La semaine de Rail Europe News – Newsletter 038

Du 16 au 22 juin 2021

L’actualité ferroviaire de ces 7 derniers jours.

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Trafic grande ligne

Avlo-espanaEspagne – Démarrage du service low cost Avlo de la Renfe – Avlo, le nouveau service à grande vitesse low cost de la Renfe a débté ses services ce mercredi 23 juin, avec quatre circulations quotidiennes dans chaque sens entre Madrid et Barcelone et avec des prix allant de 7 euros par trajet. L’Avlo est en réalité une rame S112 Talgo monoclasse d’une plus grande capacité, avec 438 sièges par train (soit 20 % de sièges supplémentaires), pour une vitesse identique de 300km/h. Les trains disposent du Wi – Fi et utilisent de l’électricité provenant de sources 100% renouvelables. Les convois n’ont pas de service de bar mais des distributeurs automatiques , ce qui permet de gagner des places. Les temps de trajets oscillent entre 2h30 et 3h17, selon les arrêts desservis. La Renfe veut frapper fort et contrer l’offensive de la SNCF qui a lancé son propre TGV low-cost Ouigo en mai dernier sur le même trajet avec des prix démarrant à 9 euros, sur 87% des trains. Les 1000 premiers billets AVLO, mis en vente en janvier 2020 pour 5 euros, étaient partis en une heure. ce mercredi, sept des huit trajets prévus étaient déjà sold-out et il ne restait plus que 68 places dans le train Barcelone-Madrid de 21h10 avec arrêt à Saragosse. Autrement dit, les rames Avlo démarrent en fanfare avec 3.496 vendus sur 3.564 sièges, soit 98%. dimanche prochain, la Renfe ferait circuler des rames en UM (unité multiple), formant des trains de 876 places. Rappelons que la libéralisation espagnole utilise un concept original avec des lots de trafics encadrés. Pour ne pas tuer l’opérateur national Renfe, l’Espagne choisi une libéralisation encadrée par lot de trafic. Trois lots étaient mis aux enchères et la SNCF hérita du plus petit, avec 5 aller-retour sur trois lignes. Trenitalia a emporté le lot 2 avec Ilsa et la Renfe le premier et plus important lot.
>>> El Periodico.com – Renfe estrena el Avlo con viajes entre Madrid y Barcelona desde 7 euros

ICE-4-DBAGFrance – Newrest Wagons-Lits remporte l’appel d’offres pour la restauration à bord des TGV – Newrest a annoncé la semaine dernière le renouvellement de son partenariat avec SNCF dans le cadre des services de restauration à bord et à terre des TGV Inoui, Intercités et Alléo. Créé en 1996, le Groupe Newrest est présent dans 57 pays avec 29.500 collaborateurs et travaillent notamment dans les trains, dont les Nightjets des ÖBB. Le groupe avait réussit une percée dans le ferroviaire français dès 2010 en évinçant la Compagnie des Wagons-Lits – partenaire historique de la SNCF depuis toujours. Depuis 2013, Newrest Wagons-Lits en France gère l’ensemble de la restauration à bord et des services associés sur les trains TGV interurbains et à grande vitesse du groupe SNCF et d’Alléo (une joint-venture entre la SNCF et la Deutsche Bahn). Le partenariat avait ensuite été renforcé en 2016 quand la SNCF lui avait confié la logistique – production, avitaillement… – pour les trains TGV, iDTGV, Intercités et Alleo. Newrest Wagons-Lits, en charge de l’équipement des trains, prépare, gère et stocke tous les produits nécessaires au bon fonctionnement des services à bord et au confort des passagers. La société est aussi présente chez d’autres opérateurs comme ÖBB, Thalys, Caledonian Sleeper ou Eurostar. Le pôle ferroviaire en Europe compte plus de 2.900 personnes qui servaient chaque jour près de 31.000 repas, hors pandémie. Le groupe s’occupe de la chaîne complète avec les prestations logistiques du catering, incluant des services de diagnostic et de contrôle avant le départ. Le prestataire Facilit’rail France gère quant à lui les opérations « sol ». Pour la SNCF, il s’agit de trouver la meilleure formule pour un secteur qui est généralement perçu comme une perte récurrente.
>>> Newrest pressroom – Newrest renews its rail catering partnership with the SNCF

Trafic régional

DanemarkDanemark – Aides d’état autorisées par l’Europe pour les opérateurs ferroviaires – La Commission européenne a autorisé un régime d’aide danois de 24 millions € (environ 178 millions de DKK) pour aider les entreprises proposant des services ferroviaires voyageurs dans le cadre de l’épidémie de coronavirus. Le programme, qui inclus tous les opérateurs y compris privés, doit les aider à faire face à la chute des trafics dû à la pandémie. Il se compose de deux mesures distinctes. La première est une aide limitée aux entreprises ferroviaires éligibles, qui sont confrontées à une crise soudaine de liquidités. La deuxième mesure soutient les coûts fixes non couverts des prestataires de transports publics qui ont dû restreindre leurs activités commerciales en raison de l’épidémie de coronavirus. Dans le cadre de cette mesure, les bénéficiaires peuvent bénéficier de l’aide s’ils enregistrent une baisse de leur chiffre d’affaires d’au moins 30 % au cours de la période comprise entre le 1er septembre et le 31 décembre 2020 par rapport à la même période en 2019. La Commission a constaté que le régime danois respectait toutes les conditions de l’encadrement temporaire. En particulier pour la première mesure, comme prévu dans le cadre temporaire, le financement ne dépassera pas 1,8 million € par bénéficiaire. Pour la deuxième mesure, comme prévu dans le cadre temporaire, l’aide ne dépassera pas 10 millions € par bénéficiaire. Pour les deux mesures, le soutien est accordé jusqu’au 31 décembre 2021. La Commission a conclu que, conformément à l’article 107, paragraphe 3, point b), et aux conditions de l’encadrement temporaire, les mesures sont nécessaires et proportionnées pour remédier à une grave perturbation de l’économie d’un État membre.
>>> Lok-report.de – Europäische Union: Kommission genehmigt dänische Regelung zur Unterstützung von Anbietern öffentlicher Personenverkehrsdienste auf der Schiene

