industrie. L’ouverture des frontières permet à ces industries de ne plus être prise en otage par des commandes nationales et de vendre partout en Europe. Cette libéralisation a ainsi permis de voir éclore des idées nouvelles (train à hydrogène ou à batteries) et de maintenir des usines et des emplois.

Bien évidemment, l’industrie bénéficie indirectement de la puissance publique au travers les nombreux programmes de recherches et des universités. C’est là qu’on retrouve le rôle essentiel de l’Etat : montrer un cap et encourager de nouvelles perspectives. C’est par exemple le cas avec la filière hydrogène, qui a encouragé Alstom à développer et tester ses trains en Allemagne. Il existe aussi un tas de d’autres programmes de recherches subsidiés par les états, dont bénéficie en partie le secteur ferroviaire. Songeons notamment au digital ou aux recherches sur de nouveaux matériaux.

Malgré ce renouveau, en effet, la part de marché du rail n’a pas vraiment été en croissance. Pourquoi ? Parce l’auto est devenue une partie incontournable de la vie des citoyens et continuait sa progression inexorable. Même ceux qui prennent le train tous les jours disposent d’une auto pour d’autres activités privées. Les industriels ont construit leurs flux logistiques sur base de la flexibilité des camions, au prix d’une énorme pollution. Le chemin de fer a très peu de marges de manœuvre pour répondre à de tels phénomènes sociétaux. Permettre de construire des entrepôts près des autoroutes n’aide pas le rail. C’est pourtant la puissance publique qui délivre les permis de bâtir…

De même, le ticket unique européen est rendu difficile à cause des grandes différences d’API (Application Programming Interface) utilisées pour construire la tarification digitale. La plupart des opérateurs ont une activité centrée sur le niveau régional et reçoivent des subsides nationaux ainsi que des objectifs gouvernementaux. Ils n’ont donc pas comme mission de développer une app internationale. Chaque opérateur choisit l’API qui convient le mieux, qui lui coûte le moins.  La puissance publique a aussi une responsabilité politique sur le trafic local. La tarification est soumise à de nombreuses exceptions sociales propre à chaque culture d’un pays. Les OV-chipkaart néerlandaises ou l’Oyster Card londonienne n’ont rien d’international : il faut les acquérir sur l’app de l’opérateur, pas vraiment facile à trouver. De plus, la tarification digitale, ce sont avant tout de précieuses datas. Et qui détient les datas détient beaucoup de pouvoir. Dans ce contexte, personne ne veut partager les données et chacun veut devenir un futur GAFA…

Que faut-il faire alors ?
Comme le rail est fortement subsidié par les impôts nationaux, il est clair que le chemin de fer restera un roman national, une « chose politique ». Aucun pays souhaite payer pour le voisin. Les opérateurs devront s’entendre entre eux sur des bases contractuelles et justifier leurs choix internationaux. Ils peuvent aussi se lancer seuls comme l’ont fait les ÖBB avec les Nightjets.

Augmenter les parts de marché n’est pas seulement une question de technologie ni de puissance publique. C’est aussi une question de service. Il est essentiel de convaincre les indécis, ceux qui n’utilisent jamais le train. Il faut par exemple alléger les procédures qui paralysent le rail et rendent le ticket d’entrée si onéreux. Il faut construire une gestion du trafic qui puisse calculer quel train arrivera en premier. Les trains de marchandises sont parfois plus rapides que les trains locaux. Il faut donc leur donner la priorité, sans altérer les objectifs de ponctualité du trafic voyageurs. Augmenter les parts de marché du rail ne passe pas par un conflit idéologique entre plus ou moins d’état, il passe avant tout par un ‘mental shift‘ du secteur et par une stratégie d’investissements qui ne tienne pas compte du calendrier électoral, mais bien des objectifs climatiques pour les 30 prochaines années.  Est-ce que les ministres des transports sont prêt à cela ?

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Paris-Bruxelles : l’histoire d’une interopérabilité


08/01/2021 – Par Frédéric de Kemmeter – Signalisation ferroviaire et rédacteur freelance
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De notre série « Aah, les trains d’hier… »

C’est de technique dont il sera question ici, plus que de service. L’artère internationale Paris-Bruxelles est certainement une des plus anciennes d’Europe. Le réseau belge, créé dès 1835 avec la ligne de Bruxelles à Malines, n’a cessé de progresser avec dynamisme et d’avoir des visées internationalistes. Des lignes la reliant à la France et à l’Allemagne sont inscrites en priorité dès 1840  : l’ingénieur belge Masui est envoyé dans ces deux pays pour prendre contact avec les gouvernements et activer les choses. Construites par tronçons nationaux, les lignes belges et françaises furent connectées le 14 juin 1846, permettant de joindre les deux capitales. Dès septembre, l’itinéraire se fit par Douai, Valenciennes, Quiévrain et Mons. Deux trains quotidiens, dont un de nuit, abattent respectivement les 370 kilomètres en… 12 heures et demi et 14 heures de voyage. Il était déjà possible de rejoindre Cologne, moyennant 12 heures de plus, soit 24 heures de voyage depuis Paris. Ces chiffres peuvent faire sourire mais avant cela, c’était les voitures cochères publiques et… six jours de calvaire !

En février 1852, la Compagnie du Nord accepte de prendre à sa charge une autre ligne menant de St Quentin à la frontière belge, mais via Maubeuge et Erquelinnes. Les locomotives Crampton, les séries 111 pour la Belgique. Cela permit en 1853 de faire tomber le trajet Bruxelles-Quiévrain-Paris à 8 heures, une belle performance de… 46,3km/h mais avec un train express uniquement de première classe. Déjà ! En 1857, est mis en service le tronçon Mons-Quévy-Feignies en prolongement de la ligne de Bruxelles à Mons ouverte par les Chemins de fer de l’État belge en 1840 et 1841, reprise à bail en 1858 par la Compagnie du Nord – Belge. Ce sera la grande artère Paris-Bruxelles par la suite comme le montre la carte ci-dessous (cliquer pour agrandir).

Paris-Bruxelles-1858

(document AFAC Chemin de Fer n°498, 2006)

Le nouvel itinéraire par Quévy permet d’éviter le rebroussement à Valenciennes. En 1896, il y avait déjà douze paires de trains entre les deux capitales, cinq via Valenciennes, très lents, et sept via Quévy, beaucoup plus rapides. Le meilleur « express » avalait alors le parcours en 4h59, soit une moyenne de 62km/h en dépit des 15 minutes d’arrêt à Quévy. L’artère est alors parcourue avec trains de prestige remorqués par des Atlantic Nord puis plus tard des Pacific, avec notamment le « Nord-Express » vers l’Allemagne du Nord, « l’Etoile du Nord » vers Bruxelles ou encore « l’Oiseau Bleu » destiné à Amsterdam. Voilà pour l’histoire.

Premières interopérabilités
Dans les années 1920, des accords d’échange de machines aboutissèrent à l’admission de locomotives belges sur le réseau Nord français. De puissantes Super-Pacifics du Nord, des compound à 4 cylindres et surchauffe de la série 3.1201 à 3.1240, vont couvrir jusqu’à trois allers-retours entre les deux capitales, en 3h45 min pour les trains sans arrêt. Dix ans plus tard, le diesel commença à parsemer le matériel roulant SNCF grande ligne, alors que la vapeur domine encore largement. Construites de 1934 à 1938 par la société franco-belge, les TAR (Train Automoteur Rapide) sont mis en service à partir de juillet 1934 ce qui encore les chemins de fer du Nord, assurant des liaisons express de prestige prioritairement entre Paris et Lille. Dotées d’un profil aérodynamique et d’une décoration sobre, ces rames très moderne à l’époque étoffèrent leurs services au départ de Paris-Nord vers Bruxelles, vers Liège puis Maastricht et Amsterdam.

TAR-36-rail

Une des rames TAR en gare Centrale à Amsterdam, au début des années 50, ce qui explique la présence de la caténaire, très précoce aux Pays-Bas (photo Schaik, W.P.F.M. via wikipedia)

Après la Seconde guerre mondiale, le besoin de voyage en Europe prend de l’ampleur, mais avec cette fois la concurrence, encore timide mais déterminée, de l’aviation. Les trafics sur Paris-Bruxelles-Amsterdam étaient alors clairement à la hausse à une époque où, rappelons-nous, la douane rendait visite à chaque voyageur. Côté opérationnel, certaines machines à vapeur continuèrent de rouler de bout en bout entre Paris et Bruxelles, à peu près jusqu’en 1956. Dans l’intervalle, les allemands alignaient sur le Dortmund-Paris leur autorails VT08, rapidement passé de trois à quatre caisses pour répondre à la demande.

VT08-ParsifalCe à quoi ressemblait ce matériel roulant, vu ici en 2011 (photo DB Museum)

Le trafic transfrontalier, encore marqué par un manque d’électrification, notamment lors du lancement des Trans-Europ-Express en mai 1957, obligeait les réseaux à fournir dans un premier temps des éléments automoteurs, comme les rames RGP de la SNCF ou les rames hollando-suisse RAm, soit 20 ans après les TAR, qui furent d’ailleurs retirés du service dans la foulée. Les VT08 allemandes furent remplacées par les élégantes VT11 de plus grandes capacités.

TEE-RGP-SNCFUne des rames RGP de la SNCF dans sa configuration Trans-Europ-Express, au tout début des années 60, avec l’absence de caténaires en gare du Nord à Paris

VT11-TEE-Parsifal

Une VT11 prête au départ à Paris-Nord, mais la caténaire 25kV est déjà là…

Les interpénétrations d’engins diesel ne s’arrêtaient pas à la Deutsche Bahn puisque la SNCB mettait en service dès 1957, dans le cadre des Trans-Europ-Express vers Paris et Cologne, quatre locomotives diesel du type 204 (plus tard série 54), équipées d’un rapport d’engrenage différent de leurs congénères 201 et 202, les autorisant à 140km/h.

Les 204 étaient analogues aux 202, dont on voit ici un exemplaire préservé au patrimoine historique, exposé à Ath en 2013 (photo Mediarail.be)

Dès les années 60, la hausse sensible du trafic milita pour des rames tractées et bien plus lourdes, avec des trains de plus en plus longs, requérant d’autres moyens de traction. Mais nous n’étions pas à l’époque dans un régime comme aujourd’hui, avec des contrats et des péages ferroviaires. Du côté de l’exploitation, des conventions multilatérales RIV et RIC réglait les interpénétrations internationales, mais il ne s’agissait que des voitures et des wagons, le côté « le plus facile ». Car en matière de traction, c’est autre chose : pas d’interopérabilité (ou alors très timide), avec des métiers de conduite avant tout formatés sur le seul territoire national et une hausse importante des techniques de signalisation aux normes strictement nationales, véritable barrage à un réseau ferré unique. L’ensemble de l’exploitation internationale était réglée sous un régime de « compensations » des heures prestées et du matériel fournit, une sorte de vaste troc international. La réciprocité était « la règle » autant que possible sur des itinéraires très différents et aux charges différentes. Ce modus operandi s’est arrêté… en 1999, lorsqu’il a fallu mettre nos chemins de fer en conformité avec le droit…

En cette époque où on pense encore très « industrie nationale », chaque pays choisi le courant de traction qui lui convient. La Belgique avait opté pour le 3000V continu, tandis que la France choisissait pour le Nord et l’Est le 25kV alternatif. Le 9 septembre 1963, les « deux courants » se rejoignaient à Quévy, faisant de cette gare belge frontalière une gare commutable. Une section de séparation 3 kV-CC – 25 kV-50 Hz située sur les voies principales permettait aux trains remorqués par des locomotives équipées pour les deux types de courant de franchir la gare sans arrêt et sans restriction de vitesse, ramenant le temps de parcours Bruxelles-Paris en dessous des 3 heures. Une locomotive était-elle capable de circuler sous deux, trois voire quatre courants ? La réponse fût oui. Et l’artère Paris-Bruxelles va devenir alors l’une des plus technologique et interopérable d’Europe.

Des engins électriquement interopérables
Pour cette relation la SNCF fit modifier deux locomotives BB9400 bicourant en BB 20004 et 20005, renumérotée par la suite 30001 et 30002, tri-courant 1500V-3000V-25kV. Le tableau de bord était identique aux 9400/9500 mais ces machines étaient équipées du frein électro-pneumatique. Les BB 30001 et 30002 étaient à moteurs directs à collecteurs et équipés de bogies Jacquemin, alors que les BB 30003 et 30004 étaient montées sur bogies monomoteurs avec moteurs à courant continu alimentés par des redresseurs excitron.

BB30001-SNCF

La 30001, en 1967, prête au départ à Bruxelles-Midi (photo Michel Broigniez).

La SNCB n’est pas non plus inactive et va occuper le devant de la scène européenne avec l’internationalisation du trafic belge, centré sur Bruxelles. Le programme Belgique-Paris étant dorénavant « tout électrique », tout comme vers Amsterdam, la SNCB entreprit de construire rapidement une BB légère dotée d’un nouveau bogie BN avec guidage des boîtes par bielles à silentblocs et des moteurs entièrement suspendus avec transmission Alsthom à anneaux dansants et biellettes. Ce sera les cinq engins de la série 15 dotée d’un pont redresseur de diodes au silicium, une première à l’époque en Belgique.

BB15-TEE-SNCB

La 1503 dans sa livrée bleue originale de passage à St Quentin en 1975 en tête du TEE Parsifal doté de voitures allemandes (photo Jean-Paul Lescat).

Les 15 et les 30000 permettent d’assurer maintenant le trajet Bruxelles-Paris en 2h35, avec l’arrivée rapide de nouvelles voitures

Sur Ostende-Cologne, la SNCB se fit livrer en 1966 encore huit machines à l’origine quadricourant, de série 16. Amélioration des 15 précédentes, ces machines alourdies à cause du transformateur acceptant le 15kV allemand, ont aussi été vues à Paris, même si ce n’était pas leur artère favorite. Entretemps, les voitures inox étaient bel et bien livrées pour l’exploitation des TEE Paris-Bruxelles-Amsterdam.

La SNCF, qui préfère une politique du train lourd, quite à en faire moins sur une journée, avait besoin de puissance. Prenant la suite des BB 30000, elle commande à Alsthom de puissantes CC40100, véritables icônes du Nord international. Les quatre premières machines produite en 1964 furent soumises à de nombreuses mise au point. Leur silhouette inédite avec le profil caractéristique français du « nez cassé » et du pare-brise inversé était une oeuvre du designer Paul Arzens (1901-1990). Les six exemplaires suivants sortirent plus tard en 1969-1970 et bénéficièrent de différentes améliorations. CC40100 et voitures Inox, Paris-Bruxelles tenait désormais son look si particulier et si prestigieux.

