SNCF : réduction confirmée du réseau de trains de nuit

21/07/2016

Il semble bien que la fin des trains de nuit se précise pour de bon. Un texte présenté ce jeudi par le Secrétaire d’Etat Alain Vidalies prévoit, notamment, de ne plus financer six lignes de nuit, estimant qu’elles « bénéficient d’offres alternatives de mobilité de bon niveau, ou qui vont prochainement s’améliorer avec la mise en service des nouvelles lignes à grande vitesse ». Cela signifie que sauf accord de financement dans les dernières semaines avec les régions ou arrivée d’un repreneur privé, quatre des huit lignes SNCF de nuit en France fermeront au 1er octobre prochain, dont notamment la liaison Paris-Austerlitz/Toulouse/Rodez/Carmaux/Albi. Des exceptions : tant que la LGV SEA n’est pas mise en service, la liaison Paris-Tarbes-Irun (via Toulouse) reste maintenue. « Des discussions sont en cours avec la région Occitanie et la SNCF » pour Paris-Toulouse-Cerbère. Paris-Briançon reste maintenu, ainsi que la liaison Paris-Nice qui bénéficie, depuis début juillet 2016, des nouvelles voitures-couchettes…russes RZD.

Pour compenser ces mauvaises nouvelles, « La SNCF lancera d’ici la fin de l’année, à la demande de l’État » un appel d’offres pour acquérir de nouveaux trains destinés au service de jour sur trois lignes Intercités « structurantes ». A savoir : Paris-Clermont-Ferrand, Paris-Limoges-Toulouse et Bordeaux-Toulouse-Marseille. Ces nouveaux trains devront pouvoir rouler à 200 km/h. Une option pour « un matériel plus rapide, apte à circuler sur les lignes à grande vitesse » (LGV) sera incluse pour la liaison Bordeaux-Marseille, a précisé le secrétaire d’État aux Transports, faisant référence au projet de LGV Bordeaux-Toulouse. Mais le choix d’un appel d’offres pour ces nouveaux trains font planer un risque de « trou de production » dans les usines françaises. Message reçu cinq sur cinq par l’Etat stratège qui aidera son industrie nationale par un « renouvellement complet (…) à partir de 2017 » des trains sur trois autres lignes Intercités (Nantes-Bordeaux, Nantes-Lyon, Toulouse-Hendaye) « sur la base du marché existant entre la SNCF et Alstom ». 

Un Cerbère-Paris (photo FantaRail via flickr CC BY-NC-ND 2.0)
Un Cerbère-Strasbourg pas vraiment long, en mai 2016 (photo FantaRail via flickr CC BY-NC-ND 2.0)

Le sujet des Intercités n’en finit pas de peser sur la politique ferroviaire française. « A chaque fois qu’un voyageur emprunte un train de nuit, la collectivité verse 100€ de subventions. C’est au-delà du raisonnable ». Et d’ailleurs, « l’Allemagne a annoncé l’arrêt des trains de nuit, pour les mêmes raisons », appuie encore le secrétaire d’État. Il est vrai que les voisins de l’hexagone sont aux prises avec des problèmes identiques. Les trains de nuit disparaissent aussi en Allemagne. En revanche, l’Autriche réétudie le concept (voir cet article) et la Grande-Bretagne renouvelle son unique liaison Londres-Ecosse, tandis que les russes poursuivent leur Moscou-Nice et Moscou-Paris (voir à ces pages).

Il aurait été intéressant de s’inquiéter sur les causes de la désaffection des intercités, et des trains de nuit en particulier. Ceux-ci permettent d’arriver très tôt à destination, mais à l’évidence, cette faculté n’a plus l’importance d’hier. Arriver à 5h51 à Tarbes, et c’est une ville endormie qu’on découvre, sans compter que pour la chambre d’hôtel, en saison, va falloir attendre midi pour en avoir une de disponible. Mais il y a d’autres raisons plus techniques, que Lionel Steinmann rappelait déjà dans cet article de 2014 : le trafic a été sévèrement chahuté par la forte augmentation des chantiers de rénovation des voies. Pour pénaliser le moins possible de voyageurs, ces travaux sont réalisés la nuit. Dans certains cas, faute d’avoir la certitude qu’elle pourrait faire circuler le train malgré les travaux, la SNCF n’a ouvert les réservations que quelques jours avant le départ, alors que la clientèle des trains de nuit est celle qui anticipe le plus ses achats. « Du coup, certains trains ont circulé quasiment à vide », rapporte un cheminot. Certaines liaisons sont suspendues pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Quand le service est rouvert, une partie de la clientèle a pris d’autres habitudes et ne revient pas. Et la concurrence très agressive des compagnies aériennes low cost ne fait qu’accentuer la tendance, rappelle le journaliste.

Certes, mais pas seulement les compagnies aériennes. Les autoroutes rapides et le renouvellement du parc automobile français ont répandu le voyage de nuit…en auto. C’est moins cher pour le porte-feuille du citoyen (croit-il), qui oublie que la route ne paie jamais ses coûts complets et qui se fiche du caractère écologique du rail (voir à ce lien). Alors ? Il y a un concept à revoir, sans engloutir un océan de subsides…

 

Publié par

Frédéric de Kemmeter

Cliquez sur la photo pour LinkedIn Analyste ferroviaire & Mobilité - Rédacteur freelance - Observateur ferroviaire depuis plus de 30 ans. Comment le chemin de fer évolue-t-il ? Ouvrons les yeux sur des réalités plus complexes que des slogans faciles http://mediarail.be/index.htm

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