Trafic fret

Ikea-EspanaEspagne – Ikea parie sur le chemin de fer pour le transport entre le port de Barcelone et Tarragone – Ikea prend le train et a choisi de transférer des volumes routiers vers le rail sur très courte distance entre le port de Barcelone et Tarragone. Cette solution intermodale, gérée et opérée par APM Railways (groupe Maersk), réduirait de 75 % l’empreinte d’Ikea ​​Supply Chain Operations dans ce flux de transport, puisque le volume annuel prévu pour ce service est de 10.000 conteneurs. Avant le début du projet en septembre 2020, le trajet du port de Barcelone à l’entrepôt de distribution Ikea de Valls (Tarragone), était entièrement effectué par camion. Ce centre logistique du géant suédois est depuis longtemps géré par Marsk Logistics, une filiale du numéro un mondial du conteneur. En 2016, l’agrandissement du centre de distribution portait la surface à 122.000 m2 pour un volume de 180.000 m3. Pour la gestion opérationnelle du centre, Maersk Logistics rehaussait alors ses effectifs à 280 personnes. Le volume quotidien moyen combiné d’entrées et de sorties atteint environ 120 véhicules par jour pour approvisionner 24 magasins en France, en Espagne et au Portugal, et d’autres entrepôts. Le charrois routier est aussi justifié par les 30 kilomètres avec le terminal ferroviaire Mercaderies Tarragona. La distance ferroviaire jusqu’à Barcelone est d’à peine 100km, mais avec cette opération courte distance, Ikea Supply Chain Operations « réduirait son effet de serre dans ses transports longue distance en Espagne d’environ 700 tonnes par an », a indiqué le groupe danois Maersk. Cette solution rappelle celle déjà eploitée par Maersk entre l’APM Terminals de Vado Ligure vers le centre de distribution Ikea de Piacenza. La responsable du développement durable d’Ikea Supply Chain Solutions, Elisabeth Munck, a souligné que l’objectif de l’entreprise suédoise « est d’être positive sur le plan climatique d’ici 2030. Cela se traduit par une réduction de 70% en moyenne des émissions de chaque transport que nous effectuons ». Elisabeth Munck a souligné que l’entreprise « croit en un portefeuille diversifié de solutions pour décarboner le transport » et a insisté sur le fait que c’est « grâce à des collaborations innovantes et à des partenariats étroits avec nos prestataires de services, tels que Maersk, que nous pouvons prendre les mesures nécessaires pour atteindre notre objectif ».
>>> El Mercantil – Ikea apuesta por el ferrocarril para el transporte entre el puerto de Barcelona y Tarragona

GB RailfreightGrande-Bretagne – GB Railfreight fait revivre un terminal abandonné dans les Midlands – GB Railfreight, l’une des principales sociétés de fret ferroviaire du Royaume-Uni vient de relancer un ancien terminal sidérurgique abandonné. Le site de Stanton Gate a récemment été acquis par Verdant Regeneration, une coentreprise entre Ward (une importante entreprise de déchets, de recyclage et d’assainissement basée à proximité de Chesterfield), et Trust Utility Management. L’équipe a l’intention de transformer cette ancienne aciérie – l’un des plus grands sites de développement potentiel des East Midlands – en un centre national de distribution, de logistique et de fret ferroviaire florissant pour les Midlands, qui devrait s’appeler New Stanton Park. Plus tôt dans l’année, des essais avaient été effectués sur le site pour démontrer la capacité à exploiter des services en vrac moyennant d’importants travaux d’infrastructure. L’équipe de GBRf avait montré qu’elle pouvait fournir des services dans un court laps de temps et qu’elle ne reculerait devant rien pour répondre aux demandes des clients. GBRf a donc pris une commande tardive de Ward pour un transport de plus de 1400 tonnes de ferrailles vers le port de Immingham. Opération réussie. C’était la première sortie d’un train depuis 2009. Carl Kent, Head of Sales chez GB Railfreight explique :« L’acquisition d’un site aussi vaste par Verdant JV contribuera à insuffler une nouvelle vie à la zone locale et nous espérons de nouvelles opportunités pour le fret durable par rail. L’engagement dont Ward a fait preuve pour développer un nouveau fret ferroviaire est impressionnant et nous avons travaillé avec eux pour répondre rapidement à leur demande. Si toutes les parties concernées s’engagent et travaillent en collaboration, il n’y a aucune raison pour que la mise en place d’une nouvelle activité de fret ferroviaire à partir d’une zone de fret dormante prenne plusieurs mois ou années. » Un bel exemple de revitalisation.
>>> GB Railfreight pressroom – GBRf runs first Stanton Gate service since 2009 for Ward