CC40100

Passage de la 40109 en gare d’Aulnoye, en tête d’un corail Bruxelles-Paris le 20 juillet 1988 (photo Renaud Cornu-Emieux via licence flickr).

Les 40100, avec leurs 107 tonnes, étaient fort logiquement des CC. Elles étaient équipées pour circuler sous 2 tensions (continu et alternative) et 4 courants (1500V, 3kV, 15kV et 25kV). Elles reprirent la conception très française du bogie monomoteur à bi-réduction en vigueur à l’époque sur près de 400 machines, mais il s’agissait selon les critiques d’un compromis mécanique compliqué, tenant compte de l’électromécanique et de l’électronique des années 60. Des considérations de prix et de délais dictèrent le choix, par la SNCB, de six machines identiques de série 18. Alsthom apportant les mêmes bogies monomoteurs et l’appareillage entier, c’est l’entreprise BN qui construisit les chaudrons et fournissait le montage final. Le rouge bordeaux de Paul Arzens est remplacé en Belgique par du bleu acier. Les 18 arrivèrent sur le réseau en 1973 et circulèrent en pool sur le trafic vers Paris, mais aussi sur Cologne. Or, les 40100, qui devaient de toute manière opérer un tête-à-queue à Liège-Guillemins, ne se rendirent jamais en Allemagne au contraire des 18 belges. Pour le coup, l’appareillages 15kV fut alors démonté. Par contre, tant les 40100 et 18 n’urent l’aval de circuler aux Pays-Bas, officiellement pour leur poids trop élevé sur les rares ponts-levis encore existants. Ces considérations techniques n’ont pas toujours convaincus les plus fins observateurs qui ont surtout remarqué la vivacité de la « souveraineté nationale » et une internationalisation à minima de la traction. Rappelons que les réseaux pratiquaient le troc, et non la facturation des prestations…

Un graphique hebdomadaire de La Vie du Rail d’avril 1973 montre que les CC40100 du dépôt de la Chapelle fournissait près de 6.900 kilomètres de prestation chaque semaine, variable bien-sûr d’un engin à l’autre. Ce lot devait assurer une douzaine d’allers-retours en semaine, incluant 4 à 5 paires qui circulaient directement via Maubeuge, Charleroi et Liège. Avec les 15 et les 16 de la SNCB, le parc de traction interopérable était ainsi soumis à un rythme important.

CC40100

Les 1601 et 1805 côte à côte à Bruxelles-Midi, dans leur livrée originale (photo SNCB).

>>> À lire : Bref panorama de la traction électrique à la SNCB

On a souvent associé Paris-Bruxelles avec les Trans-Europ-Express. C’était en effet l’artère la plus exploitée avec ces trains de prestige. En 1974, après réception du second lot de voitures Inox SNCF, le service Trans-Europe-Express compta jusqu’à six paires quotidiennes ce qui n’avait d’équivalent nulle part ailleurs en Europe. À cela s’ajoutaient les deux paires de TEE filant sur Charleroi, Liège et Cologne, de sorte que nous avions durant cinq années, jusqu’en 1979, les 8 TEE suivant entre Paris et Aulnoye :

  • Etoile du Nord (Paris-Bruxelles-Amsterdam – 57/84);
  • Île-de-France (Paris-Bruxelles-Amsterdam – 57/84);
  • Parsifal (Paris-Dortmund-Hambourg – 57/79)
  • Molière (Paris-Cologne – 57/79)
  • Oiseau Bleu (Paris-Bruxelles – 57/84);
  • Brabant (Paris-Bruxelles – 63/84)
  • Memling (Paris-Bruxelles – 74/84)
  • Rubens (Paris-Bruxelles – 74/84)

  • Dès 1979 le Molière et le Parsifal devenaient des Intercity 1ère/2ème classe tandis que les six paires de TEE « inox » vers Bruxelles (dont deux vers Amsterdam), survécurent au passage vers les années 80 aux horaires suivants :

    CC40100Extrait de l’indicateur international 1980/1981 (scan Mediarail.be)

    Dans l’intervalle, la fin des années 70 voyait aussi l’apparition des voitures au gabarit UIC Z : les Corails en France, les VSE « Eurofima » en Belgique. Jusque là, les rames express non-TEE étaient diversement garnies par des voitures UIC-X SNCF et diverses Apm/Bpm allemandes sur les trains vers… Amsterdam, les Pays-Bas n’ayant jamais vraiment eu un vrai parc international. En 1984, quatre des six TEE perdent leurs étoiles pour devenir des « trains comme les autres », ou presque. Certaines voitures Inox furent en effet transformées en seconde classe pour correspondre à la mutation de la clientèle, qui voulait du train moins cher.

    SNCF-Inox-1985

    En étant très attentif, on constate que la seconde voiture dispose d’une bande verte, signe distinctif français de la deuxième classe « façon Corail ».

    Il ne reste alors à l’été 1984 que les deux paires de TEE au sens de la définition de 1957, c’est à dire des « purs première classe avec supplément » : les 81/84 Rubens et 80/85 Île de France. Pour encore trois années : en mai 1987, le groupement Trans-Europ-Express était officiellement dissout, non pas à cause de l’Europe mais bien par les réseaux partenaires eux-mêmes.

    Quel impact sur l’interopérabilité des locomotives ? Aucun ! CC40100 françaises et séries 15, 16, 18 et même… 12 belges SNCB continuèrent un service Paris-Bruxelles via St Quentin et Mons tournant autour des 2h40 à trois heures de trajet. À la fin des années 80 et au début des années 90, on était encore et toujours sous le régime des « compensations » des prestations des conducteurs des dépôts de la Chapelle, d’Aulnoye et de Forest. De toute manière, on n’en avait plus pour très longtemps alors que le Thalys se préparait à tout changer le 2 juin 1996…

    On retiendra de tout cela que l’artère Paris-St Quentin-Mons-Bruxelles fut une artère les plus interopérables d’Europe. On retient encore que cette même artère a vu transféré son trafic sur ligne nouvelle avec, selon les années et hors pandémie, jusqu’à 25 paires de TGV, même si Londres-Paris/Bruxelles a fini par la détrôner en nombre de voyageurs. L’ancien tronçon Paris-St Quentin-Maubeuge est aujourd’hui un axe principalement TER, tout comme Mons-Bruxelles qui, grâce à la libération des anciens sillons, a permis d’instaurer deux trains par heure sur le service intérieur SNCB. Pour le reste, Mons-Quévy est devenue une petite artère omnibus quand la courte section transfrontalière Quévy-Aulnoye est aujourd’hui sans trafic commercial voyageur. Quelle déchéance…

    Pour le dernier baroud d’honneur, le COPEF français et le GTF belge organisaient le 1er juin 1996 un ultime voyage en « Inox » et CC40100, première… et seule fois qu’elle fut autorisée jusqu’à Amsterdam. C’est ce que vous raconte cette vidéo de votre serviteur, qui a vécu ce voyage.

    08/01/2021 – Par Frédéric de Kemmeter – Signalisation ferroviaire et rédacteur freelance
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    Le rail après le Covid : entre défis et opportunités

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    28/12/2020 – Par Frédéric de Kemmeter – Signalisation ferroviaire
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    Est-il encore nécessaire de parler du Covid-19 au risque d’avoir un geste de lassitude ? Il est pourtant nécessaire de faire le point et de prendre de la hauteur. Le secteur ferroviaire, qui est déjà si difficile à gérer à tous les niveaux, va devoir une fois de plus faire face à de nombreux défis. Lesquels pourraient aussi être des opportunités si on prend la peine d’entreprendre dans certains cas un « mental shift ».

    Il est bien clair que la pandémie de 2020 a provoqué un désastre. Comme l’expliquait l’International Railway journal l’été dernier, partout dans le monde, les opérateurs de transport en commun et de chemins de fer ont été confrontés à un manque de financement considérable, malgré les fonds de relance reçus pour maintenir leurs activités dans les premières semaines de la pandémie. Les opérateurs européens de transport de passagers ont fait état de baisses de recettes pouvant atteindre 90 %. Un groupe d’opérateurs européens de transport en commun prévoit un manque à gagner global de 40 milliards d’euros de recettes. L’éloignement social, le confinement, l’isolement et le travail à domicile sont bien sûr les principaux responsables de cette situation.

    Les gens ont été invités à occuper un siège sur quatre et les trains roulent à vide. Certaines critiques se sont demandés pourquoi tous les ICE allemands sont restés en service alors qu’il n’y avait que 10 % de personnes à bord. L’argument était qu’il fallait maintenir des capacités pré-pandémiques pour justement garantir la distanciation sociale. Cela a provoqué de vifs débats, car cette thèse veut faire croire que les gens prendront un autre train quand le premier est rempli. Cela peut s’avérer correct pour les trains avec réservation obligatoire. Mais c’était faux pour le trafic régional, car les horaires de travail ne changeant pas, il n’était donc pas question de changer de train et d’arriver en retard sur le lieu de travail. C’est donc tout une réorganisation de la société qui est apparue, avec beaucoup de gens en télétravail et d’autres qui devaient être sur place mais avec des horaires plus adaptés. Le secteur ferroviaire a ainsi été confronté à des défis qui remettent en cause son business. Les heures de pointe sont allégées, il y a moins de rentrées financières et la notion d’abonnement prend une tout autre tournure puisque certains personnes ne vont physiquement au travail que quelques fois par mois, au lieu de tous les jours. C’est toute la tarification qu’il va falloir revoir et cela renforce encore un peu plus les difficultés de financement du transport public, que ce soit en train, en bus ou en métro.

    Covid-19

    Un autre problème, plus politique, est apparu : les opérateurs privés, qui ne peuvent vivre que des recettes de la billetterie. Des opposants de longue date aux opérateurs privés en ont profité pour affirmer que ces entreprises, déjà considérées comme « coupables de venir manger dans l’assiette des cheminots », n’avaient qu’à se débrouiller avec leurs actionnaires. Mais ces entreprises ont vite rétorquer que ce sont les gouvernements qui leur ont retiré « leur pain », en confinant les gens chez eux. C’est comme si on interdisait les livraisons de farine chez le boulanger en l’obligeant malgré tout à faire du pain ! Dans le cadre de délégation de service public, les décisions gouvernementales ont été considérées par certains juristes comme des ruptures de contrat, car ceux-ci impliquaient des ratios de croissance du nombre de voyageurs, brutalement stoppée.

    Dans certains pays, cela s’est traduit par de vifs débats sur la responsabilité des uns et des autres. L’Autriche semble avoir trouvé une voie apaisée en octroyant tant chez ÖBB qu’à WESTbahn un contrat de service public temporaire sous forme d’un quota de trains à exploiter entre Vienne et Salzbourg, avec une aide financière à la clé. En Grande-Bretagne, la pandémie a achevé définitivement le système de franchises qui ne se portait déjà pas bien depuis plusieurs années. Mais au lieu de nationaliser, ce qui aurait coûté une fortune à l’État à cause des contrats en cours, la Grande-Bretagne se dirige vers une nouvelle forme de concession qui se rapproche plus de ce qui se fait en Europe du Nord.

    Franchise-rail

    Les défis de demain sont de redessiner les contours du secteur ferroviaire. La pandémie change complètement le paysage et accélère les transformations. Plusieurs questions demandent des réponses rapides :

    • jusqu’à quel point l’État doit intervenir dans le secteur ferroviaire et les transports publics, dans ce contexte nouveau du télétravail et de moins de déplacements;
    • y-a-t-il un mental shift auprès des décideurs pour admettre que le secteur ferroviaire est pluriel, et non plus mono-administré comme jadis ?
    • Quelles sont les perceptions du public face à ces restrictions de voyage, et quelle est son attitude face à un autre sujet un peu oublié : l’urgence climatique ?

    On peut déjà rapidement contredire certains courants d’idées qui percolent chez des groupes très actifs sur les réseaux sociaux :

    • On ne reviendra pas au monde ancien avec des idées basées sur la conservation d’un héritage social et industriel. La société change, donc le social changera aussi. Le monde post-covid ne signifie pas la fin des autres transports concurrents ni l’instauration de politiques autoritaires favorisant le contrôle social ni l’arrêt des progrès technologiques;
    • Il n’y aura pas de retour au collectivisme. La pratique du vélo, en très forte hausse, montre au contraire que les gens veulent contrôler eux-mêmes leurs déplacements et ne plus dépendre des offres et restrictions gérées au niveau politique;
    • Il n’y aura pas de décroissance mais une « croissance différente ». On peut prévoir une forte accélération de la digitalisation tout en promouvant une baisse des voyages et des trajets inutiles.
    • À l’heure actuelle, personne ne peut dire avec certitude en quoi le comportement des voyageurs sera différent une fois la pandémie passée. À long terme, une fois que des mesures sanitaires efficaces auront été mises en place, il est probable que les voyages aériens reprendront, ce qui ne provoquera une demande ferroviaire que pour certaines tranches d’âge qui y trouvent avantage.

    C’est donc l’occasion pour le rail d’intégrer tous ces défis mais en les transformant en opportunités. Le futur du rail dépendra de deux facteurs clés : un mélange de service et de technologie.

    L’importance du service
    Comment dépasser le confort individuel de la voiture et la vitesse de l’avion ? Par le service rendu ! On en est encore loin. Le train à grande vitesse a certes permit d’éliminer l’usage de l’avion sur 300 à 600 kilomètres. Mais le confort de ces trains n’atteint pas encore celui que l’on trouve dans les véhicules privés. Pour éliminer cette sensation de « perte de temps en train », il faut distraire le voyageur. Cela passe par le wifi à bord, lequel permet aux voyageurs d’avoir des occupations, d’occuper le « temps mort du voyage » par du temps utile.

    Voyage-train

    Mais le wifi embarqué est aussi un business, en permettant non seulement une meilleure connaissance interne des lignes et de leur fréquence d’utilisation, mais aussi de collecter des données précieuses et de connaître les goûts des clients, ce qui est essentiel pour l’expérience client. Les datas, c’est le nouvel or noir, le carburant des entreprises de demain. Même dans un simple bus, collecter des datas permet de créer un nouveau business. Par exemple, depuis juillet 2020, Transport for London recueille des « données dépersonnalisées » dans 260 stations de métro équipées de Wi-Fi afin d’étudier les flux de personnes voyageant sur le réseau, ce qui permettrait d’améliorer le fonctionnement du métro et de fournir davantage d’informations sur le placement des publicités, comme les zones où le nombre de passagers est le plus élevé et où la durée de séjour est la plus longue.