Infrastructure

Napoli-BariItalie – Webuilt remporte un contrat sur la ligne nouvelle Naples-Bari – On en parlait déjà la semaine passée. Webuilt, comme son nom de l’indique pas, est le nouveau groupe né en 2020 de Salini Impregilo et est un acteur mondial de grands travaux et d’infrastructures complexes. Il avait remporté la ligne du Texas avec un partenaire américain. Cette fois c’est en terres italiennes que le groupe signe un autre chantier. Il a en effet remporté un contrat pour la conception et la construction de la section Orsara-Hirpinia de la ligne à grande vitesse Napoli-Bari, pour un montant de 1,075 milliard d’euros. Les travaux, qui seront géré par Webuild pour le compte de RFI, seront réalisés par un consortium dans lequel le Groupe est leader à 70% aux côtés du partenaire Pizzarotti (30%). Ce nouveau résultat fait suite à l’attribution récente d’un autre tronçon de 11,8 kilomètres de la même ligne entre Orsara et Bovino pour une valeur de 367,2 millions d’euros. Le contrat pour la section Orsara-Hirpinia s’inscrit dans le cadre de la modernisation de la voie ferrée entre Naples et Bari pour la préparer à faire partie du cinquième corridor du réseau transeuropéen de transport (RTE-T) qui relierait Helsinki à La Valette. Le projet de chemin de fer a été identifié comme une priorité en vertu du décret gouvernemental « Sblocca Italia » (littéralement « Déverrouiller l’Italie ») qui concerne des investissements d’infrastructures stratégiques. La nouvelle section Orsara-Hirpinia d’environ 28 kilomètres est en réalité composée d’un tunnel de… 27 kilomètres, ce qui explique l’addition. Conçue pour 250km/h, la ligne à grande vitesse Naples-Bari réduira de moitié environ le temps nécessaire pour voyager entre Naples et Bari, à seulement deux heures.
>>> Webuilt pressroom – Sustainable mobility in Southern Italy: Webuild Group wins €1.075 bln contract for Orsara-Hirpinia section of Naples-Bari High-Speed Railway

Prochaine livraison : le 30 juin 2021

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L’engorgement des ports britanniques désorganise les flux ferroviaires

15/12/2020 – Par Frédéric de Kemmeter – Signalisation ferroviaire
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Le plus grand port à conteneurs du Royaume-Uni est tellement encombré qu’il peut avoir une influence sur les flux ferroviaires à l’intérieur du pays. Explications.

Mais que se passe-t-il dans les ports britanniques ? A l’origine, un nouveau système informatique de gestion portuaire installé à Felixstowe en 2018 et qui a eu un impact négatif sur les transporteurs qui opèrent dans l’hinterland, tant pour les routiers que les trains. Il faut comprendre le système des conteneurs maritimes pour se faire une idée du problème. Quand vous emmenez à l’intérieur des terres un conteneur, il faut le ramener le plus rapidement au terminal portuaire d’origine, sous peine de pénalités appelés « surestaries  » (indemnités dues lorsque l’affréteur dépasse les délais impartis de location du conteneur). Le conteneur doit donc au plus vite revenir au port d’arrivée et au passage, ce système provoque des milliers de parcours à vide particulièrement anti-écologiques. La rotation ainsi que la collecte des conteneurs « import » (d’Asie ou autre), est géré à Felixstowe par le logiciel Vehicle Boarding System, apparemment contesté par beaucoup. A cela se sont ajoutés divers facteurs propres à 2020, liés au retard des navires et aux dockers qu’il a fallu confiner lors de la première vague.

Logistics UK, l’association professionnelle britannique de la logistique, a déclaré qu’il y avait eu récemment un énorme pic du volume de conteneurs entrant dès l’été, lorsque le premier déconfinement du Royaume-Uni fut enclenché et que les entreprises ont augmenté leurs commandes. Plus récemment, les entreprises se sont focalisées sur le 1er janvier et son incertitude liée à la fin de la période de transition du Brexit. Ces incertitudes ont provoqué un surabondance de conteneurs sur les quais de Felixstowe, à un point tel que des navires prévus doivent compter une attente de… 10 jours ! L’impact sur les petits commerçants, déjà durement touchés par la pandémie, est considérable : «nous sommes en rupture de stock de nos produits les plus vendus et nous n’avons pas été en mesure de lancer les promotions pour Noël (…) Nous avons commandé à temps – mais nous ne pouvons pas accéder au stock car le navire ne peut pas entrer dans le port.»

La situation de Felixstowe a provoqué un détournement de certains flux maritimes vers Southampton, au sud du pays, où la congestion a là aussi rapidement commencé à faire des ravages. Or le chemin de fer est très mauvais dans les situations d’urgence et les adaptations soudaines de flux. Rejoindre Southampton quand ce n’est pas prévu est un problème car, contrairement à la route qui peut réorienter ses chauffeurs où que ce soit, il est plus difficile de le faire avec des conducteurs de trains, ne fusse déjà que pour les rotations du personnel et la connaissance de ligne.

Mais il y a encore pire en terme de gaspillages. Jusqu’à 36 trains intermodaux partent quotidiennement de Felixstowe pour une dizaine de destinations au Royaume-Uni. Certains terminaux, comme East Midlands Gateway, situé à Castle Donington dans le Leicestershire, peuvent accueillir jusqu’à 16 trains de marchandises de 775 mètres de long par jour. 

Cela démontre toute l’importance du trafic ferroviaire de Felixstowe qui atteint des villes comme Glasgow, Manchester, Liverpool, Leeds, Teesport, Birmingham, Birch Coppice, Doncaster, Selby, Hams Hall, Wakefield, Ditton (Widnes), Rotherham, iPort Rossington ou encore Cardiff.

Vu que le logiciel de Felixstowe n’arrive pas à faire sortir les conteneurs dédouanés à temps, ces trains intermodaux sont contraints de quitter le port avec des wagons vides et des trains « plus légers », ce qui est une double perte de ressources financières. Une première perte par l’absence de conteneur, forcément pas payés. Et une seconde perte car le système britannique incite à respecter strictement les plages horaires allouées sous peine d’amendes de « contre-performance ». Pas question donc de faire attendre les trains et de chambouler les roulements du personnel et du matériel roulant ! Par ailleurs, des trains moyennement remplis ont un effet d’entraînement sur le retail du centre et du nord de la Grande-Bretagne, qui dépend davantage du rail pour livrer les marchandises alors que le sud de Londres. Tout cela signifie des perturbations majeures dans les chaînes d’approvisionnement signifiant que les détaillants britanniques pourraient être confrontés à des semaines de retard pour mettre leur stock à temps sur les étagères avant Noël. Ces problèmes d’organisation, renforcés par la crise du Covid, sont encore aggravés par les négociations sur le Brexit, ce qui pourrait entraîner de graves pénuries industrielles et de commerce au détail dès janvier. Mais malgré tout, d’après Railfreight.com, sur la première semaine de novembre, 18.000 EVP sur les 76.000 ont pu sortir de Felixstowe par train, représentant une part de marché de 25%.

Un exemple de perturbation relaté par le Guardian est l’arrêt de l’usine automobile Honda de Swindon, qui a suspendu la production de véhicules en raison d’une pénurie de pièces en « import » ce qui, par ricochet, affecte tous les trains « export » vers Southampton. Les chaînes d’approvisionnement sont clairement rompues. Un autre exemple est le détournement de portes-conteneurs vers les ports du Continent. En arrivant aux Pays-Bas ou à Anvers, des milliers de conteneurs doivent alors repartir vers la Grande-Bretagne, soit par navires feeder, soit par le tunnel sous la Manche. Or sur le Continent, rares sont les opérateurs ferroviaires qui peuvent créer vite fait des flux au quart de tour, d’autant qu’Eurotunnel impose aussi une certaine « prévisibilité » et que le sud de l’Angleterre dispose d’un réseau très encombré.

Mais dans les crises, il y en a toujours qui tirent leur épingle du jeu. Ainsi en est-il de Liverpool, à l’Ouest du pays mais traditionnellement à l’écart des grandes routes maritimes. Bingo ! Début décembre, l’Alliance 2M qui regroupe les numéros un et deux mondiaux, Maersk et MSC, a annoncé qu’«après une évaluation minutieuse de notre réseau couvrant l’Europe du Nord vers / depuis Amérique du Nord, nous changerons notre escale de Felixstowe vers Liverpool.» Avec un probable impact sur le rail qu’il est encore trop tôt de mesurer…

Ce paysage perturbé met en lumière l’impact que provoque, non seulement la pandémie, mais aussi des décisions aussi désastreuses que le Brexit sur les chaînes logistiques. L’incertitude est très mauvaise conseillère et rompt la confiance des chargeurs et, in fine, des citoyens qui contemplent des rayons vides. Lesquels seraient amenés à adhérer plus facilement aux discours populistes réclamant encore plus de relocalisations, ce qui n’est pas une bonne nouvelle pour les trains. La boucle est bouclée !

Il reste maintenant à espérer un rapide sursaut pour remettre de l’ordre dans ces flux perturbés, d’autant qu’au 1er janvier 2021, nous saurons exactement ce que le Brexit signifie…

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British rail freight before Brexit

Brexit is coming soon. It is therefore wise to give a final account of the state of rail freight in Britain before future events come to reconsider everything.

Railway is the backbone of the British economy. It employs around 240,000 people (passengers enterprises and manufacturers including), and moves 86 million tonnes of freight each year. Contrary to what is believed, British Rail was already been reorganised into « sectors » in year 1987:

  • Trainload Freight took trainload goods, with four sub-sectors coal, petroleum, metals and construction ;
  • Railfreight Distribution took non-trainload goods, like ground operations ;
  • Freightliner took intermodal traffic
  • Rail Express Systems took parcel traffic.

In 1986, quarrying company Foster Yeoman prompted a turnaround in the reliability of rail freight by obtaining permission to run its own trains, and importing the first four EMD class 59s. Although managed by the state-owned British Rail, these units already enjoyed semi-autonomous operations. The years 1988-89 recorded nearly 149.5 million tonnes transported.

In 1996, these sectors were easily sold to new operators. Over time, the fully privatized UK rail sector has consolidated and draws the landscape we know today.

Coal, still very present in British rail freight (photo Rob Reedman via license flickr)

Coal, first victim of british politics

As in Belgium, France or Germany, the British railway lived mainly through heavy industry. A peculiarity of Britain was its policy centered on its oil extracted in the North Sea, coal mines as well as coal-fired power plants. The famous British Rail service ‘merry go round’ thus maintained a typical traffic of the second industrial revolution. It was undermined by Thatcher’s policy with the closure of the collieries and the social seism that followed in the 1980s.

From this troubled period, there remained in Britain only coal-fired power plants. It was without counting the new ecological influence which imposes now to put an end to this last avatar of « the old world of the XXth century ». And this is noticeable in the recent figures.

The state of the art today

Most freight operations are run by ten private sector companies. There are no public subsidies for freight operations nor franchising operations, as for passenger services. British companies operate totally open access, in an area restricted to Great Britain alone.

The two largest freight operating companies (FOCs) are DB Cargo and Freightliner, with Colas Rail, Direct Rail Services (DRS), GB Railfreight (GBRf) and « the others » accounting for most of the rest. Various other companies run rail operations within their own manufacturing or production sites. Despite the diversification of the rail freight sector, heavy industry still strongly marks transportation figures.

Since the mid-1990s, the operators have invested over £2 billion in new locomotives, wagons and other capital equipment to enhance capacity and improve performance. They have introduced new wagons to cater for new flows, for example wagons designed to handle biomass and aggregates traffic. They have also introduced new diesel locomotives to haul longer and heavier trains, from the now omnipresent Class 66 to the Class 70 ‘Powerhaul’ locomotives for Freightliner and Colas, as well as DRS’s Class 68 and electric/ diesel Class 88 locomotives.