    Un meilleur service passe aussi par l’utilisation des « temps morts ». Et la nuit en fait partie. C’est donc sur le service que doivent être basés les trains de nuit, en en faisant de véritables hôtels roulants. On utilise donc la « perte de temps voyage » en l’intercalant dans le temps mort que représente le sommeil. La capacité de la majorité des trains de nuit d’arriver à destination, au centre-ville, vers 8h du matin, permet d’éviter un maximum d’avion sur des distances de 700 à 1000 kilomètres. De plus, le train de nuit, avec ses cabines et ses compartiments, répond parfaitement à la distanciation sociale.

    Train-de-nuit
    (photo ÖBB Nightjet)

    Mais ce qui est fortement recherché, c’est la cohérence de la billetterie. Les systèmes informatiques de toutes les sociétés de transport sont parfois « des objets faits maison », certes avec l’aide de sociétés extérieures, mais dont les données deviennent « intraduisibles » sur d’autres systèmes informatiques. Il y a parfois là derrière une politique voulue de protection du business. Mais tout ne dépend pas que de l’informatique. Dans certains pays, un enfant peut être classé de manière variable comme moins de 12 ans, moins de 14 ans, moins de 16 ans, selon les politiques sociales, qui restent une compétence nationale. Les compagnies aériennes ne se préoccupent pas de ces aspects car elles ne sont pas redevables du service public et des tarifs sociaux imposés, au contraire des chemins de fer locaux et régionaux. Les voyages aériens sont mieux organisés grâce à une association mondiale qui promeut un système de tarification mondial standardisé tel qu’Amadeus ou Sabre pour voir en temps réel la disponibilité et les prix des opérateurs. Il n’y a pas d’équivalent pour le secteur ferroviaire, qui reste un «objet national». En effet, il incombe dans le cas du chemin de fer de savoir si la personne qui commande un ticket local fait partie des usagers qui ont droit à une réduction en tant que résident permanent pouvant bénéficier d’une politique sociale. Certains billets pour jeunes, comme le Go-Pass belge, ignorent la nationalité mais dans d’autres pays, c’est plus compliqué ! Au niveau technologique, avec l’accès aux API des opérateurs ferroviaires, «il n’y a pas de standardisation de données à travers l’Europe, et dans de nombreux cas, il est très difficile d’accéder à ces informations», explique Mark Holt, directeur technique de Trainline, au magazine Wired.

    On peut encore discuter longtemps sur d’autres thèmes, mais ceux déjà décrits ci-dessus permettent déjà de se faire une idée de ce qui attend le secteur ferroviaire. Le futur sera différent d’hier, les concurrents ne resteront pas les bras croisés, la technologie augmentera et il faudra convaincre les nombreux voyageurs encore réticents. Tout cela avec des objectifs climatiques. En deux mots : défis et opportunités.

    Je vous souhaite une année 2021 pleine d’enthousiasme et de renouveau.

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    Vous voulez sauver l’environnement ? Alors vous devriez arrêter de voyager !

    Par Frédéric de Kemmeter – Signalisation ferroviaire et rédacteur freelance – Inscrivez-vous au blog
    02/11/2020 –
    (English version)
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    Moins de voyages n’est pas un sujet dont les blogueurs ou les voyageurs semblent beaucoup discuter. Mais c’est une question importante qui, malheureusement, a pris une tournure émotionnelle, et parfois même irrationnelle.

    «Restez à l’écart des transports publics si vous voulez rester en bonne santé,» prévient Boris Johnson: le Premier ministre ordonne aux Britanniques de marcher ou de faire du vélo pour réduire le risque d’infection. C’était en mai 2020, au Royaume-Uni, avec un message très clair: évitez les transports publics et les chemins de fer. En septembre dernier, à 1500 kilomètres de Londres, le Comitato Tecnico Scientifico (CTS) décide en Italie de ne pas assouplir la règle d’occupation d’un siège sur deux sur les trains grandes lignes. Les trains à grande vitesse italiens ne peuvent être remplis qu’à 50%, ainsi en a décidé la loi. Que viennent faire ces deux exemples en ce qui concerne la cause climatique ? Qu’avec des mesures fortes, des restrictions de voyage peuvent s’organiser assez facilement. Bien-sûr, il s’agit ici d’une urgence sanitaire, pour lutter contre la pandémie. Mais imaginez un instant si de telles mesures avaient été prises par des gouvernements « d’urgence climatique » ?

    Au printemps, certains groupes politiques radicaux se sont réjouis que les effets du lockdown aient provoqué une chute des émissions de CO2 durant les mois de mars et avril. Il est en effet démontré qu’une chute de l’activité humaine redonne des couleurs au ciel. À leur apogée, les émissions des différents pays ont diminué de –26% en moyenne. D’où le rêve de certains écologistes d’appliquer aussi une certaine forme de lockdown pour sauver la planète.

    Là où cela devient irrationnel, c’est que si on optait pour une politique gouvernementale climatique officielle (le grand rêve écologiste), cela toucherait tous les transports, et pas seulement les plus polluants. Au printemps, l’idée de remplacer les vols d’une heure en avion par des trajets en train semblait séduisante. En réalité, elle soulage les compagnies nationales qui peuvent ainsi éliminer certaines « obligations politiques », comme le fait de desservir par avion certaines villes de France, d’Italie ou de Scandinavie « sur demande des élus locaux ». C’est donc un calcul purement comptable, car l’arrêt de ces vols, à peine une vingtaine ou une trentaine par pays, ne sauvera évidemment pas la planète mais élimine des lignes déficitaires.

    Certains veulent croire que moins d’avions remplirait les trains. C’est évidemment ce qu’on souhaite. Les trains sont l’une des formes de transport de masse les plus écologiques disponibles, libérant 0,046 kg de dioxyde de carbone (CO₂) par kilomètre parcouru par chaque passager. Une voiture diesel fait presque trois fois plus avec 0,117 kg. Mais une étude publiée en mai 2020 dans le journal Nature Climate Change a révélé que les réductions drastiques des voyages aériens ne représentaient que 10% de la baisse globale de la pollution. C’est trop peu et cela démontre que s’attaquer à des symboles ne rendra pas noblesse au train. D’autant plus que par « voyages aériens », il faut tenir compte de la grande quantité de voyage intercontinentaux, impossible à effectuer par train…

    Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), le transport ferroviaire est le secteur de transport le plus électrifié. À l’échelle mondiale, les trois quarts des mouvements de passagers et la moitié du fret ferroviaire dépendent de l’électricité, une énergie verte. Mais si vous dites que le chemin de fer est aussi le moyen de transport voyageurs le plus économe en énergie, par rapport à la route et à l’aviation, pourquoi le transfert modal est-il si difficile ?

    La réponse est que le train ne répond pas à toutes les demandes possibles de mobilité ni à tous les flux logistiques industriels. On peut rêver d’un lockdown climatique, mais cela ne signifie pas moins d’autos et moins d’avions au profit du train, cela signifie tout simplement moins de voyageurs. Il n’y aura donc pas de modal shift automatique vers le mode le moins polluant si on décrète des mesures de restrictions climatiques très sévères, comme on le fait pour la pandémie. Les gens s’arrangeront toujours pour choisir ce qui leur convient le mieux, sauf si on instaure un régime politique autoritaire.

    On comprend vite en analysant cela que ce n’est pas un lockdown climatique dont nous avons besoin si on veut que les trains roulent. Nous savons tous que la limitation des déplacements entraîne une chute du commerce et des activités sociétales, ce qui n’est pas durable pour ceux qui en vivent, très souvent des petits emplois non-qualifiés, qui seraient les grands perdants d’une telle situation. On comprend aussi que certains groupes politiques qui font beaucoup de bruit sur les réseaux sociaux ne sont pas là pour remettre le train au devant de la scène, mais utilisent l’argument climatique pour combattre le capitalisme de l’aviation et de l’automobile. Ils parlent de subsidier le train quel qu’en soit le prix à charge des contribuables et promotionnent le service public plutôt dans une visée de contrôle social des citoyens. Ces gens-là sont une mauvaise nouvelle pour le futur du chemin de fer. Ce n’est pas l’obligation de prendre le train qui doit être le fil conducteur politique, c’est l’obligation de rendre le train meilleur que les autres transports, ce qui est tout différent. Cela passe par un rééquilibrage de la taxation et de la TVA sur les billets, mais pas uniquement. On n’obligera pas les gens à prendre des trains pourris pas chers pour sauver la planète…

    Lockdown_3

    Une autre perspective pour sauver la planète risque aussi d’être fatal au train : le retour au village, la promotion du circuit court. En effet, cela signifie une autarcie qui n’encourage pas les trajets, même courts. Dans la théorie du circuit court, on ne vit et on ne mange que ce qui a dans les environs immédiats. Plus besoin de trains de marchandises puisqu’un seul agriculteur, en monopole, suffirait pour nourrir deux ou trois villages, au prix qu’il souhaitera appliqué. Les citoyens sont appelés à gérer leur propre jardin potager communautaire et à recycler tout ce qui est possible. Quel est dès lors le rôle du transport et du train dans cette vision climatique ?

    Bien évidemment cette présentation de l’économie locale est expressément forcée, car le besoin de déplacements demeure, ne fusse que pour aller dans un hôpital, une bibliothèque ou une université, que chaque village n’a pas. Par ailleurs l’autarcie précarise grandement les gens (souvenons-nous des gilets jaunes), et ne serait socialement pas accepté dans nos sociétés modernes. Tout ne peut certainement pas être fabriqué / produit localement. Si vous ne fournissez pas un moyen pour que les choses soient produites et les matériaux recyclés localement, vous n’avez pas une économie circulaire. Il est évident que certains types de fabrication nécessiteront toujours une économie à l’échelle régionale, ou nationale. On aura donc toujours besoin de se déplacer et de transporter des marchandises mais ces trajets ne se feront pas à 100% par train, mais aussi par d’autres mobilités plus en adéquation avec les réalités locales. Il ne faut donc pas arrêter nos déplacements pour sauver la planète mais plutôt rapprocher les gens des gares pour qu’un maximum de citoyens puisse bénéficier du train sans recours à un autre mode pour le dernier kilomètre.

    >>> À lire : Et si on ramenait les gens plus proches des gares ?

    Que retenir de tout cela ? Que le bien-être du citoyen passe toujours par la rencontre, la visite, le voyage, et que les déplacements restent nécessaires. Que des besoins ne peuvent être satisfaits que par des objets fabriqués ailleurs, parfois loin du village ou de la ville. Que vous ne pouvez pas construire un transport durable ni avec un lockdown ni avec une économie circulaire. Un lockdown climatique imaginé par certains groupes radicaux provoquerait en effet un effondrement du mode de transport ferroviaire. Qu’il n’est pas utile de promotionner le transport ferroviaire à des fins d’idéologie politique mais bien de promotionner le train pour ce qu’il est, c’est-à-dire un transport durable qu’on utilisera le plus possible et qui doit encore opérer un saut majeur en technologie et en maîtrise des coûts. On ne peut pas acheter de nouveaux trains ni améliorer l’infrastructure en combattant le capitalisme et l’industrie. Á ce titre, il est impératif de compter sur toutes les bonnes volontés,  pas uniquement sur quelques monopoles établis.

    02/11/2020 – Par Frédéric de Kemmeter – Signalisation ferroviaire et rédacteur freelance
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    Proposition pour des trains de nuit (2) : Belgique -Milan/Barcelone


    15/10/2020 – Par Frédéric de Kemmeter – Signalisation ferroviaire et rédacteur freelance
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    Nous poursuivons ici une petite série de propositions totalement libres sur les relations par trains de nuit qui nous semble le plus plausible. Aujourd’hui, voyons ce qu’on pourrait faire entre le Benelux et l’arc méditerranéen.

    Contexte
    La Belgique et les Pays-Bas concernent à eux seuls un bassin de population d’environ 28,92 millions d’habitants, pour la plupart tourné vers le sud quand il s’agit de vacances. L’arc méditerranéen concentre de plus en plus d’importants centres économiques, alors que jusqu’ici c’était plutôt le nord de l’Europe qui concentrait cet avantage.

    L’idée
    Relier quotidiennement Bruxelles à deux grandes villes de l’Europe méditerranéenne : Milan et Barcelone. En moyenne et haute saison, on pourra rajouter la destination Nice. Voyons cela dans les détails :

    • Milan est la porte d’entrée vers l’Italie, et la gare Centrale est reliée pratiquement à toutes les villes, moyennes et grandes, ce qui permet d’atteindre toute la péninsule en une petite journée, la Sicile et la Sardaigne excepté. Milan est aussi « une autre Italie », celle de la finance et de la mondialisation, alors que la ville n’est pas capitale;
    • Barcelone est le pendant espagnol de Milan. La ville, encore provinciale il y a une vingtaine d’années, est devenu un haut lieu du tourisme. Trop peut-être, car la ville étouffe davantage que Milan par son attrait touristique. Barcelone est aussi un lieu économique d’envergure mondiale, mais peut-être moins que la ville italienne.
    • Nice n’est pas à priori un grand centre économique mais se situe en revanche sur l’une des côtes les plus riches du monde, avec pour voisin Monaco. La région niçoise, la Côte d’Azur, est un haut lieu de villégiature pour les retraités de toute l’Europe.

    Pourquoi pas depuis Amsterdam ?
    Tout simplement parce que cela allongerait le trajet d’environ 3 heures, sauf à envisager un matériel de nuit TGV, inexistant sur le marché. On ne passera pas non plus par Lille car il nous faut contourner le très encombré réseau d’Île de France. C’est donc sur un trajet via Namur et Luxembourg qui nous occupe ici.

    Le passage par la Lorraine permet de rattraper un autre train de nuit aux destinations identiques, en provenance de Francfort et Saarbrucken. (cliquer sur l’image pour agrandir)

    La destination Nice en pointillé suggère qu’elle ne serait pas quotidienne sauf d’avril à fin septembre. Les voitures pourraient notamment, en hiver, servir à renforcer un train de nuit vers les stations de ski, par exemple en renforçant la tranche Bruxelles-Munich prolongée sur Innsbruck.

    >>> À revoir : Proposition pour des trains de nuit au départ de Belgique et des Pays-Bas

    On constate avec la carte ci-dessus que la recomposition des deux trains, l’un de Francfort, l’autre de Bruxelles, pourrait en réalité s’effectuer n’importe où, à Metz, Dijon voire même Lyon. La question de faire suivre deux trains sur cette longue section reste ouverte.

    Le départ de Bruxelles se situerait vers 19h00, avec demi-tour en gare de Luxembourg-Ville vers 22h00. On serait à Metz vers 22h45, ce qui nous indique un départ de Francfort vers 19h40. Pour éviter un départ trop tardif de Metz, mieux vaut en définitive faire suivre les deux trains jusqu’à Dijon-Ville, où aurait lieu la recomposition vers 1h50 du matin.

    Chaque tranche comporte au minimum trois voitures. Les temps de manœuvres de recomposition dépendent de ce que SNCF Réseau autorise. Généralement, ce sont les locomotives titulaires qui les exécutent. On considère qu’à 2h30, deux trains sont recomposés :

    • une tranche pour Turin et Milan, regroupant les voitures de Bruxelles et Francfort ;
    • une tranche pour Barcelone, groupée avec celle destinée à Nice.

    Le train destiné à Milan peut transiter par Bourg-en-Bresse, Chambéry puis obligatoirement Modane. L’arrivée à Turin tournerait vers 8h00, pour une arrivée finale à Milan-Central vers 9h40. De ces deux gares, toutes les possibilités sont offertes pour rejoindre n’importe quel point d’Italie. On privilégiera Turin pour rejoindre Gênes puis les fameuses Cinqueterre.

    L’autre train vers la Méditerranée nous mène à 5h40 à Avignon-Centre, où un dégroupage avec les voitures pour Nice ont lieu. Cette arrivée pas trop matinale permet dès lors de desservir tout l’arc languedocien à une heure convenable : Montpellier 7h00, Perpignan 8h40. La poursuite en Catalogne suppose l’emprunt de la LGV Perpignan-Figueras. En l’absence de train classique roulant sur cette infrastructure, les horaires sous réserve et VMax 160 nous indiquent une arrivée à Figueres vers 9h10 puis finalement Barcelone-Sants vers 10h25.

    Enfin la tranche plus saisonnière vers Nice nous mène à Marseille à 7h00, St Raphaël à 8h40 et Nice à 9h40, horaire parfait pour une clientèle de loisirs.

    Le passage du Francfort-Milan par la Lorraine peut évidemment étonner. Il est évident que le trajet direct passerait plutôt par Bâle avec une locomotive à rajouter, et on aurait alors la tranche Francfort-Barcelone/Nice qui se baladerait en solo jusqu’en Lorraine. L’astuce ici est d’avoir une stratégie de groupage pour rentabiliser le train, car au final le trajet se fait de nuit, peu importe « le détour ». L’autre argument est la desserte de Turin, une ville trop à l’écart des grands flux internationaux, excepté avec la France.

    (photo Nik Morris via flickr)

    Au niveau de la traction, une astuce consisterait à faire croiser les trains Nord-Sud avec ceux du retour, Sud-Nord, à Dijon-Ville. Motif : les locomotives descendantes sont celles qui reprennent, à Dijon, les trains remontants. On évite de la sorte des trajets trop longs. Emprunter la LGV Perpignan-Figueres-Barcelone oblige à avoir une locomotive apte à ce parcours sous ETCS. La locomotive qui a amené le train Nice-Bruxelles/Francfort, jusqu’à Avignon, est celle qui reprendra le train inverse au petit matin. Dans le même esprit, celle provenant de Milan-Turin, pour le retour, reprendrait à Dijon le train aller, Turin-Milan. Au final, cinq machines – hors réserve -, sont nécessaires pour ce vaste mikado. Les installations de Dijon-Ville doivent pouvoir opérer 4 manœuvres en parallèle. Si ce n’est pas possible, il faut alors se reporter sur le triage de Perrigny.

    Chaque rame bloc rentre en atelier après deux allers-retours, soit à peu près 4.000 kilomètres, pour entretien.

    Les trains ne comportent que des places couchées. Une voiture-restaurant pourrait être incorporée tant de Bruxelles que de Francfort, mais elle risque de limiter la capacité lorsqu’il sera nécessaire d’augmenter d’une ou deux voitures les jours d’affluence.

    Le restaurant, ici dans une rame Thello (photo Mediarail.be)

    Ces trains seraient gérés comme des hôtels. Ils sont fermés de 23h00 à 5h00 (c’est à dire sans service), et aucun accès n’est permis en route, ce qui est une garantie majeure pour la sécurité.

    L’exemple anglais ? Une chambre du Caledonian Sleeper (photo Caledonian Sleeper)

    Le catering du matin serait effectué lors des passages à Avignon d’un côté, à Chambéry ou Modane de l’autre. Pain frais garanti, café, thé et céréales et yaourt pour celles et ceux qui préfèrent…

    Qui va gérer cela ?
    L’opérateur qui en aurait la capacité et l’audace. Le grand hic, c’est la France et son tarif kilométrique très élevé. Sans baisse de péages, il y a peu de chance de voir un tel service sur les rails français. L’opérateur devra gérer un service hôtelier commercial. L’idée reste la même que pour la proposition précédente, avec voiture-lits pour toutes les destinations, possibilité d’occupé un compartiment couchettes à quatre ou cinq. Prix globaux basés sur l’âge et billetterie par QR Code sur smartphone ou impression chez soi. La particularité de ces trains fait qu’il faut un marketing agressif car l’hôtellerie sur rail est plus difficile à vendre. On rappellera qu’il n’est jamais utile compter un voyage de nuit en « heures », étant donner qu’une nuit reste une nuit pour tout le monde, soit de 22h00 à 6h00.

    Au final, deux trains qui, avec leurs multiples correspondances, relient un vaste territoire nordique, d’Amsterdam à Berlin, vers un autre vaste territoire méditerranéen, de Trieste à Alicante, en passant par Livourne, Cannes, Montpellier et Gérone. Si la clientèle est au rendez-vous, doublant la capacité prévue, on passerait alors à des tranches de 2x 6 voitures, soit 12 véhicules par train. On peut imaginer, à terme, un train de 10-12 voitures pour chaque destination, mais il s’agirait alors d’être persuasif sur l’attrait du train de nuit et d’être irréprochable sur la qualité. L’espoir fait vivre…

    (photo Michele Triggiani via flickr)

    Autres propositions : 

    MilanComment connecter 51 millions d’Allemands à 26 millions d’italiens
    12/12/2020 – Nous poursuivons ici une petite série de propositions totalement libres sur les relations par trains de nuit qui nous semble le plus plausible. Aujourd’hui, il s’agit de connecter la moitié nord de l’Allemagne au nord de l’Italie.


    Attelage_automatiqueProposition pour des trains de nuit (1) : au départ de Belgique et des Pays-Bas
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    Proposition pour des trains de nuit (1) : au départ de Belgique et des Pays-Bas


    09/09/2020 – Par Frédéric de Kemmeter – Signalisation ferroviaire et rédacteur freelance
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    Nous entamons ici une petite série de propositions totalement libres sur les relations par trains de nuit qui nous semble le plus plausible. Elles ne manqueront pas de susciter débats et controverses. Aujourd’hui, quelles relations au départ de Belgique et des Pays-Bas ?

    Contexte
    La Belgique et les Pays-Bas concernent à eux seuls un bassin de population d’environ 28,92 millions d’habitants. La position géographique et l’attractivité diffère cependant entre les deux villes capitales :

    • Amsterdam est une destination mondiale axée sur le tourisme et les affaires;
    • Bruxelles est la capitale de l’Europe et un carrefour central entre Paris, Londres, l’Allemagne et les Pays-Bas.

    Ces éléments basiques, qu’il faut agrémenter avec d’autres arguments, montrent dès lors que de manière globale :

    • Amsterdam est une origine/destination à elle seule du fait de sa forte attractivité;
    • Bruxelles est plutôt un hub vers le nord de la France, Paris, et le Royaume-Uni.

    Si on additionne la zone de chalandise avec le Nord de la France, Paris, le Kent et Londres, on couvre un potentiel de voyageurs parmi près de 50 millions d’habitants produisant un PIB.

    L’idée
    Relier quotidiennement le Nord, l’Est et le Sud-Est de l’Europe pour atteindre un maximum de destinations en moins de 24 heures. C’est la raison d’être des destinations soigneusement choisies et visibles sur la carte ci-dessous :

    • Hambourg donne accès à la Scandinavie, à tout le moins au Danemark et au sud de la Suède. Ceux qui ont vraiment le temps prendront le ferry qui relie Lübeck/Travemünde à Helsinki. On sait que les gens « du sud » détestent aller au Nord. On peut vous affirmer que c’est une grande erreur…;
    • Berlin, qu’on ne présente plus, est une destination à elle seule. La capitale allemande permet aisément de rejoindre des joyaux touristiques majeurs comme Dresde, Prague ou Cracovie. La Pologne entière, et forcément Varsovie, est accessible depuis Berlin.
    • Munich est un nœud important de correspondances ferroviaires. On y compte trois courants de destinations : le duo Vienne/Budapest, le moins connu Tauern donnant accès à Klagenfurt, à la Slovénie (Koper) et surtout au nord de la Croatie, dont Rijeka sur la côte adriatique. Et enfin le très connu Tyrol, suivi du Trento italien qui mène à Vérone, Venise et Bologne, entre autres.
    • Zurich, ville de finances, pourrait aussi être une destination à elle seule. C’est principalement une passerelle ferroviaire donnant d’abord sur les fantastiques Grisons, mais aussi sur le Gothard, le Tessin et l’ensemble Lugano/Locarno puis la Lombardie, qui comprend non seulement Milan mais aussi les fameux lacs italiens.

    Notons au passage que le train de Bruxelles fait arrêt à Liège, et celui d’Amsterdam à Utrecht et Arnhem. La destination « Berlin » desservirait Potsdam, celle de « Munich » la ville de Augsbourg et pour Zurich, on a un arrêt d’office à Bâle, autre grand carrefour ferroviaire (Lausanne, Genève, le Valais…)

    L’ensemble de ces villes comporte aussi des pôles universitaires et des sièges sociaux de grandes sociétés. L’attrait conjoint des origines et des destinations permettent d’espérer de former de gros paquets de touristes ou de clientèle individuelle pouvant justifier les trains de nuit que nous allons maintenant décortiquer. (cliquer sur l’image pour agrandir)

    La carte ci-dessus est un scénario « moyen ». On considère que les flux entre le Benelux et les quatre destinations demeurent insuffisants pour former des trains complets, un format qui présenterait dix voitures par destinations. On a donc recours aux traditionnelles « tranches » de 3 à 5 voitures, ce qui nous donne le schéma d’exploitation visible ci-dessus :

    • Bruxelles serait un train « quadri-tranches » vers Hambourg, Berlin, Munich et Zurich;
    • Amsterdam serait un train « tri-tranches » vers Berlin, Munich et Zurich. L’absence de la destination Hambourg se justifie par le trop grand détour que feraient les voitures et par la proximité relative des deux villes (470km).

    On obtient donc deux trains de nuit quittant en soirée vers 21h30, les deux villes du Benelux. Si on compte un minimum de trois voitures par destinations, dans la tradition Nightjet, le train de Bruxelles aurait déjà 12 voitures quand celui d’Amsterdam en aurait au minimum 9. Mais Amsterdam étant la destination – et l’origine que l’on sait -, il ne serait pas surprenant que chaque tranche ait 4 voitures, ce qui nous ferait dès lors aussi un train de 12 voitures.

    Vers minuit, ces deux trains arrivent à Cologne ou aux alentours. Un premier tri est déjà opéré :

    • Groupage des Berlin et Hambourg en un seul train;
    • Groupage des Munich et Zurich en un second train.

    Le premier train se dirige vers Dortmund et Hanovre avec trois tranches. Le second descend sur Mannheim avec 4 tranches. Un second tri, vers 3h30/4h00 du matin s’opère :

    • aux environs d’Hanovre pour séparer les Hambourg et Berlin. Les voitures Bruxelles-Hambourg profiteront du Zurich-Hambourg qui passe juste à ce moment-là… Les voitures pour Berlin ne forment plus qu’un train, 6 à 7 voitures;
    • à Mannheim, on sépare les flux Zurich et ceux de Munich. Les voitures pour Munich ne forment plus qu’un train de 6 à 7 voitures. Idem pour les voitures destinées à Bâle et Zurich, sauf qu’elles profitent aussi du Hambourg-Zurich qui passe juste à ce moment-là.

    Les quatre destinations sont toutes atteintes entre 7h30 et 8h30 d’après une brève comparaisons avec les temps de parcours grande ligne classique. Au retour, scénario identique mais inversé, avec les mêmes regroupement à Hanovre et à Mannheim.

    Au niveau traction, six locomotives devraient suffire en théorie :

    • par exemple la première sur Amsterdam-Mannheim-Munich et la seconde sur Bruxelles-Hanovre-Berlin;
    • Les troisième et quatrième exploitent les trains Hambourg-Hanovre-Mannheim-Bâle et retour. Vu le demi-tour dans cette gare suisse, il faudra la traction CFF pour compléter sur Zurich;
    • les cinquième et sixième sont celles faisant le chemin inverse, vers Amsterdam et vers Bruxelles.

    Chaque rame bloc rentre en atelier après deux allers-retours, soit à peu près 4.000 kilomètres, pour entretien.

    Les trains ne comportent que des places couchées. Une voiture-bar pourrait être incorporée tant d’Amsterdam que de Bruxelles, mais elle risque de limiter la capacité lorsqu’il sera nécessaire d’augmenter d’une ou deux voitures les jours d’affluence. La présence d’une authentique voiture-restaurant ne s’impose certainement pas ici, vu les heures tardives de départ (21h30) et les petits déjeuners généralement servis en compartiment, que ce soit couchettes ou voiture-lits.

    Ces trains seraient gérés comme des hôtels. Ils sont fermés de 23h00 à 5h00 (c’est à dire sans service sauf celui du bar, ouvert jusqu’à minuit), et aucun accès n’est permis en route, et c’est tant mieux pour la sécurité. Le catering du matin serait effectué lors des groupages/dégroupages à Hanovre et Mannheim dans le sens Ouest-Est, à Cologne dans le sens retour. Pain frais garanti, café, thé et céréales et yaourt pour celles et ceux qui préfèrent…

    Nightjet, l’exemple à suivre en matière de service. Mais on peut encore faire mieux… (photo Nightjet)

    Une des trois ou quatre voitures par tranche comporterait un espace pour 12 à 16 places vélos. On n’ira pas plus loin, parce que chaque mètre carré compte et on perd 12 couchettes à la vente. On nous dit par ailleurs que le « monde d’après » ne serait plus celui de la possession mais de l’usage, de la location. Or les quatre destinations – tout comme les deux origines -, ont toutes des systèmes très complets de bike-sharing, de vélo à l’usage. L’occasion de passer de la théorie à la pratique et de ne plus encombrer un train avec ses lourds objets perso…

    Chaque gare origine/destination dispose d’un salon d’accueil et de facilités pour les « longs voyages » : échange de ticket, eau gratuite, salon de repos avant d’embarquer, refuge quand il pleut, la gare doit être un lieu qui vous fait oublier le chemin de fer d’hier. Évidemment tout dépend du bon vouloir des gares de destination et des possibilités d’occuper quelques dizaines de mètres carrés.