Freightliner and one of his Class 66 (photo Rob Reedman via license flickr)

Total volumes increased by over 65% from 13 billion net tonne kilometres in 1995/96 to over 22 billion in 2014/15. In 2015/16 volumes fell by about 20%, primarily due to a decline in coal traffic to power stations, but 2015/16 total volumes are still over 30% above 1995/96 levels. The decision to phase out coal-fired power stations in order to reduce carbon dioxide emissions continues to affect the amount of coal lifted.

The biomass, waste and automotive sectors have also seen strong growth since 2011. The total for other goods lifted has been steadily rising in this period (2009-10 to 2016-17), however, they also recorded a decrease of 3.1% on last year to 65.3 million tonnes in 2017-18.

Globally, between the early 1980s and the mid-1990s, rail’s share of the market fell, but it has since increased its market share of the transport market from about 8 per cent to 11 per cent in 2010, in terms of tonne kms moved. Freight train movements totalled 224,000 in 2016-17, an average of 613 a day. Nonetheless, road continues to dominate the domestic freight market, accounting for approximately 89% of the transport market (68% of the total domestic freight market with coastal shipping and pipeline traffic).

The construction sector is using more and more railway. It could replace the decline of coal and ore.

It is therefore interesting to see how British rail freight has been able to gain market share in other sectors that are no longer part of heavy industry. The table below shows the distribution of rail freight. We see that intermodal transport is dominant. On the other hand, one can question the international sector, barely 3%, which indicates that serious efforts must be made with rail policy via the Channel Tunnel. We are very far from the dithyrambic projections of the 90s.

Sectoral breakdown for the period 2016-2017 (Network Rail)

Consumer goods

As reported Network Rail in a study, the size of the manufacturing sector has declined as a proportion of the national economy and there has been an increase in the volume of imported manufactured goods. This has affected rail freight in two ways:

  • Traditional bulk markets for rail, such as ESI coal (both domestic and import) and raw material supply for domestic steel production, have diminished substantially ;
  • The Import of goods by major ports, increased.

The net effect of these changes, together with the recent decline in flows linked to coal imports for the electricity supply industry, is that intermodal freight has become the largest single commodity sector conveyed by rail.

The ORR also notes a growth in the share of consumer goods. Recent rail freight figures show a positive future for rail freight in consumer goods and construction materials, which together now account for almost two-thirds of UK rail freight. With a 40% share of all freight moved by intermodal rail over the 12 months to April 2017, consumer goods sector recorded its highest share since 1998-1999 – and the highest for any sector since 2006-2007. Executive director of Rail Freight Group Maggie Simpson said: « The investment and efforts of train operators and their customers has delivered record-breaking results in construction and intermodal traffic, which we hope to see continue in the years ahead.» This is verified with the good performance of intermodal traffic. Port traffic accounts for 80% of total UK intermodal traffic, highlighting the importance of the container sector.

The port of Felixstowe is heavily focused on intermodal transport and has up to 66 daily trains from three terminals (photo portofFelixtowe)

The Port of Felixstowe is Britain’s largest container rail terminal with record-breaking throughput, and the broadest and most frequent range of services of any port in Britain. Three operators – DB Schenker Rail (UK), Freightliner and GB RailFreight – share the 66 daily arrivals and departures that connect 15 domestic destinations throughout Great Britain. Such traffic demonstrates that the vitality of the intermodal transport between the port sector and the terminals inside the country is possible when we give the possibility to various entrepreneurs to manage and create quality, with good prices, in the transport of maritime containers.

The Freightliner operator, which already existed in British Rail’s time, currently operates around 100 daily trains through a network of 12 railway terminals, 8 of which are owned. It carries nearly 770,000 containers a year.

Another sector is large-scale retailers, whose logistics are known to be an essential factor in the price war between large retailers. For this reason, this sector often avoids the use of rail, which is considered less flexible and too slow. He prefers to use road transport and avoid too large stock, very expensive. This is not the case for Tesco, the UK’s leading retailer with 12.5% ​​of the market and 3,500 points of sale throughout the UK. As a responsible retailer, Tesco places a high priority, according the entreprise, on meeting their environmental obligations. Working in partnership, Direct Rail Service and the Stobart Group have combined the very best of their road and rail capabilities to create a tailor made solution to meet Tesco’s requirements. The end result is a service which is providing highly efficient distribution between Tesco’s Daventry depot and Glasgow-Mossend. « This new service is part of our on-going commitment to be zero carbon by 2050, » said Nigel Jones, Tesco’s UK Logistics Director.

Stobart Group’s intermodal rail services operate 5 services a day, based at their hub rail terminal at DIRFT with rail services reaching all parts of the UK including Scotland’s central belt, Inverness and Aberdeen in the north down to Cardiff, South Wales and London and the South East. Stobart also has its own container terminal at Widnes (photo, between Manchester and Liverpool). This terminal is connected daily to Southampton and Felixstowe.

The Widnes terminal, entirely a property from Stobart (photo Stobart)

According Network Rail, statistical data attribute 20% of intermodal traffic to flows between non-port terminals.

Available capacities and trains length

In 2014, Network Rail created a ‘Capacity Management’ work stream with the aim of reviewing unused freight schedules. This was a collaborative work stream between Network Rail and all freight operators, intended to generate additional freight capacity without the need for infrastructure enhancements. In April 2017, the British network operator announced that almost 4,700 reserved train paths remained unused. According to the infrastructure manager, the spare capacity is attributable several factors including more efficient freight operations with longer and fuller trains, and better productivity with fewer, part-loaded freight trains, reducing wasted capacity. Paul McMahon, Network Rail’s managing director for freight and national passenger operators, said to Container-Mag: « Capacity has been freed up for the whole railway but essential capacity is reserved for freight operators. This is important given the need to support the growth of freight on the network to support the economy. »

A key driver of rail freight’s advantage relative to road is its ability to carry a greater volume of goods per journey. Where the length of trains is restricted by infrastructure limitations, this competitive advantage is diminished. Train length capability is also reliant on adequate loading and unloading facilities at ports and terminals, highlighting the need for integration across the industry.

Relatively light goods, like swap bodies, containers and automotive, are the main beneficiaries of longer trains as the traction power necessary to haul them is more readily available. For intermodal trains, the current aspiration from Network Rail is to achieve a length of 775m (including locomotive). A long-term aspiration exists across the industry to research the possibility of running trains of even greater length, for example 1500m for automotive trains.

Retrouver des capacités sur le réseau britannique (photo Bob « the lomond » via licence flickr)

And tomorrow ?

We would have liked to start the year 2019 with a note of hope. We can’t brings to that, because Brexit is certainly not a positive reference. Rail Delivery Group is clear about the impact of Brexit on UK rail freight: « The smooth flow of goods between the UK and EU is critical to the transport sector. Any changes to the tradin relationship with the EU will be faced by the transport sector in the first instance. The Channel Tunnel is the only physical link between Britain and mainlined Europe and one in four containers that arrive in British ports make their onward journey by rail. »

The port sector is expected to be hit hard in the truck segment from Europe via ferries. However, these trucks do not take the train in Britain because of a problem of gauge. Only swap bodies could be impacted. On the other hand, the containers are rather part of the ‘overseas’ market and will probably have to be treated with new customs rules. This may further obstruct the port terminals and an impact on rail traffic is to be expected. The Rail Delivery Group therefore proposes the creation of new Railway Customs Areas (RCAs) at rail freight terminals to avoid the need for a single border checkpoint.

It only remains to wait for the 2019 figures to get an idea of ​​the situation ….

 

 

References :

Network Rail – Freight Network Study

Les utilisateurs du fret ferroviaire

Raildeliverygroup – Brexit and the rail industry: policy asks

 

Le fret ferroviaire britannique, juste avant le Brexit

Le Brexit arrive à grand pas. Il était donc judicieux de rendre compte une dernière fois de l’état du fret ferroviaire en Grande-Bretagne avant que les évènements futurs ne viennent éventuellement tout remettre en cause.

Le rail est la colonne vertébrale de l’économie britannique. Il emploie environ 240.000 personnes (tout compris, avec les entreprises de transport voyageurs et les constructeurs) et transporte 86 millions de tonnes de fret chaque année. Contrairement aux idées reçues, le fret ferroviaire britannique avait déjà été réorganisé en « secteurs » dès 1987 :

  • Train Load Freight reprenait le vrac, avec les quatre sous-secteurs charbon, pétrole, métaux et construction ;
  • Railfreight Distribution reprenait les opérations intermodales, ainsi que diverses opérations « au sol » ;
  • Freightliner poursuivait son trafic intermodal ;
  • Rail Express Systems était le secteur des colis ;

En 1986 déjà, l’entreprise d’exploitation de carrières, Foster Yeoman, révolutionnait le paysage du fret ferroviaire en obtenant l’autorisation de gérer ses propres trains et en important les quatre premières locomotives de Class 59 de la firme américaine EMD.

Bien qu’étant gérées par l’entreprise étatique British Rail, ces ensembles jouissaient déjà d’une semi-autonomie de gestion. Les années 1988-89 enregistrèrent un record avec 149,5 millions de tonnes transportées. En 1996, ces secteurs pouvaient alors être facilement vendus à de nouveaux opérateurs. Au fil du temps, le secteur ferroviaire britannique, entièrement privatisé, s’est consolidé et a donné le paysage que nous connaissons aujourd’hui.

Le charbon, encore très présent dans le fret ferroviaire britannique (photo Rob Reedman via license flickr)

Le charbon, première victime de la politique britannique

Comme en Belgique, en France ou en Allemagne, le chemin de fer britannique vivait principalement grâce à l’industrie lourde. Une particularité de la Grande-Bretagne était sa politique centrée sur son pétrole extrait en Mer du Nord, les mines de charbon ainsi que les centrales électriques au charbon. Le fameux service de British Rail ‘merry go round’ (manège) entretenait ainsi un trafic typique de la seconde révolution industrielle. Il fut mis à mal par la politique de Thatcher avec la fermeture des charbonnages et le seisme social qui s’en suivit dans les années 80.

De cette période troublée, il ne resta en Grande-Bretagne que les centrales au charbon. C’était sans compter la nouvelle influence écologique qui impose maintenant de mettre un terme à ce dernier avatar de « l’ancien monde du XXème siècle ». Et cela se remarque brutalement dans les chiffres récents.

L’état des lieux aujourd’hui

La majeure partie des activités de fret ferroviaires sont gérées par dix entreprises du secteur privé. Il n’y a pas de subventions publiques pour les opérations de fret ni d’opérations sous franchises, comme pour les services voyageurs. Les entreprises britanniques opèrent totalement en open access, sur un territoire restreint à la seule Grande-Bretagne.

Les deux plus grandes sociétés d’exploitation de fret sont DB Cargo et Freightliner, tandis que Colas Rail, DRS GB Railfreight (GBRf) et les autres représentent « le reste ». Diverses autres entreprises gèrent des opérations ferroviaires sur leurs propres sites de fabrication ou de production. Malgré la diversification du secteur de fret ferroviaire, l’industrie lourde marque encore fortement les chiffres de transport.