    >>> À lire : Comment le train peut-il reconquérir la clientèle d’affaires ?

    Qui va gérer cela ?
    L’opérateur qui en aurait la capacité et l’audace. Ce ne sera pas nécessairement un service public puisqu’il s’agit d’un service hôtelier commercial. Une vieille idée ? C’est clair qu’on reprend ici ce qui a déjà existé jadis. Mais en faisant mieux. Exemple : voiture-lits pour toutes les destinations, possibilité d’occupé un compartiment couchettes à quatre ou cinq. Prix globaux basés sur l’âge et billetterie par QR Code sur smartphone ou impression chez soi. La particularité de ces trains fait qu’il faut un marketing agressif car l’hôtellerie sur rail est plus difficile à vendre. Beaucoup de gens comptent encore « en heures », quand une nuit reste une nuit pour tout le monde, soit de 22h00 à 6h00.

    Ces trains devraient cependant à terme obtenir un équilibre, mais cela dépend de nombreux facteurs agissant sur les coûts et la commercialisation. Un train de nuit est un marché de niche et rarement une affaire de volume. Le mélange voitures-lits/voitures-couchettes offre théoriquement 156 places par tranche de trois voitures, 216 pour quatre voitures. On tourne donc autour des 620/640 places par train au départ de Bruxelles et Amsterdam, bien loin du débit volumique des TGV ou ICE, mais chaque train, c’est l’équivalent de cinq Airbus A320. Quelques firmes de catering ont comme métier de fournir du personnel de bord formé à la fois pour le service et pour les particularités ferroviaires.

    Au-delà de la destination
    Mais surtout, il importe d’obtenir, enfin, de vrais accords commerciaux avec d’autres chemin de fer à destination pour poursuivre le voyage, que ce soit de « grands établis » (CFF, ÖBB, DB, PKP, Thalys, Eurostar) ou des privés régionaux. En étendant la billetterie et les billets globaux au-delà des six origines/destinations, c’est win-win pour tout le monde : l’aire de chalandise qui s’étale au-delà de Zurich, Munich, Berlin, Hambourg ou Bruxelles remplit non seulement les trains de nuit, mais aussi les trains de jours des opérateurs concernés.

    Les Intercity polonais n’ont rien à envier à ceux d’Allemagne. L’un d’eux en gare de Berlin-Hbf, venant de Varsovie (phot Rob Dammers via wikipedia)

    Au final, on couvre une grande façade de l’Europe avec seulement deux trains de nuit qui par extension, permettent dans la (bonne) demi-journée de relier une douzaine de villes d’art, de Copenhague à Gênes en passant par Dresde, Salzbourg et Vérone. L’espoir futur : une clientèle qui grandit et qui impose bientôt des trains à deux tranches (2x 6 voitures) voire, rêvons, des trains complets mono destination, à l’image de l’ancien Thello Paris-Venise. Mais chaque chose en son temps, commençons par le début…

    Les autres propositions : 

    MilanComment connecter 51 millions d’Allemands à 26 millions d’italiens
    12/12/2020 – Nous poursuivons ici une petite série de propositions totalement libres sur les relations par trains de nuit qui nous semble le plus plausible. Aujourd’hui, il s’agit de connecter la moitié nord de l’Allemagne au nord de l’Italie.


    train_de_nuitProposition pour des trains de nuit (2) : au départ de Belgique et des Pays-Bas
    15/10/2020 – Nous poursuivons ici une petite série de propositions totalement libres sur les relations par trains de nuit qui nous semble le plus plausible. Aujourd’hui, voyons ce qu’on pourrait faire entre le Benelux et l’arc méditerranéen.


    Domicile-travail : le monde d’après encouragerait la voiture ?

    C’est ce qui ressort de trois enquêtes distinctes, parmi d’autres. L’auto pourrait revenir en force dans les comportements. Explications.

    L’enquête de Yougov concernait en réalité vingt villes européennes et interrogeait 7.545 adultes qui y vivent. Pour sa partie allemande, ce sondage interrogeait des citoyens de Berlin, Hambourg, de la région métropolitaine Rhin / Main, de Munich et de Cologne, soit les villes majeures d’Allemagne.

    Selon ce sondage Yougov au nom de l’association Transport & Environnement, de nombreux allemands souhaiteraient être plus souvent en auto après la crise du Covid-19 qu’avant. 41% des allemands (et 46% des européens…) interrogés ont déclaré vouloir effectuer un trajet de A à B avec leur propre voiture ou une voiture de location, davantage qu’auparavant. Seuls les Berlinois préfèrent davantage les bus et les trains (40%) que les voitures (34%).

    Par ailleurs, 35 % des personnes interrogées ont déclaré qu’elles n’avaient pas utilisé les transports publics locaux régulièrement depuis le début de la crise et qu’elles ne continueraient pas à le faire dans le futur proche par crainte d’une infection. Cela pose une réelle question de pertinence des transports publics, déjà confrontés aux mesures de distanciation.

    Une bonne nouvelle tout de même, un bon quart (26%) de toutes les personnes interrogées souhaitent faire du vélo plus souvent, 28% souhaitent utiliser malgré tout davantage les transports publics qu’auparavant. 28% des personnes interrogées à Berlin et Munich souhaitent également faire davantage de marche à pied.

    Il est évidemment difficile de tirer des conclusions, notamment par la nécessaire distinction à faire entre « souhait » et « exécution », ce que le sondage n’éclaire pas. Certains citoyens seraient dans un premier temps tenté par « la bulle protectrice » que représente l’automobile, mais la question n’a pas été posée. De plus, ce sondage a été réalisé en phase de déconfinement généralisé en Europe, et beaucoup de gens ne souhaitent qu’à revenir à leur vie d’avant, car pour l’immense majorité rien n’a changé en termes d’emploi, de domicile, de distance, si ce n’est le télétravail. Plus de la moitié des personnes interrogées (51%) étaient entièrement ou partiellement d’accord avec l’affirmation selon laquelle la vie quotidienne normale devrait reprendre au plus vite, même si cela s’accompagnait d’une augmentation de la pollution atmosphérique.

    Curieusement, l’association Transport & Environnement, qui a commandité l’enquête, ne fait pas état de cette volonté d’augmentation du véhicule privé et préfère n’en retirer que les chiffres plus en phase avec son combat, notant par exemple qu’ « une nette majorité de citadins à travers l’Europe ne veut pas voir la pollution de l’air revenir aux niveaux d’avant Covid-19 et soutient de profonds changements dans les transports pour protéger l’air pur. » On en sait pas d’où elle sort le terme « soutient de profonds changements »…

    Une autre enquête purement allemande a été effectuée par l’ADAC (fédération d’automobile clubs d’Allemagne) en avril dernier, mais elle élargit le panel au-delà de la seule sphère urbaine, sur 2.145 personnes. Selon cette enquête, la majorité des personnes interrogées utiliserait à l’avenir les moyens de transport individuels « sans grands changements substantiels. » Ce qui permet de confirmer la dichotomie depuis longtemps observée entre les urbains et les péri-urbains, plus dépendants de l’auto malgré l’instauration de bons services de train en Allemagne (S-Bahn notamment…).

    « La circulation automobile reviendra plus rapidement à un niveau supérieur, car les gens estiment à juste titre qu’ils sont davantage en sécurité dans leur propre véhicule », rapporte Stefan Gerwens, responsable du trafic à l’ADAC. Le sociologue Andreas Knie, qui dirige le groupe de recherche « Mobilité numérique et différenciation sociale » au Centre scientifique de recherche sociale de Berlin (WZB), en faveur d’un changement radical de mentalité, ne dit pas autre chose : « Si nous ne restons pas vigilants en termes de politique locale et fédérale, cette crise du Covid-19 entraînera une augmentation spectaculaire du trafic automobile. Il y aurait encore plus de circulation automobile que jamais auparavant parce que – subjectivement parlant – il vaut mieux s’asseoir seul dans sa propre voiture que, par exemple, dans un métro bondé. »

    Une troisième enquête de Deloitte Suisse a abouti à des résultats similaires : si les répondants ont déclaré qu’à l’avenir, ils marcheraient ou pédaleraient davantage, les moins de 30 ans confirmeraient également une tendance au transport privé motorisé. 26% d’entre eux pensent qu’ils prendront plus souvent la voiture à l’avenir.

    Ferdinand Dudenhöffer, directeur du Centre Automotive Research de Duisburg, prédit qu’il n’y aura pas de diminution de la densité des voitures, car les anciens modèles rouleront tout simplement plus longtemps. « À l’avenir, la densité des voitures en Allemagne et en Suisse tendra à augmenter davantage. Il n’y a actuellement aucun renversement de tendance perceptible, » explique-t-il au Schweizam Wochende.

    Pour Marion Tiemann, experte circulation chez Greenpeace Deutschland, c’est dramatique, bien qu’elle espère que ce ne soit que temporaire. L’évitement des transports publics en faveur du transport individuel « pourrait augmenter le nombre de kilomètres parcourus en voiture jusqu’à 20 milliards par an dans les seules grandes villes [allemandes, ndlr]. Cela signifie plus d’embouteillages et plus de dioxyde de carbone (CO2) nuisible au climat, » explique-t-elle au Redaktion Netzwerk Deutschland.

    Cette méfiance du transport public propulse le vélo au rang de solution sanitaire : il permet en effet de coller aux mesures de distanciation gouvernementales, car il est bien rare à vélo de se suivre à moins de deux mètres. Dans de nombreuses villes d’Europe, des bandes de circulation automobile ont été supprimées au profit du réseau cycliste. C’est le cas à Bruxelles sur la célèbre rue de la Loi, et dans certains quartiers de Berlin avec une série de pistes cyclables dites pop-up dans les quartiers du Kreuzberg et Friedrichshain, ce qui est loin de quadriller toute la ville.

    Brême (photo Ulamm via wikipedia)

    Mais ces opérations sont sporadiques et le plus souvent issues de plans ou de promesses politiques datant de plusieurs années. Les plus fins observateurs notent que le Covid-19 n’aurait souvent été que l’excuse idéale pour certains partis de mieux faire passer la pilule auprès de leurs électeurs. Regine Günther, des Verts berlinois, assume cette politique éclair en expliquant à Die Welt que « des coalitions municipales auraient besoin de mois, voire d’années, pour faire [ce qui a] été mis en œuvre au pas de course à Friedrichshain-Kreuzberg, » faisant hurler certains pour ce coup de force et ce déni de démocratie.

    Reste à voir si ces projets seront pérennes. Andreas Knie remarque que les villes « cyclables » ont toutes à leur tête des majorités associant les Verts. « Le nouveau maire de Hanovre, Belit Onay des Verts, a été élu fin 2019 avec l’engagement clair de réduire le nombre de voitures. A Munich, la nouvelle majorité verte-rouge du conseil municipal veut aller dans ce sens, » explique-t-il au Süddeutsche Zeitung. À Hambourg, les Verts, encore eux, négocient un accord de coalition avec le SPD. Et pour les autres villes ? C’est moins clair. On peut honnêtement douter que l’élection des Verts dans de nombreuses municipalités d’Allemagne et d’Europe soit le seul fait de leur politique cycliste, mais c’est un autre sujet.

    De nombreuses études ont montré que des villes plus piétonnes et plus cyclistes ne faisaient pas péricliter le commerce. Anvers, en Belgique, a l’une des plus longues artères commerçantes piétonnes d’Europe, dans une ville où on vote généralement… à droite. A Gand, à Strasbourg ou encore Vienne, de vastes zones piétonnes ne sont traversées que par les trams, solution peu polluante.

    >>> À lire : Le tram, une plus-value pour les commerces ? C’est évident…

    La grande misère annoncée de transport public
    Mais sondage ou pas, la grande question est de ne pas s’en tenir à une opposition binaire et stérile entre « gentils cyclistes urbains » et « méchants détenteurs de SUV ». Entre le deux, il y a le transport public, qui a énormément souffert des restrictions liées au Covid-19, y compris en Allemagne. Le nombre d’usagers dans les bus, les tramways, les métros et les S-Bahn a considérablement diminué. L’Association des entreprises de transport allemandes a mis en garde contre des difficultés financières massives, faisant état de perte de ventes pouvant atteindre un milliard d’euros par mois. Dans tous les pays d’Europe, c’est la même situation, particulièrement injuste quand on sait les efforts méritants du personnel qui a maintenu le service public au plus fort de la crise.

    Il flotte une curieuse impression que le monde politique semble avoir la certitude que tout va rentrer dans l’ordre d’ici peu. Sauf qu’un endettement massif de ces sociétés publiques municipales mettrait en sourdine tous les beaux projets d’investissements que nous avons souvent évoqué dans nos colonnes. Ce qui donnerait du grain à moudre à certains radicaux qui estiment finalement qu’il est moins cher de n’investir que dans les pistes cyclables et d’oublier le reste. Une erreur grave : « oublier » la périphérie et le péri-urbain, c’est entériner encore davantage le mode automobile, indispensable autour des villes, et c’est peut-être aussi accentuer un mouvement d’installation des activités tertiaires du centre-ville vers la périphérie, plus accessible. Moins de bureaux en ville signifie moins de taxes, moins de rentrée dans l’horeca le midi et précarisation croissante des citadins.

    >>> À lire : Le télétravail, fossoyeur de la restauration ?