Depuis le milieu des années 90, les opérateurs ont investi plus de 2 milliards de livres sterling dans de nouvelles locomotives, wagons et autres biens d’équipement afin d’accroître la capacité et d’améliorer les performances. Ils ont introduit de nouveaux wagons pour répondre aux nouveaux flux, par exemple des wagons conçus pour traiter le trafic de biomasse et de granulats. Ils ont également introduit de nouvelles locomotives diesel pour le transport de trains plus longs et plus lourds, allant des omniprésentes Class 66 aux locomotives Powerhaul Class 70 pour Freightliner et Colas, ainsi que des locomotives DRS Class 68 et électriques / diesel Class 88.

Freightliner et une de ses Class 66 (photo Rob Reedman via license flickr)

Les volumes totaux ont augmenté de plus de 65%, passant de 13 milliards de tonnes-kilomètres nettes en 1995/96 à plus de 22 milliards en 2014/15. En 2015/16, les volumes ont chuté d’environ 20%, principalement en raison d’une baisse du trafic de charbon vers les centrales électriques, mais les volumes totaux pour 2015/16 restaient toujours supérieurs de 30% aux niveaux de 1995/96, dernière année sous British Rail. La décision de supprimer progressivement les centrales au charbon afin de réduire les émissions de dioxyde de carbone continue d’affecter fortement les volumes ferroviaires.

Les secteurs de la biomasse, des déchets et de l’automobile ont également connu une forte croissance depuis 2011. Le total des autres biens levés a régulièrement augmenté au cours de cette période (2009-2010 à 2016-2017). Toutefois, ils ont également enregistré une baisse de 3,1% par rapport à l’année dernière, pour s’établir à 65,3 millions de tonnes en 2017-2018.

Globalement, entre le début des années 80 et le milieu des années 90, la part de marché du rail avait diminué, pour ensuite remonter de 8% à 11% en 2010, en tonnes-km parcourues. 224.000 mouvements de trains de marchandises étaient comptabilisés en 2016-2017, soit une moyenne de 613 par jour. Néanmoins, comme ailleurs en Europe, la route continue de dominer le transport intérieur de marchandises en Grande-Bretagne, représentant environ 89% du marché du transport (68% seulement si l’on tient compte de la navigation côtière et du transport par pipeline).

Le secteur de la construction utilise de plus en plus le rail. Il pourrait remplacer le déclin du charbon et du minerais

Il est dès lors intéressant de voir comment le fret ferroviaire britannique a pu prendre des parts de marché dans d’autres secteurs qui ne font plus partie de l’industrie lourde. Le tableau ci-dessous montre la répartition du fret ferroviaire. On voit que le transport intermodal est dominant. On peut en revanche s’interroger sur le secteur international, d’à peine 3%, ce qui indique que de sérieux efforts doivent être entrepris avec la politique ferroviaire via le tunnel sous la Manche. On est très loin des projections dithyrambiques des années 90.

Répartition sectorielle pour la période 2016-2017 (Network Rail – adaptation Mediarail.be)

Les biens de consommation

Comme le rapporte Network Rail dans une étude, la taille du secteur manufacturier a diminué en proportion de l’économie nationale et le volume de produits manufacturés importés a augmenté. Cela a affecté le fret ferroviaire de deux manières :

  • Les marchés traditionnels en vrac du rail, tels que le charbon (domestique et importé) et l’approvisionnement en matières premières pour la production nationale d’acier, ont considérablement diminué ;
  • L’importation de marchandises par les principaux ports, a augmenté.

L’effet net de ces changements, conjugué à la baisse récente des flux liés aux importations de charbon pour le secteur de la fourniture d’électricité, est que le fret intermodal est devenu le plus grand secteur de marchandises transporté par rail.

L’ORR constate aussi une croissance dans la part des biens de consommation. Les chiffres récents du fret ferroviaire indiquent un avenir prometteur pour les marchés de biens de consommation et de matériaux de construction, qui représentent désormais près des deux tiers du fret ferroviaire britannique. Avec une part de 40% de l’ensemble des marchandises « intermodales » au cours de la période qui s’est écoulée jusqu’en avril 2017, le secteur des biens de consommation enregistraient sa part la plus élevée depuis 1998-1999, la plus haute de tous les secteurs depuis 2006-2007. La directrice exécutive de Rail Freight Group, Maggie Simpson, déclarait ainsi que « les investissements et les efforts des opérateurs ferroviaires et de leurs clients ont donné des résultats sans précédent dans le secteur de la construction et le trafic intermodal, ce que nous espérons voir se poursuivre au cours des années à venir. » Cela se vérifie avec la bonne tenue du trafic intermodal. Le trafic portuaire compte pour 80% du total du seul trafic intermodal britannique, ce qui souligne l’importance du secteur du conteneur.

Le port de Felixstowe est fortement axé sur le transport intermodal et compte jusqu’à 66 trains quotidiens répartis dans trois terminaux (photo portofFelixstowe)

Le port de Felixstowe, par exemple, est le plus grand terminal de transport ferroviaire de conteneurs du Royaume-Uni, avec un débit record et la gamme de services la plus vaste et la plus fréquente de tous les ports de Grande-Bretagne. Trois opérateurs – DB Schenker Rail (UK), Freightliner et GB RailFreight -, se partagent les 66 arrivées et départs quotidiens qui relient 15 destinations intérieures dans toute la Grande-Bretagne. Un tel trafic démontre que la vitalité du transport intermodal entre le secteur portuaire et les terminaux à l’intérieur du pays sont possibles quand on donne la possibilité à divers entrepreneurs de gérer et créer de la qualité, avec des bons prix, dans le transport de conteneurs maritimes.

L’opérateur Freightliner, qui existait déjà du temps de British Rail, opère actuellement une centaine de trains quotidiens au travers d’un réseau de 12 terminaux ferroviaires, dont 8 en propriété. Il transporte près de 770.000 conteneurs par an.