    Le télétravail et la digitalisation : un risque d’exode urbain…

    La chercheuse suisse Karin Frick, économiste et membre du comité exécutif du Gottlieb Duttweiler Institute, confirme cette hypothèse, doublée d’un autre constat. Le télétravail, s’il diminue la pression sur les transports, pourrait voir l’adoption du « bureau à domicile », lequel aura un impact sur notre façon de vivre et sur notre mobilité. « Aller au bureau seulement une ou deux fois par semaine pendant quelques heures, est susceptible [d’engendrer l’acceptation] d’un trajet plus long pour vous rendre au travail. » En clair : on s’éloigne des villes encore davantage, et le bureau à domicile pourrait signifier par ailleurs le besoin d’un espace de vie plus grand qui devient plus important. « Après tout, vous restez davantage à la maison pour y vivre et travailler sous un même toit, d’où le besoin d’espace, » impossible à trouver en centre-ville. Andreas Knie explique qu’« avec le virus, une sorte d’accélération de la numérisation s’est également produite. » En poussant plus loin, Karin Frick met en garde : « à long terme, le bureau à domicile pourrait conduire à une évasion urbaine. » Qui ferait la part belle à l’automobile…

    (photo Matilda Wormwood via pexels)

    En France, Elodie Franco Da Cruz, responsable des Études chez Cadremploi, ne dit pas autre chose : « La période de confinement a engendré chez les cadres beaucoup de réflexion et de remise en question, notamment sur leur lieu de vie, 68 % d’entre eux déclarent qu’ils seraient prêts à partir vivre au vert. » Tout en rappelant les réalités françaises : « s’ils sont certes prêts à s’éloigner, ils souhaitent garder un temps de trajet domicile – lieu de travail inférieur à 1h… Le passage à l’acte pourra donc s’avérer plus difficile qu’il n’y paraît ! »

    >>> À lire : 68% des cadres français voudraient partir au vert

    Cette conception va à l’encontre de l’écologie radicale qui prône au contraire une sobriété tant dans l’espace rural bâti que dans la consommation de déplacements. Les sociologues pointeront aussi ce nouveau style de vie conçu pour des diplômés qui « peuvent se payer des baraques d’enfer au milieu de la verdure et vivre avec les meilleures technologies digitales, » laissant les sans-grades au cœur des villes. De nouvelles inégalités en perspectives !

    Mais Karin Frick se veut au final plus rassurante : « Je ne peux pas imaginer que la politique dans les villes vertes donnera plus d’espace aux voitures. Dès que les gens se sentiront à nouveau en sécurité dans les transports en commun, ils laisseront de plus en plus la voiture dans le garage. » Et on peut espérer un retour au train pour beaucoup, même si le télétravail devait devenir une nouvelle norme…

    cc-byncnd

     

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    • Electric locomotives / Locomotives électriques : HLE20HLE21
    • Diesel locomotives / Locomotives diesel : HLD62-63HLD77-78
    • Electric multiple unit / Automotrices électriques : AM60-70 AM96

    AM60-70

    AM60-NMBS-SNCB

    It’s now an historical rolling stock. Very few of this were running still in 2020, but with the white livery. The SNCB’s class 60 to 70, with 331 Emus built between 1954 and 1978, consisted of an almost unified design, with two bodieshell, its first class and parcels/luggage space. Emu 237, here in Erbisoeul station in July 2004 still in red livery 80’s, is part of the 62/63/65 Class, designating its year of construction. This railcar was scrapped in 2014.

    Du matériel historique, pourtant pas si lointain. La longue série d’automotrices SNCB, 331 exemplaires construits de 1954 à 1978, a consisté en un design quasi unifié, avec deux caisses, sa première classe et son espace fourgon. La 237, ici à l’arrêt d’Erbisoeul en juillet 2004, fait partie de la tranche 62/63/65, désignant son année de construction.Ces tranches furent réformées en 2014. Quelques rares exemplaires étaient encore en service en 2019.

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    AM96

    AM96-SNCB

    The class 96 is an electric multiple unit built in 1996 for Intercity services . They incorporate features from the DSB IC3 trainsets in order to enable passage from one set coach to another. When two or more units are coupled together in a single train, the entire front door folds away to give a wide passage. Two series were built : Class 400 which fitted to run under 3kV DC and 25kV AC, to run in France (Lille, and recently Maubeuge). And Class 500 fitted only to run under 3kV in Belgium and Luxemburg. Class 562 (3kV) passing at Jurbise with a Brussels-Airport-Mons intercity service, February 20, 2013.

    L’AM 96 est une automotrice construite en 1996 pour les services intercity. Elles intègrent les caractéristiques des rames DSB IC3 afin de permettre le passage d’une voiture à l’autre. Lorsque deux ou plusieurs rames sont accouplées pour former un même train, la porte avant (et le poste de conduite) se replie entièrement pour offrir un passage. Deux séries ont été construites : la série 400 qui peut fonctionner sous 3kV DC et 25kV AC, pour circuler en France (Lille, et plus récemment Maubeuge). Et la série 500, qui ne peut fonctionner qu’en Belgique et au Luxembourg sous 3kV. L’AM 562 (3kV) passe à Jurbise avec un service intercity Bruxelles-Aéroport-Mons, le 20 février 2013.

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    HLE21

    HLE21-SNCB

    The Class 21 locomotives is an icon of the SNCB in the 80s. The first locomotives appeared in 1984 and started their service under the first IC/IR plan. They were mainly used for passenger traffic, but their involvement in freight traffic was also a reality. Class 21s were still in service in 2020 but their scrapping has already begun. 

    Les locomotives de la série 21 : une icone de la SNCB des années 80. Les premiers engins sont apparus en 1984 et débutèrent leur service dans le cadre du premier plan IC/IR. Elles seront essentiellement affectées au trafic voyageur mais leur engagement dans le trafic marchandise était aussi une réalité. Fiche technique complète : SNCB locomotives série 21.

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    HLE20

    HLE20-SNCB

    The belgian Class 20 locomotive: the first « thyristors locomotive » carried out of the factory ACEC (Ateliers de constructions électriques de Charleroi – now Alstom Belgium). It was the most powerful engine of the SNCB at the time. It was mainly seen in operation on the difficult Brussels-Namur-Arlon-Luxembourg line, towing long international overnight or freight trains. Here during an special trip at Marloie, just after it ceased operations. All engine were scrapped except one, which is in preservation. 

    La série 20 : une locomotive « tout thyristors » sortie des cartons des ACEC pour booster l’industrie. Ce fut la plus puissante de la SNCB à son époque. On l’a principalement vu active sur la difficile ligne Bruxelles-Namur-Arlon-Luxembourg, remorquant de longs internationaux de nuit ou des trains de marchandises. Ici à Marloie lors d’un voyage spécial PFT, quasi au lendemain de leur mise à la retraite. Une seule machine a été préservée.

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    HLD62-63

    HLD62-63-Infrabel

    At the end of the 1950s, it became apparent that the SNCB needed lighter diesel machines than the previous HLD55 series and ordered two series of four-axle locomotives: the Class 212, delivered in 1961 with electric transmission and which became the 62/63 series, and the Class 213, delivered in 1965, with hydraulic transmission, and which became the Class 65 and then Class 75. About 136 engines were built for operation on the non-electrified lines. Nowadays, only the infrastructure manager Infrabel uses some of them for work trains (photo, Erbisoeul in 2020)

    A la fin des années 50, il était apparu que la SNCB avait besoin de machines diesel plus légères que la série HLD55 précédente et commanda deux séries de locomotives à quatre essieux moteurs : la série 212, livrée en 1961 avec transmission électrique et qui deviendra la série 62/63, ainsi que la série 213, livrée en 1965, à transmission hydraulique, et qui deviendra la série 65 puis 75. Près de 136 machines furent construites pour l’exploitation sur les lignes non-électrifiées. De nos jours, seul le gestionnaire d’Infrabel en utilise encore quelques exemplaires pour des trains de travaux (photo, Erbisoeul en 2020)

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    HLD77-78

    HLD77-78-NMBS-SNCB

    The SNCB Class 77 is a 4 axle B’B’ diesel hydraulic locomotive designed for shunting and freight work. They was manufactured by Siemens Schienenfahrzeugtechnik and later by Vossloh at the Maschinenbau Kiel plant. The locomotives were variants of the standard MaK G1200 series design, and were considered as the MaK G1206 type. 170 engines were built between 1999 and 2005, numbered under Class 77 and 78.

    La série 77 de la SNCB est une locomotive hydraulique diesel B’B’ à 4 essieux conçue pour les manœuvres et le transport de marchandises. Elles ont été construites par Siemens Schienenfahrzeugtechnik et plus tard par Vossloh à l’usine Maschinenbau de Kiel. Les locomotives étaient des variantes du modèle standard de la série MaK G1200, et étaient considérées comme le type MaK G1206. 170 engins furent livrés entre 1999 et 2005, et classés série 77 et 78.

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    More pictures / Davantage de photos :

    2020 catastrophique puis remontée des trafics, selon SCI Verkehr

    Dans son étude «Impact de la crise du COVID-19 sur le secteur ferroviaire en Europe» présentée aujourd’hui par le spécialiste de l’analyse de marché SCI Verkehr, l’impact de la pandémie de coronavirus sur le trafic ferroviaire européen provoquerait une baisse de 30 à 50% du trafic passagers pour 2020 puis une lente reprise. SCI Verkehr a analysé les effets à grande échelle sur les opérateurs, les propriétaires de véhicules et sur l’industrie des véhicules ferroviaires, pour lesquels la firme allemande retient trois scénarios.

    Les restrictions de production et de contact sont en vigueur en Europe depuis mars et l’économie est au point mort dans de nombreux secteurs. Le transport ferroviaire de voyageurs a été directement touché et a baissé de plus de 90%, par exemple en Italie, en France et en Allemagne. Le transport ferroviaire de marchandises est de plus en plus affecté depuis avril et les opérateurs signalent des baisses comprises entre 20% et 35%. Le transport automobile, notamment,  est au point mort, ce qui impacte sur toute la chaîne en amont, notamment en sidérurgie, autre secteur traditionnel du rail.

    L’évolution des choses dans les mois et les années à venir dépend en grande partie de l’évolution de la pandémie, de la durée des fermetures et de la stabilisation de l’économie. SCI Verkehr a formulé diverses hypothèses dans les trois scénarios «Retour des fermetures», «Marchés perturbés» et «Reprise rapide» et a esquissé le développement des performances de transport dans le transport ferroviaire de marchandises et de passagers.

    (source SCI-Verkher)

    Le scénario le plus optimiste montre qu’à l’automne 2021, on devrait avoir atteint un niveau de trafic à peu près identique… à l’automne 2019 ! Le scénario pessimiste est très largement en dessous. Ce qui laisse supposer un retour à la normale pour 2020/2023. Si un nouveau blocage à l’automne est de mise, SCI Verkehr prévoit une baisse du trafic passagers de 40% pour toute l’année 2020, le trafic de fret en Europe continentale diminuera de 10%. Dans ce scénario le plus probable, les experts en SCI vont pus loin et ne s’attendent pas à une reprise au niveau d’avant la crise avant 2023 ou 2024. Autant s’y préparer…

    Le bureau d’étude tient compte du fait que la forte perte de revenus des sociétés de transport voyageurs serait susceptible d’être partiellement compensée par différents programmes gouvernementaux, ce qui permettrait de maintenir ce secteur à flots, mais dans des conditions qu’il reste à définir.

    >>>À lire : L’après coronavirus, le grand retour au rail ?

    De hauts responsables britanniques ont déclaré à la BBC que les ministres souhaitaient une certaine forme de distanciation sociale. Des discussions sont en cours pour essayer de déterminer ce qui pourrait être possible. Le patron d’un opérateur a déclaré que la distanciation sociale de toute nature serait « extrêmement difficile à gérer et à contrôler ». Un autre a déclaré que cette imposition réduirait la capacité d’un train de 70 à 90%. Ce n’est pas une bonne nouvelle pour les réseaux qui mènent à Londres, ni pour tous les trains du quotidiens d’Europe, générateurs de foules chaque matins et soirs, songeons au trafic scolaire.

    En Suisse, le rétablissement des fameux horaires cadencés, fierté du pays, se fait par étape. « Des voyages avec correspondances en continu sont proposés dans la mesure du possible. Les défauts et les ruptures de connexion ne sont pas exclus lors de la première phase. Les CFF prévoient une nouvelle étape d’offre début juin, en fonction des nouvelles mesures d’assouplissement du Conseil fédéral. » En Suisse, la distance de 2 mètres entre les passagers s’applique mais si elle ne peut pas être respectée – par exemple aux heures de pointe – les passagers doivent alors porter des masques (qui n’est pas obligatoire là-bas). Les CFF ne prévoient actuellement pas de masque explicite. En Allemagne, en Autriche et en France, en revanche, les voyageurs doivent se protéger avec un couvre-bouche/nez appropriés. La Belgique a remis une toute grande majorité de ses trains depuis ce 4 mai.

    Par ailleurs, les grandes gares risquent dorénavant de fonctionner en pures pertes, les commerces et établissements horeca restant inaccessibles jusqu’à de possibles levées qui devraient être les dernières.

    (getty image)

    Côté marchandises, les opérateurs du transport de marchandises initialement moins touchés doivent encaisser de faibles marges généralisées. Un manque de fonds d’investissement des chemins de fer aura un impact négatif sur l’achat de matériel roulant et sur le développement des trafics. En dépit de déclarations faisant état du maintien de 60 à 80 % des trains durant la crise, « le rail reste un secteur avec des marges assez basses, et avec 20% de revenus en moins, nous tirons la sonnette d’alarme », explique Paul Hegge, représentant du Belgian Rail Freight Forum.

    Un malheur ne venant jamais seul, on sait aussi que le fret ferroviaire est un secteur d’activité pour lequel tout reste à faire en termes de digitalisation. A l’heure actuelle, les wagons sont encore des équipements purement mécaniques et pneumatiques (pas d’alimentation électrique). Ni les pratiques d’exploitation, ni les services apportés aux clients n’ont évolués au cours de ces dernières décennies. Les pertes de part de marché modales et intermodales, combinées à l’amoindrissement des marges financières des entreprises ferroviaires, brident les capacités d’investissements.

    Pour le court terme jusqu’à la fin de 2021, il semble clair qu’il faudra tenir compte du développement de la pandémie et des restrictions sociales éventuelles qui nuiraient aux taux de remplissage, déjà calamiteux. L’évolution de la situation dans les mois et les années à venir dépendra en grande partie de la poursuite de la pandémie, de la durée des fermetures et de la stabilisation de l’économie.

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    Le nouveau siège social de la SNCB sera réalisé pour 2024

    (photo OMA, Jaspers & Eyers et Assar)

    Il était temps ! L’actuel siège social de la SNCB, le 85 rue de France, va laisser place à un audacieux projet qui sera construit de l’autre côté de la gare du Midi, contre l’avenue Fonsny.

    Hier vendredi, le consortium Besix-BPC/BPI et Immobel a été retenu comme soumissionnaire préférentiel pour réaliser le nouveau siège de la SNCB. Les candidats concurrents étaient Atenor/Eiffage et Jan De Nul/Triple Living.