Un autre secteur concerne la grande distribution, dont on sait que la logistique est un facteur essentiel dans la guerre des prix entre grands distributeurs. Pour cette raison, ce secteur évite souvent d’utiliser le rail, considéré comme peu flexible et trop lent. Il préfère utiliser le transport routier et éviter de trop grands stocks, très coûteux. Ce n’est pas le cas de Tesco, numéro un des ‘retailers‘ britannique avec 12,5 % du marché et 3.500 points de vente sur tout le territoire britannique. En tant que détaillant responsable, Tesco accorde une grande importance, selon le marketing de la firme, au respect de ses obligations environnementales. Travaillant en partenariat, Direct Rail Service et le groupe Stobart ont combiné le meilleur de leurs capacités routières et ferroviaires pour créer une solution sur mesure répondant aux exigences de Tesco. Le résultat final est un service intermodal qui assure une distribution très efficace entre le dépôt de Tesco à Daventry et Glasgow-Mossend. « Ce nouveau service fait partie de notre engagement continu à réduire à zéro les émissions de carbone d’ici 2050 », explique Nigel Jones, directeur de la logistique chez Tesco au Royaume-Uni.

Les services ferroviaires intermodaux du groupe Stobart assurent 5 trains par jour, depuis le hub de DIRFT (au sud-est de Birmingham), desservant toutes les régions du Royaume-Uni, en Écosse, à Inverness et Aberdeen au nord, de même que vers Cardiff et Londres au sud. Stobart dispose aussi de son propre terminal portuaire à conteneurs à Widnes (photo, entre Manchester et Liverpool). Ce terminal est relié quotidiennement à Southampton et Felixstowe.

Le terminal de Widnes, propriété de Stobart (photo Stobart)

Les données statistiques imputent 20% du trafic aux échanges par trains intermodaux entre terminaux non portuaires. (Source Network Rail)

Réserves disponibles et longueur de train

En 2014, Network Rail créait un groupe de travail intitulé « Gestion des capacités » dans le but d’examiner les horaires de fret non utilisés. Il s’agissait d’un travail collaboratif entre Network Rail et tous les opérateurs de fret, destiné à générer une capacité de fret supplémentaire sans devoir passer par de gros travaux d’infrastructure. En avril 2017, après deux années et demi d’étude, le gestionnaire du réseau annonçait que près de 4.700 sillons initiallement réservés restaient inutilisés. Selon le gestionnaire d’infrastructure, cette inutilisation serait imputable à plusieurs facteurs, notamment des opérations de fret plus efficaces avec des trains plus longs et plus chargés, et une productivité accrue avec des trains de fret partiellement chargés en moins grand nombre, réduisant ainsi le gaspillage de sillons. Paul McMahon, directeur général de Network Rail pour les opérateurs de fret et les opérateurs nationaux de transport de passagers, déclarait au Container-Mag que « des capacités ont été libérées pour l’ensemble du chemin de fer, mais des capacités essentielles sont réservées aux opérateurs de fret. Ceci est important compte tenu de la nécessité de soutenir la croissance du fret sur le réseau pour soutenir l’économie. »

Un facteur déterminant de l’avantage du fret ferroviaire par rapport à la route est sa capacité à transporter un plus grand volume de marchandises par trajet. Lorsque la longueur des trains est limitée par l’infrastructure, cet avantage concurrentiel est diminué. La longueur de train dépend aussi d’installations de chargement et de déchargement adéquates dans les ports et les terminaux, ce qui souligne la nécessité d’une intégration dans l’ensemble du secteur.

Les marchandises relativement « légères », telles que les caisses mobiles, conteneurs et véhicules automobiles, sont les principaux bénéficiaires des trains plus longs, car la puissance de traction nécessaire nécessite qu’une seule locomotive. Pour les trains intermodaux, le but du gestionnaire britannique serait d’atteindre une longueur de 775 m (locomotive incluse). Mais il aspire à long terme à étudier la possibilité de faire circuler des trains d’une longueur encore plus grande, par exemple 1500m pour certains trains d’automobiles.

Retrouver des capacités sur le réseau britannique (photo Bob « the lomond » via licence flickr)

Et la suite ?

Nous aurions aimé commencer l’année 2019 avec une note d’espoir. On peut s’en tenir à cela mais le Brexit n’offre à coup sûr pas un avenir positif pour le secteur.

L’association Rail Delivery Group est clair quant à l’impact du Brexit sur le fret ferroviaire britannique : « La fluidité de la circulation des marchandises entre le Royaume-Uni et l’UE est essentielle pour le secteur des transports. Tout changement dans les relations commerciales avec l’UE sera confronté en premier lieu au secteur des transports. Le tunnel sous la Manche est le seul lien physique entre la Grande-Bretagne et l’Europe continentale. Un conteneur sur quatre arrivant dans les ports britanniques effectue son voyage par chemin de fer. »

Le secteur portuaire devrait être fortement touché sur le segment des camions en provenance d’Europe via les ferries. Cependant, ces camions ne prennent pas le train en Grande-Bretagne du fait d’un problème de gabarit. Seules les caisses mobiles pourraient être impactées. En revanche, les conteneurs font plutôt partie du marché ‘overseas‘ (océanique mondial) et devront être probablement traîtés avec de nouvelles règles douanières. Cela risque d’encombrer encore davantage les terminaux portuaires et d’avoir un impact sur le trafic ferroviaire. Le Rail Delivery Group propose dès lors la création de nouvelles zones de douanes ferroviaires dans les terminaux de fret ferroviaires afin d’éviter la création d’un poste de contrôle frontalier unique.

Il ne reste plus qu’à attendre les chiffres 2019 pour se donner une idée de la situation…

 

Références :

Network Rail – Freight Network Study

Les utilisateurs du fret ferroviaire

Raildeliverygroup – Brexit and the rail industry: policy asks