    Actuellement répartis sur plusieurs sites distincts, tous proches de la gare du Midi, les différentes directions de la SNCB ainsi que HR-Rail seront dorénavant rassemblés dans un seul bâtiment encore à construire, destiné à environ 4.000 collaborateurs. Comme le montre les clichés, le projet semble plus audacieux que prévu. Les trois bâtiments jaunâtres de l’avenue Fonsny, datant des années 50, seraient préservés et rénovés, tandis qu’une audacieuse extension de « type contemporain » leur serait adjoint par dessus les voies 19 à 22.

    La SNCB vendra les quatre sites qu’elle occupe en ce moment, dont le produit ne couvrirait que partiellement la construction nouvelle et les rénovations à l’avenue Fonsny. La blafard 85 rue de France date de… 1974 et n’est plus du tout aux normes actuelles.

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    La voie 22, en cul de sac, vue vers Charleroi. Le nouvel immeuble irait par-dessus les voies 21 à 19, tout à droite (photo Mediarail.be)

    Il ne s’agit ici que du siège social, tandis que la gare en elle-même, hormis les voies 19 à 22 (à confirmer), ne fait en revanche l’objet d’aucun projet à l’heure actuelle. On peut espérer quelque chose mais avec la culture belge des compromis et des demi mesures, il faut toujours être patient… voire se contenter de ce qu’il y a.

    Cela suffira-t-il à booster un quartier qui n’est pas le meilleur du monde en la matière ? Soyons positif. Actuellement, le trottoir qui longe l’ancien tri-postal fait davantage penser à une ancienne capitale soviétique. Peut-être qu’avec un peu de bonne volonté, on en reviendra au statut de capitale verte et accueillante de l’Europe, avec de la restauration, des boutiques, en bref quelque chose de digne. Pourrait-on enterrer les voitures avenue Fonsny plutôt que le tram ? Les détails viendront pour un chantier qui prévoit de démarrer en 2022. Affaires à suivre…

    (photo OMA, Jaspers & Eyers et Assar)

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    (photo OMA, Jaspers & Eyers et Assar)

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    L’AVENUE FONSNY DE NOS JOURS. AU FOND ON DISTINGUE LA GRAND-PLACE ET DERRIÈRE, L’IMMEUBLE FINANCE AU BOTANIQUE. LE SIÈGE SOCIAL COMPORTERA LES IMMEUBLES JAUNÂTRE, À GAUCHE (PHOTO MEDIARAIL.BE)

    Le premier Nightjet est arrivé à Bruxelles

    La 1833 SNCB en tête du premier Nightjet (photo Mediarail.be)

    Comme convenu. Après quelques tests, ce lundi 20 janvier marque le grand retour du train de nuit en Belgique. Le NJ324, numéro du train en Belgique, est arrivé voie 6 à Bruxelles-Midi avec les honneurs d’usage. C’était la 1833 de la SNCB qui tractait la rame depuis Aix-la-Chapelle. Une date qui compte : le dernier train de nuit régulier en date, hors charter vers la neige, était le Paris-Bruxelles-Berlin en 2006, géré par la Deutsche Bahn ainsi que le fameux ‘Jan Kiepura’, en provenance de Varsovie, Moscou et même une voiture de Kiev. Depuis, plus rien…

    Rappelons que ce train est une heureuse initiative de la compagnie publique autrichienne ÖBB qui, pour la bonne cause, dévie le Vienne/Innsbruck – Düsseldorf deux fois par semaine en le faisant bifurquer vers Bruxelles :

    • départ de Vienne les dimanches et mercredis soirs, avec arrivée à Bruxelles les lundis et jeudis en matinée;
    • départ de Bruxelles les lundis et jeudis soir, avec arrivée les mardis et vendredis matin à Vienne.

    But de l’opération : une circulation adaptée aux autrichiens travaillant pour l’Europe afin de rejoindre Bruxelles sans l’avion. Comme le train repart le jeudi soir, on peut imaginer qu’il n’y a plus grand monde à la Commission les vendredis… Pour les belges, et les clients d’Eurostar, cette option est aussi intéressante car elle permet des mini trips comme suit :

    • un week-end à Vienne (arrivée vendredi matin, retour dimanche soir), moyennant deux nuits sur place;
    • un bonne semaine à Vienne (arrivée mardi matin et retour le dimanche soir), soit cinq nuits sur place.
    • voire le séjour express (arrivée mardi matin et retour le mercredi soir…), moyennant une seule nuit sur place. Idéal pour la réunion en milieu de semaine à Vienne…

    Wien ARZ = Vienne Train auto. Mais c’est pour Düsseldorf uniquement, soit les autres jours quand la rame ne vient pas à Bruxelles (photo Mediarail.be)

    Ce schéma se répète évidemment pour la tranche Innsbruck qui lui est associée. Il est aussi intéressant de noter que la tranche vers Innsbruck s’arrête à Munich, en Bavière, certes assez tôt le matin, ce qui permet de poursuivre vers Salzbourg, autre ville d’art autrichienne. Tant Munich que Innsbruck permettent aussi des correspondances vers l’Italie, plus particulièrement Bolzano et Vérone. Le confort à bord a déjà été longuement évoqué dans nos articles précédents.

    >>> Voir notre article complet Nightjet, la renaissance du train de nuit

    Elles ont peut-être 20 ans, mais les voitures-lits de type Confortline demeurent d’excellents véhicules (photo Mediarail.be)

    Le train à partir de Aix-la-Chapelle, où à lieu le changement de locomotive, prend le numéro 324 pour sa desserte belge. Il poursuit sa route via la ligne classique L37 puis Liège-Guillemins. Après quoi il emprunte la LGV L2. Le Nightjet emprunte ainsi deux lignes Nouvelles puisqu’en Autriche, il circule également via la ligne nouvelle entre Vienne et Linz. Après son escale à Bruxelles-Midi, la rame vide se rend au PED de Schaerbeek via la ligne de ceinture L28 pour l’entretien de la journée. Elle reviendra le soir voie 5 pour son retour à 18h04. Ceci pour la journée d’aujourd’hui. Car les autres jours, dès jeudi 23/01, la rame ira se garer à Forest-voitures, plus proche et plus logique par rapport à Bruxelles-Midi.

    Pour l’occasion, la rame avait une composition renforcée, qui totalisait quatre voitures-lits en plus des traditionnelles couchettes et places assises. Le CEO des ÖBB en personne, Andreas Mättha, était à bord et fut accueilli par Sophie Dutordoir, CEO de la SNCB.

    Il reste à espérer une concrétisation plus complète, qui ne pourrait avoir lieu qu’avec l’arrivée de la flotte des nouvelles voitures, lesquelles sont prévues dès 2022 mais en priorité pour l’Italie et ses nouvelles normes d’exploitation dans les tunnels ferroviaires. Les voitures plus anciennes libérées pourraient alors permettre d’autres développement du réseau Nightjet. En attendant, savourons les premières images bruxelloises.

    >>> Voir aussi : Malmö-Cologne comme premier train de nuit Suède-Europe dès 2022 ?

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    Malmö-Cologne comme premier train de nuit Suède-Europe dès 2022 ?


    17/01/2020 – Par Frédéric de Kemmeter – Signalisation ferroviaire et rédacteur freelance
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    🟧 Nos brèves quotidiennes 🟧 Notre lexique ferroviaire 🟧 Nos newsletters 🟧 Nos fiches thématiques

    L’année dernière, le gouvernement a chargé Trafikverket d’enquêter sur les options de fourniture de services de train de nuit aux villes européennes, en tenant compte des heures de départ, d’arrivée et de voyage, de la disponibilité du matériel roulant et de tout problème financier et réglementaire.

    Ce ne sont donc pas aux  SJ (Statens Järnvägar), mais à Trafikverket, le département exécutif du gouvernement suédois qui gère, exploite et entretien notamment le réseau ferré, à qui le gouvernement suédois donna mission de repérer les possibilités de mise en route d’un train de nuit entre la Suède et le Continent européen. On notera aussi avec intérêt que c’est un gouvernement qui est à l’initiative de l’étude, alors que l’exemple autrichien du Nightjet était plutôt une initiative de l’entreprise publique ÖBB.

    Rappelons que depuis juillet 2000, le pont mixte rail/route de l’Øresund relie Malmö et Copenhague, ne nécessitant plus la fameuse traversée en train-ferry qu’un grand nombre d’entre nous a connu jadis. Ces ferries étaient un frein certain au développement ferroviaire car ils allongeaient considérablement le parcours entre Stockholm et Copenhague, malgré une petite heure de traversée. Jadis,une voiture couchette directe montait en été de Paris jusqu’à Stockholm, pour un trajet de quasi 24 heures…

    L’été dernier donc, l’administration suédoise des transports a été chargée par son gouvernement d’enquêter sur les conditions de passation des marchés publics de trains de nuit vers les villes européennes. La mission devait être remise au plus tard au 15 janvier 2020 et sera finalisée pour le 30 avril 2020.

    Service public, mais à minima
    L’opérateur fait évidemment l’objet de toutes les attentions. Trafikverket a déclaré que l’opérateur pourrait être nommé par attribution directe ou par appel d’offres. Bien qu’une attribution directe soit plus rapide, Trafikverket a, en termes bien choisis, estimé que le gouvernement « devra veiller à ne pas ‘surcompenser’ l’opérateur choisi.» En clair, il n’est pas possible d’opérer un train ultra-déficitaire, mais de « l’aider ». Car les aspects juridiques prévalent aussi. Si l’État suédois souhaite soutenir financièrement un trafic de nuit, les réglementations de l’UE qui visent à maintenir la concurrence dans le marché intérieur doivent être respectées. L’attribution directe est une exception à la règle générale, et non pas LA règle générale, et doit donc être justifiée et être appliquée de manière restrictive. L’attribution directe impose des exigences importantes pour vérifier que l’opérateur n’est pas soit pas ‘surcompensé‘ pour le trafic.

    Par ailleurs, l’Allemagne exige ainsi que les services longue distance soient exploités sur une base commerciale, cas de tous ses trains grande ligne, ce qui pourrait empêcher la subvention publique d’un train de nuit, tandis que les autorités régionales de transport n’ont pas de base juridique pour traiter des services internationaux longue distance. C’est d’ailleurs en ce sens que fonctionne les Nightjets exploités par les ÖBB : au prix du marché et de la demande. On sait que le terme ‘subventions’ fait débat s’agissant du montant des péages de l’infrastructure, très variables d’un pays à l’autre. Ceux-ci concerneront de facto la Suède, le Danemark et l’Allemagne.

    L’attribution d’un train de nuit doit au préalable être annoncée au Journal officiel de l’UE (JO) un an à l’avance et la demande de capacité doit être déposée au plus tard en avril 2021. La négociation avec un ou plusieurs opérateurs ne peut commencer que lorsque le marché est annoncé au JO. Ce sont des impositions légales qu’il n’est pas question de contourner.

    >>> À relire : Le mythe du service public ferroviaire

    Bahn Touristik Express (BTE). LA firme de Nuremberg possède de nombreuses voitures-couchettes et opère un train de nuit entre Hambourg et Lörrach, au nord de Bâle. (photo Bahn Touristik Express Gmbh)

    Quelles liaisons ?
    Trafikverket considère qu’un temps de voyage raisonnable avec un train de nuit est estimé à un maximum de 12 heures. Il faut aussi tenir compte du temps de travail du personnel de bord, ce que Nightjet a justement dû mettre au point et qui rajoute une difficulté. Raison pour laquelle Trafikverket entrevoit comme première étape la passation d’un marché avec l’Allemagne et le Danemark, sans aller plus loin. L’enquête a proposé deux alternatives à court terme. L’option qui est principalement recommandée est une liaison entre Malmö et Cologne.

    L’avantage de Cologne est qu’elle ouvre la voie à des échanges rapides vers les parties occidentales du continent européen, notamment Bruxelles et Paris. Le temps de trajet est particulièrement raisonnable. Dans les années 90, une voiture directe circulait encore Copenhague (en face de Malmö) et Ostende. Horaire du train D232 : départ 21h05 de Copenhague, arrivée 7h18 à Cologne, soit une bonne nuit, le tout avec transbordement sur ferry entre Rodby (DK) et Puttgarden (DE). Du passé tout cela, mais cet horaire pourrait être réappliqué. En provenance de Malmö, le trajet serait prolongé d’à peine une demi-heure/quarante minutes via le pont de l’Øresund. Le rapport de Trafikverket propose Malmö départ 19h40 pour une arrivée matinale à 6h00 à Cologne. Horaire théorique…

    Une extension directe vers Bruxelles est considérée comme « beaucoup plus complexe », (on ne voit pas très bien pourquoi…) mais pourrait être envisagé dans le futur. Message à nos chemins de fer belges, qui accueillent ce lundi le premier Nightjet provenant de Vienne ?

    L’étude de Trafikverket a aussi étudié une autre liaison, qui exista aussi jadis quelques années, entre Stockholm et Hambourg. Un train dont le trajet demandait deux transbordements par ferries, entre Helsingör (SE) et Helsingborg (DK), et entre Rodby (DK) et Puttgarden (DE). Horaire à l’époque du D291 : Stockholm 18h30, arrivée à Hambourg Hbf 9h04. Là aussi, une bonne nuit même si l’arrivée est moyennement matinale. Le rapport de Trafikverket propose un départ de Stockholm à 20h00 pour une arrivée à Hambourg à 7h00, ce qui est en soi une sérieuse amélioration par rapport à l’ancien D291 ! De Hambourg, l’Allemagne entière est accessible pour le milieu de journée, en début d’après-midi pour la Bavière, Bâle ou Paris. Les plus tenaces peuvent même atteindre Milan en fin d’après-midi…

    La problématique des sillons
    Les horaires mentionnés sont à prendre avec beaucoup de précautions. Tant en Suède qu’au Danemark et en Allemagne, d’importantes mesures d’investissement et de maintenance sont prévues pour les 10 prochaines années pour les infrastructures pour améliorer à long terme la capacité des réseaux. Comme la maintenance/rénovation/(re)construction s’effectue de nuit, il y a un risque d’impact négatif sur la capacité en raison des coupures totales, des déviations et/ou des réductions de vitesse.

    Le traditionnel compartiment à trois lits, avec lavabo privatif. Un classique…

    Matériel roulant
    Le matériel roulant qui répond aux exigences techniques et qui est acceptable pour ce type de trafic est actuellement considéré comme une pénurie. Nightjet lui-même a dû passé commande et a rafflé en attendant une bonne partie du parc de la Deutsche Bahn. Le gabarit suédois est un peu plus large que les gabarits du Danemark, d’Allemagne et de Belgique, ce qui signifie que les véhicules ferroviaires optimisés pour le gabarit suédois ne peuvent pas être introduits dans ces pays. Une exception en Allemagne est la ligne Sassnitz – Berlin, où le profil adapté permet à l’opérateur Snälltåget, une marque liée à Transdev, d’opèrer un train de nuit privé estival entre Malmö et Berlin et vers le nord de la Suède. L’option d’un achat de matériel neuf prend du temps. À court terme, l’enquête estime que la meilleure voie celle d’un opérateur qui fournit des véhicules.

    Le(s) tractionnaire(s) doivent eux aussi être trouvé, mais à priori cela poserait moins de problèmes. C’est par exemple Hektor Rail, un tractionnaire suédois dans le fret, qui fournissait jusqu’il y a peu la traction sur les Flixtrain Stuttgart-Berlin, gérés par Leo-Express.

    L’acquisition du matériel roulant est aussi fonction du niveau de confort souhaité. Nightjet a visé haut et offre trois gammes de confort :

    • voitures places assises (par compartiments de 6 places);
    • voitures-couchettes (par compartiments de 4 à 6 couchettes);
    • voitures-lits Confortline, compartiments jusqu’à trois lits, certains dotés d’une douche/toilette privative.

    Le service à bord compte pour beaucoup : le petit-déjeuner du matin – ainsi que les collations du soir -, est un must qui a fait la réputation des autrichiens. Cela impose un service de catering très élaboré. Chez Nightjet, c’est la société Newrest Austria qui s’en occupe, avec du personnel privé de cette société. Que veulent les scandinaves ? Un service plus léger, sans chichis ? Quel public vise-t-on ? Tout cela impacte fortement sur les revenus et la couverture des coûts.

    >>> À lire : Nightjet, la renaissance du train de nuit

    À destination, le train est garé en journée dans un faisceau de garage où du nettoyage et le service hôtelier (literie,…) doit être possible pour le service du soir au retour. Tout cela demande beaucoup plus de préparation qu’un simple train de jour, TGV ou non.

    Trafikverket remettra son rapport définitif en avril prochain et nous pourrons alors voir comment la Scandinavie va traiter ce sujet en pleine vague climatique. En attendant, ce lundi, le Nightjet arrive à Bruxelles, avec le confort qu’on lui connait déjà…

    Le rapport intermédiaire de Trafikverket est disponible à ce lien

    Le Berlin-Malmö du privé Snälltåget, en sous-sol de la gare centrale de Berlin Hbf, un soir d’été (photo Tobias B Köhler via wikipedia)

    17/01/2020 – Par Frédéric de Kemmeter – Signalisation ferroviaire et rédacteur freelance
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    Le Léman-Express entre en exploitation ce dimanche


    13/12/2019 – Par Frédéric de Kemmeter – Signalisation ferroviaire et rédacteur freelance
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    Le Léman Express est né d’une problématique majeure de la région de Genève : les déplacements transfrontaliers. Genève (205.000 habitants) est en effet non seulement une ville très internationale, mais elle est aussi frontalière avec la France. Si on prend en compte l’attractivité régionale de Genève, il faut compter un bassin de population d’environ 920.000 personnes, ce qui est important.

    Genève est une ville, un centre financier et un lieu de diplomatie de niveau mondial du fait de la présence de nombreuses organisations internationales, notamment le siège de nombreuses agences des Nations Unies et de la Croix-Rouge. Genève abrite le plus grand nombre d’organisations internationales au monde. Son attractivité est donc très forte.

    La topographie de la région, à l’ouest du lac Léman, est un ensemble de paysages très vallonnés sans être spécifiquement montagneux. Le problème est alors que Genève n’est accessible que par un nombre restreint de voies routières et ferroviaires.

    Seuls 16 % des 550.000 déplacements transfrontaliers quotidiens en 2015 s’effectuent en transports en commun, faute d’une offre efficace et cohérente des deux côtés de la frontière. L’emploi de la voiture par une grande majorité de frontaliers provoque une saturation du réseau routier aux heures de pointe.

    (photo Marc Mongenet via wikipedia)

    Une histoire difficile
    Disons-le sans détour : le Léman Express est un projet principalement porté, conçu et financé par les suisses, sur le territoire suisse. Les français sont restés relativement discrets sur ses prolongements en région Rhône-Alpes.

    Le Léman Express est une très vieille histoire. En 1881, Suisses et Français signaient une convention pour réaliser une liaison entre Genève et Annemasse. La liaison Cornavin-Eaux-Vives-Annemasse (CEVA), rebaptisée Léman Express, est le fruit d’une histoire qui commence… en 1912. La Confédération signe alors avec Genève une convention qui détermine le tracé du futur train ainsi que la répartition des investissements nécessaires. Pendant des dizaines d’années, il ne va rien se passer.

    Il faut voir le Léman Express comme une partie seulement d’un projet politique bien plus vaste : le Grand Genève. Marier un bout de la Suisse romande avec la France voisine a pu paraître attrayant au début des années 2000. Ce fut en réalité très difficile.

    Les deux « pères » du Grand Genève, Robert Borrel, ex-maire d’Annemasse, et Robert Cramer, ex-conseiller écologiste d’Etat genevois, ont procédé par étapes pour bâtir le Grand Genève, dont la plus belle réalisation est le Léman Express. « On a commencé par les contrats de rivière parce que c’est commun à tous, si l’eau est sale ici elle est sale là, idem pour la gestion des déchets et puis enfin les transports », raconte Robert Cramer au journal Le Temps.

    Ce fut pourtant très difficile. 1996 : un projet de traversée routière de la rade fut refusé par les électeurs (la fameuse démocratie citoyenne suisse…). 1998 : projet de métro léger est lui aussi recalé. En 2002 : il y eut enfin l’adoption du projet de loi ouvrant un crédit de 400 millions de CHF pour le financement de la part cantonale du CEVA. Tout cela dans une ambiance morose. Il y aura beaucoup d’oppositions du côté suisse – de la part de partis politiques tout comme certains riverains comme ceux de Champel qui croyaient qu’un TGV passerait à 3 mètres sous leur lit – et un flagrant manque d’enthousiasme côté français. Le maire d’Annecy (F), par exemple, a toujours accusé Genève de siphonner la main-d’œuvre française, explique Robert Borrel. Il a fallu aussi faire front face au mécontentement de certains résidents de Genève, craignant que le RER amène sur le sol suisse encore davantage de dealers et d’autres « personnes indésirables ». Un sujet classique accentué par la montée en puissance des réseaux sociaux et des fake news…

    En 1994 seulement, le Rhône Express Régional, classée comme un train Regio (R) en Suisse, est inauguré entre la gare de Genève-Cornavin et celles de La Plaine (CH) et de Bellegarde (F). Ce service ferroviaire urbain utilise alors des automotrices bi-modes CFF Bem 550 (photo) construites par les Ateliers de constructions mécaniques de Vevey (et similaires aux rames de la ligne M1 du métro de Lausanne). Le terminus de La Plaine est repoussé, en 2001, jusqu’à Bellegarde, en France.

    Ce service ferroviaire n’est cependant pas à la hauteur des espérances et reste bien loin du concept de RER. Un changement d’alimentation électrique et des opérations d’entretien jugées trop lourdes ont mis fin à l’expérience des Bem 550, qui furent toutes ferraillées en 2015.

    (photo wikipedia)

    Les débuts du CEVA
    On retient la véritable date du projet CEVA transfrontalier par un protocole d’accord signé le 29 mars 2008, et qui implique notamment l’Office fédéral des transports (Confédération suisse), le canton de Genève, le canton de Vaud, la région Auvergne-Rhône-Alpes (Rhône-Alpes avant 2015), les CFF (Chemins de fer fédéraux suisses), la SNCF (Société nationale des chemins de fer français) avec ses branches mobilité et réseau. Le cheminement du projet a reçu une DAP (décision d’application des plans) par l’OFT (Office fédéral des transports) en mai 2008. Mais cette DAP fut combattue ensuite par divers recours augmentant la facture, rejetés dans leur ensemble par le Tribunal administratif fédéral le 15 juin 2011 au terme de trois ans de procédure puis par le Tribunal fédéral le 15 mars 2012.

    Des travaux, malgré tout
    On croit souvent, dans certains milieux « alternatifs », que l’utilisation des voies existantes peut suffire à exploiter un service ferroviaire de qualité. Cette théorie est souvent contredite par les faits. Il n’était pas question de créer un réseau lowcost à l’aide de solutions baroques qui n’auraient pas eu d’impact sur le transfert route-rail…

    Avant l’engagement des chantiers, quelque 80 bureaux d’études et ateliers (ingénieurs, architectes, spécialistes en sécurité) ont participé à leur finalisation technique. A cette occasion, la société Transferis, commune à la SNCF et aux CFF, est créée. Basée à Annemasse, sa mission première est de travailler à la construction de l’offre du futur Léman Express (le réseau express régional franco-valdo-genevois) et de sa promotion. Elle disparaît à la fin de l’année 2016, remplacée par Lémanis, une filiale commune des CFF (60 %) et de la SNCF (40 %) basée à Genève, qui en reprend les principales missions.

    Tunnel de Champel en 2013 (photo Babsy via wikipedia)

    De manière globale, la ligne CFF créée en 1949 a dû être entièrement réaménagée jusqu’à Annemasse. Il y avait moins de travaux sur la ligne vers Bellegarde. Vers Annemasse, le Léman Express circule ainsi majoritairement en tunnel sous la colline de Champel puis franchit l’Arve par un viaduc entièrement rénové. A partir de la gare de Genève Eaux-Vives, l’ancienne ligne française à voie unique a été mise à double voie et en tranchée couverte. De la frontière française à Annemasse, le tunnel prend fin et la voie a été rénovée jusqu’à la gare d’Annemasse.

    L’ensemble des travaux de génie civil furent répartis sur 28 lots distincts. Les 14 km réalisés sur le territoire suisse sont jalonnés par cinq stations, deux ponts (Arve et Seymaz), deux tunnels (Pinchat et Champel) et plusieurs tranchées couvertes. Ces ouvrages ont été réalisés dans un environnement urbain dense et contraint qui a influé sur les techniques mises en œuvre. Les travaux furent lancés fin 2011 et ont mobilisé en moyenne 44 entreprises ou bureaux d’études. Le chantier avait été évalué à CHF 1,57 milliard financé à hauteur de 56% par la Confédération Suisse, à 44% par le canton de Genève.

    Route du Chêne, Genève, en août 2019 (photo bus-tram-geneve via flick)

    En France, les travaux ont été lancés en 2015 sous maîtrise d’ouvrage SNCF pour un montant de 234,2 millions d’euros assumée par 13 partenaires. Ils ont porté principalement sur les 2 km de double voie ferrée, enfouie entre Annemasse et la frontière, la modernisation des lignes Annemasse-Evian et Annemasse-La Roche, la suppression de trois passages à niveau. A cela s’ajoutait un programme de modernisation (accessibilité, éclairage, rallongement de quais…) de 18 gares de Haute-Savoie pour un montant de 13 millions d’euros.

    Les équipements ferroviaires ont été testés en juin 2019 et le matériel roulant depuis juillet.

    Matériel roulant
    Aspect le plus visible d’un réseau ferroviaire, le matériel roulant n’est pas uniforme : les préférences nationales ont joué un plus grand rôle que le service à fournir. Les suisses préféraient leur rames Stadler Flirt, un matériel qui ne circule pas en France et qui est en concurrence frontale avec les Coradia d’Alstom. Malgré que le projet soit essentiellement situé sur le sol suisse, les deux pays ne sont pas parvenus à s’entendre sur un sujet jugé très politique. En France, aucune région n’aurait eu l’idée d’acheter suisse.

    Le matériel roulant du Léman Express est donc divisé en deux lots distincts :

    • 23 rames Stadler Flirt RABe 522 pour les CFF ;
    • 17 rames Alstom Regiolis Z 31500 pour la SNCF.

    Toutes les rames peuvent circuler d’un pays à l’autre. Les trains se distinguent par quelques différences extérieures et intérieures, mais ils portent les mêmes couleurs : le rouge et le blanc communs aux deux pays, ainsi que le bleu français. Lors des négociations, Genève aurait voulu voir son jaune et son noir figurer sur la proue des véhicules. Cette idée a finalement été abandonnée.

    En France, la région Auvergne-Rhône-Alpes a investi 420 millions d’euros pour l’achat à Alstom des 27 rames Régiolis qui circuleront sur ce nouveau réseau. Les trains Coradia Polyvalent Léman Express sont issus de la gamme Coradia d’Alstom, dont 348 rames ont été vendues à 9 Régions françaises.

    Coradia Z31500 de la SNCF en gare d’Annemasse, vues ici en septembre 2019 (photo bus-tram-genève via license flickr)

    Tarification
    On ne peut pas parler de RER transfrontalier sans parler de tarification multimodale. Jusqu’à récemment, les suisses et français des environs de Genève vivaient avec la communauté tarifaire franco-valdo-genevoise nommée Unireso. Mais à l’occasion de la mise en service du Léman Express, un nouveau système de tarification multimodal fut révélé le 19 juin 2019 sous le nom de Léman Pass, et remplace les anciennes zones régionales d’Unireso revue et adaptée avec des diminutions de prix pour les courts trajets et des hausses pour les longs trajets, engendrant en Suisse des mécontentements du côté de Nyon.

    Le Léman Express va créer une offre ferroviaire attractive avec, aux heures de pointe, un train toutes les dix minutes entre Genève et Annemasse. Mais son impact sur le trafic voyageur reposera aussi sur l’offre de stationnement et les parkings relais proposés aux frontaliers.

    Paradoxalement, le Léman-Express est inauguré au moment où les deux patrons, de la SNCF et des CFF, quittent leur poste de CEO. « C’est un chef-d’œuvre, un record d’Europe, mais c’est le projet le plus complexe que j’aie jamais vu », résume Andreas Meyer, CEO des CFF. Il attribue sa réussite, au terme de huit ans de travaux, à la volonté de collaboration des CFF et de la SNCF et à l’esprit d’ouverture de l’ancien patron du rail français, Guillaume Pepy.

    Rendez-vous dimanche sur fond de grèves et de tensions sociales sur les parties françaises, une « chose » que l’on ne connaît pas en Suisse…

     

    13/12/2019 – Par Frédéric de Kemmeter – Signalisation ferroviaire et rédacteur freelance
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